Question de : M. Éric Ciotti
Alpes-Maritimes (1re circonscription) - Les Républicains

M. Éric Ciotti attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la proposition du rapport fait au nom de la commission d'enquête sur le fonctionnement du service public de l'éducation, sur la perte de repères républicains que révèle la vie dans les établissements scolaires et sur les difficultés rencontrées par les enseignants dans l'exercice de leur profession prévoyant l'interdiction des tablettes au primaire et la mise à l'étude d'un dispositif de brouillage des téléphones portables dans les écoles et les collèges. Il lui demande son avis sur cette proposition.

Réponse publiée le 29 décembre 2015

L’« hyper connexion » des enfants et des jeunes, constatée et déplorée dans le rapport du Sénat, fait au nom de la commission d’enquête sur le fonctionnement du service public de l’éducation, est un état de fait et à l’heure où tous les élèves disposent d’un ordinateur et d’un accès à internet, il est urgent de leur proposer une éducation numérique, avec l’acquisition d’une culture numérique qui permette un usage raisonnable, critique et responsable d’internet et des réseaux sociaux d’une part, et de leur permette d’autre part de se former aux métiers de demain. Concernant l’avis visant à interdire les tablettes à l’école primaire : La mise en œuvre de la stratégie pour « faire entrer l’Ecole dans l’ère du numérique » constitue un axe fort de la refondation de l’Ecole et de la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. Elle est une des priorités du Président de la République, souhaitant résolument engager l’Ecole dans une appropriation généralisée du numérique qui doit contribuer à l’amélioration des apprentissages ainsi qu’à l’équité, à la modernisation et à l’efficience du système éducatif. Le plan « collèges numériques et innovation pédagogique », lancé en décembre 2015, est destiné à accélérer l’investissement nécessaire à la généralisation des usages et à assurer une répartition des moyens numériques au plus près des besoins. Le plan se déploie, sur la base d’un cadrage national,  par appels à projets locaux permettant de mettre en cohérence les aspects pédagogiques et technologiques à l’échelle du territoire. Dès 2015, en phase de préfiguration, 223 collèges et 352 écoles des réseaux d’éducation prioritaire ont été soutenus par le MENESR sur trois ans pour l’équipement individuel des élèves, ordinateurs ultra portables ou tablettes tactiles. Quelques enseignements tirés de la mise en place des collèges connectés (étude « collèges connectés » conduite par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du MENESR en janvier 2015) attestent des bénéfices du numérique éducatif : 58 % des élèves disent réfléchir plus facilement, 67 % trouvent le cours plus intéressant, 57 % se sentent plus concentrés, 55 % se sentent plus à l’aise en classe, 55 % disent participer plus facilement à l’écrit.  Le numérique éducatif est, en effet, au service de la réussite éducative par le renforcement de l’apprentissage des savoirs fondamentaux. Il est adapté pour faire de la pédagogie différenciée, au cœur de la réforme du collège. Il offre de nouvelles modalités d’évaluation des élèves, plus constructives et positives. Il favorise l’interactivité, la collaboration, la créativité et stimule l’engagement personnel de l’élève dans sa démarche d’apprentissage. Par ailleurs le numérique éducatif constitue un levier majeur pour réduire les inégalités scolaires, culturelles et sociales. Il permet aux enseignants d’adapter plus facilement leur enseignement à la diversité et aux besoins de chaque élève et il facilite tout particulièrement une politique d’inclusion des enfants en situation de handicap,  avec une prise en compte individualisée et des outils adaptés. Il donne accès à des contenus éducatifs et culturels de qualité, au sein de l’Ecole ou à distance. Il constitue un facteur d’émancipation et pose les bases d’une citoyenneté numérique. Chaque élève doit être initié à l’utilisation des services et outils numériques et formé à la compréhension des concepts et processus de l’informatique pour favoriser un usage personnel responsable des réseaux sociaux et des services numériques. Il prépare également les élèves à maîtriser les nouveaux modes de communication en usage dans la société. Dans un autre ordre d’idées, le numérique favorise l’implication des familles dans le parcours éducatif de leurs enfants et améliore la relation Ecole-famille (notamment par l’utilisation de l’Environnement Numérique de Travail et l’équipement mobile). Il participe à la lutte contre l’échec scolaire et renforce les politiques locales de lutte contre le décrochage scolaire (prévention et remédiation), en permettant de développer des pratiques pédagogiques innovantes qui rendent les apprentissages plus attractifs et redonnent aux élèves le goût du travail et de l’effort, mais aussi en mettant à sa disposition des outils d’orientation individualisés et interactifs pour leur permettre de construire un projet motivant. Il est également un facteur de renforcement du lien Ecole-entreprises, en aidant les jeunes à mieux identifier et se préparer aux nouveaux métiers. Enfin, il permet l’ancrage et l’ouverture de l’établissement dans son environnement en consolidant les partenariats avec les élus, le tissu économique et les associations par leurs contributions respectives à l’attractivité du territoire.  