Question de : M. Philippe Kemel
Pas-de-Calais (11e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Philippe Kemel appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, sur un article paru récemment dans la presse faisant état d'un doublement des droits d'accises sur la bière. La brasserie française ne pourrait pas supporter une augmentation de droits d'accises, au-delà de l'indexation annuelle sur l'inflation déjà appliquée. Avec un chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros HT, ce secteur économique est déjà fortement contributeur, tant par les recettes fiscales et sociales générées directement (337 millions de droit d'accises en 2010), qu'indirectement par la place qu'occupe la bière dans la distribution alimentaire et le secteur des cafés-hôtels-restaurants. De fait et spécialement pour la région du Nord qui produit près de 25 % des bières brassées en France, cette éventuelle augmentation impacterait lourdement les brasseurs. Le marché de la bière en France est fragile, comme en témoignent, d'une part, la baisse structurelle de la consommation, - 38 % depuis 1976, et, d'autre part, la position d'avant-dernier pays consommateur en Europe avec moins de 30 litres/an/habitant. Les conséquences de nouvelles taxes auraient un impact fortement négatif sur toute la filière, des agriculteurs à la distribution. Mais surtout, elles atteindraient les PME et TPE que sont le plus souvent les brasseries artisanales, dans leur capacité à investir et à embaucher, après des années d'effort à mettre au point leur production et développer leurs circuits de distribution locaux. Alors que 70 % de la bière consommée dans notre pays est produite en France, seraient menacés aussi bien les emplois directs de la brasserie que l'activité indirecte qui lui est liée, agriculture, distribution, cafés, hôtels, restaurants. Les Français en général, et les nordistes en particulier, ne comprendraient pas qu'un produit aussi populaire que la bière fasse l'objet de nouvelles dispositions fiscales. Aussi il lui demande de lui indiquer les mesures que le Gouvernement envisage de prendre afin de préserver les emplois de ce secteur, reflet de l'identité régionale.

Réponse publiée le 5 février 2013

L'augmentation des droits d'accises sur la bière poursuit avant tout un objectif de santé publique qui s'inscrit dans la politique de limitation de la consommation d'alcool, particulièrement chez les jeunes. La bière constitue en effet le point d'entrée des jeunes dans l'alcool et reste la boisson alcoolisée qu'ils consomment le plus. Cette diffusion de l'usage de la bière est facilitée par le prix faible et peu dynamique de la bière en France. Ces prix s'expliquent en partie par la très faible taxation de la bière en France, qui est la 22e plus faible d'Europe, et se situe à un niveau six fois moindre qu'en Irlande, huit fois moindre qu'au Royaume-Uni et près de douze fois moindre qu'aux Pays-Bas. C'est pour répondre à cette situation qu'une hausse des droits d'accises sur la bière a été prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. De façon cohérente avec les objectifs de santé publique, l'ampleur de cette hausse est proportionnelle à la fois au volume et au degré d'alcool : les droits d'accises sur la bière augmenteront de 1,1 centime par demi (25 cl) et par degré d'alcool. En conséquence, la hausse de taxation rapportée au prix de vente sera d'autant plus forte sur les produits alcoolisés ou à bon marché qui permettent une alcoolisation excessive. La consommation conviviale au comptoir sera nettement moins concernée en proportion, du fait de prix de vente plus élevés et d'une hausse de taxe qui n'est pas proportionnelle au prix. En effet, pour un demi titrant à 4,5° la hausse ne sera que de 5 centimes, quel que soit le réseau de distribution, et non de 40 centimes, sauf à ce que les intermédiaires choisissent d'accroître leurs marges. Rapporté à un prix de 2,50 € cela représente une hausse tout à fait modique. Les inquiétudes exprimées par les brasseurs sur l'avenir de leurs marges ne paraissent pas fondées. En effet, trois groupes internationaux concentrent 85 % du marché. Ils pourront largement répercuter la hausse des droits dans les prix de vente à la grande distribution pour préserver leurs marges. S'agissant des petits brasseurs, leur marché ne sera pas affecté par la hausse des droits d'accises : l'impact sur leurs prix sera très limité au regard du coût de ces produits de qualité, et leur consommation est davantage orientée par le choix d'un goût et d'un terroir que par le prix. En outre, au cours du débat parlementaire, les réductions de taux dont bénéficient les produits des petits brasseurs (pour une production comprise entre 10 000 et 200 000 hl) ont été renforcées au maximum de ce que permet le droit communautaire. Ainsi, les droits d'accises sur ces produits ne croîtront que de 0,4 à 0,5 centime par degré pour un demi, soit une hausse de 2 centimes pour un demi à 4,5° . Enfin, s'agissant de la filière brassicole, il convient de noter qu'environ 80 % de la production nationale de houblon et de malt est destinée à l'exportation et ne sera donc pas impactée par cette mesure.

Données clés

Auteur : M. Philippe Kemel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Contributions indirectes

Ministère interrogé : Budget

Ministère répondant : Budget

Dates :
Question publiée le 23 octobre 2012
Réponse publiée le 5 février 2013

partager