Le rapport de l’OCDE, « Connectés pour apprendre ? », élaboré à partir des résultats PISA 2012, publié en septembre 2015, montre que le numérique conduit à une amélioration des résultats des élèves dans les apprentissages fondamentaux, à condition de mener une politique intelligente fondée sur l’appropriation progressive par les enseignants des usages pédagogiques du numérique. L’introduction du numérique dans les établissements scolaires n’est aucunement remise en cause par l’OCDE, pas plus que les stratégies d’équipement visant un grand nombre d’élèves comme le montre l’exemple des pays du nord de l’Europe qui les ont depuis longtemps équipés et qui affichent de bons résultats scolaires. L’étude de l’OCDE met en évidence les conditions d’efficacité des dépenses liées aux équipements numériques au premier rang desquelles figure la formation des enseignants aux usages pédagogiques du numérique. C’est bien là un axe essentiel du plan « collèges numériques et innovation pédagogique » qui prévoit un effort exceptionnel à partir de 2016 visant à former tous les enseignants à l’utilisation du numérique et à proposer des ressources disciplinaires de qualité. L’introduction du numérique éducatif à l’école primaire se fait progressivement dans les mêmes conditions d’accompagnement en termes de formation et de mise à disposition de ressources adaptées. D’une approche intuitive pour les jeunes élèves, la tablette numérique apparaît comme complémentaire aux apprentissages. Sa rapidité de mise en œuvre, sa légèreté, sa simplicité d’utilisation et sa mobilité favorisent de nouvelles pratiques pédagogiques au sein de la classe (travail collaboratif, personnalisation des parcours…). À l’école primaire, elle développe notamment des habiletés motrices particulières et des compétences liées à la lecture sur écran. Outil d’accès à des supports diversifiés d’enseignement, outil de recherche et de traitement d’information, outil de création et de production, elle permet aux élèves des écoles primaires de construire les fondamentaux inscrits dans le socle commun de compétences, de connaissances et de culture. Elle participe à la préparation de l’élève en tant que citoyen de la société numérique. Concernant la mise à l’étude d’un dispositif de brouillage des téléphones portables à l’école et au collège : L’usage du téléphone portable est un phénomène de société qui se manifeste aussi à l’Ecole. Le Grenelle des ondes (table ronde « Fréquence, santé, environnement ») s’est prononcé pour une interdiction générale de leur utilisation dans les écoles et collèges. L’article L. 511-5 du code de l’éducation, issu de la loi n ° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement dispose ainsi que « dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l’utilisation durant toutes les activités d’enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d’un téléphone mobile est interdite ». Les chefs d’établissement, au titre des pouvoirs propres qu’ils détiennent en tant que responsables de l’ordre public dans l’établissement, peuvent en outre prendre toutes les dispositions pour faire cesser les troubles liés à l’utilisation des téléphones portables.  S’agissant de l’installation éventuelle de « brouilleurs d’ondes », l’inspection générale de l’éducation nationale a mené une réflexion sur la question. Si cette solution s’avère être un moyen pour empêcher les communications téléphoniques, il existe, cependant une certaine réticence de la population envers l’émission d’ondes électromagnétiques, notamment celles des « brouilleurs », compte tenu de leurs effets réels ou supposés sur la santé. En tout état de cause, l’article L. 33-3-1 du code des postes et télécommunications électroniques prohibe expressément « l’utilisation de tout dispositif destiné à rendre inopérants des appareils de communication de tous types, tant pour l’émission que pour la réception ». Cette utilisation est admise de façon dérogatoire « pour les besoins de l’ordre public, de la défense et de la sécurité nationale, ou le service public de la justice ». Un tel brouillage, outre son coût important selon certaines études, toucherait indistinctement les adultes, enseignants et encadrants, les personnes ayant besoin d’aide et peut-être même les voisins, s’il s’avérait impossible de confiner le brouillage à l’enceinte de l’établissement. De tels inconvénients ne sont pas souhaitables.

Données clés

Auteur : M. Éric Ciotti

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 8 décembre 2015

Dates :
Question publiée le 28 juillet 2015
Réponse publiée le 29 décembre 2015

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