médecine de prévention
Question de :
Mme Michèle Delaunay
Gironde (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Mme Michèle Delaunay attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la non-application des visites médicales du travail pourtant obligatoires pour les personnels de l'éducation nationale en particulier dans l'enseignement scolaire (premier et second degrés). La visite médicale est une obligation pour l'État comme pour les collectivités territoriales. Le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique stipule que « les agents font l'objet d'une visite médicale auprès d'un médecin de prévention tous les cinq ans. Ils fournissent à leur administration la preuve qu'ils ont satisfait à cette obligation » (art. 24.1) et que « les administrations sont tenues d'organiser un examen médical annuel pour les agents qui souhaitent en bénéficier » (art. 22). La mission du médecin de prévention est de conseiller l'administration et les agents sur les conditions de vie et de travail dans les services en adaptant notamment les postes et rythmes de travail. Il exerce une surveillance particulière à l'égard « des handicapés, des femmes enceintes, des agents réintégrés après un congé de longue maladie ou longue durée et des agents souffrant de pathologies particulières déterminées par lui » avec une « surveillance médicale qui doit être au moins annuelle et présente un caractère obligatoire ». Un rapport sur la médecine de prévention dans les trois fonctions publiques de septembre 2014 établi par l'Inspection générale de l'administration, l'Inspection générale des affaires sociales et l'Inspection générale de l'administration, de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche fait apparaître de profondes lacunes dans un dispositif mal adapté et ne répondant pas aux besoins et aux attentes. Force est de constater qu'il existe une véritable pénurie de médecins de prévention, en particulier dans l'éducation nationale. « Au 31 mars 2014, les trente académies comptaient 83 médecins correspondant à 64,7 équivalent temps plein (ETP) pour environ 898 000 agents, ce qui correspond à un ratio moyen extrêmement bas de un médecin pour 13 900 agents [...] cette situation recouvre de très grandes disparités [...] cinq académies n'ont pas de médecins de prévention ». « L'examen de la qualification des médecins employés par le ministère révèle une situation encore plus préoccupante. En effet, sur les 83 médecins, 38 seulement disposent effectivement de la qualification de médecins du travail. Parmi eux, seuls six étaient titulaires ». Cette situation ne permettant pas aux académies de respecter leurs obligations en matière de visites médicales et d'action sur le milieu professionnel, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre afin de répondre à cette problématique de santé au travail des agents de l'éducation nationale.
Réponse publiée le 23 février 2016
Le ministère chargé de l'éducation nationale s'est engagé depuis plusieurs années à améliorer la surveillance médicale de ses agents. Ainsi, en 2010, une campagne de recrutement de médecins de prévention a été lancée dans le cadre du Pacte de carrière des enseignants afin d'améliorer la couverture en médecins de prévention des services académiques. Afin de rendre plus attractives les fonctions de médecins de prévention, la possibilité a été donnée aux recteurs d'académie de fixer leur rémunération par référence à la grille inscrite dans la convention collective du personnel des services interentreprises de médecine du travail (dite grille « CISME »). Depuis 2010, une vingtaine de médecins de prévention a été recrutée, pour la plupart à temps complet (solde des recrutements et des départs). On décompte actuellement 83 médecins de prévention. L'organisation de la médecine de prévention demeure toutefois hétérogène sur le territoire. Quelques académies ne disposent pas, malgré leurs efforts, de médecin de prévention (Besançon, Guyane, Limoges, Orléans-Tours et Reims). C'est pourquoi le renforcement de la médecine de prévention demeure un objectif prioritaire des orientations stratégiques ministérielles en matière de politique de prévention des risques professionnels 2015-2016 et justifie que la campagne de recrutement se poursuive. Dans un contexte généralisé de pénurie de médecins du travail, le protocole d'accord relatif à la prévention des risques psychosociaux dans la fonction publique signé le 22 octobre 2013 a prévu le renforcement des moyens des services de médecine de prévention. Ainsi, le décret du 27 octobre 2014 relatif à l'amélioration du fonctionnement des services de médecine de prévention et des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail dans la fonction publique de l'Etat prévoit l'accueil, au sein des services de médecine de prévention, de collaborateurs médecins. Ce nouveau statut, transposé du secteur privé, vise à faciliter les passerelles vers la médecine de prévention en permettant à des médecins généralistes ou spécialistes de se reconvertir en suivant, en alternance, une formation universitaire et une formation pratique au sein d'un service de médecine de prévention, en vue de l'obtention de la qualification en médecine du travail auprès de l'ordre des médecins. A ce jour, plusieurs académies ont d'ores et déjà recruté un collaborateur médecin (Aix-Marseille, Caen et Versailles). L'effectif des médecins de prévention ne permet pas encore au ministère chargé de l'éducation nationale de remplir de façon satisfaisante les obligations en matière de surveillance médicale de ses agents selon un rythme quinquennal (visite quinquennale) ou annuel, ce dernier étant déterminé en fonction notamment de leur état de santé ou de leur exposition à des risques professionnels (surveillance médicale particulière). Cependant, les agents qui le souhaitent ont la possibilité d'obtenir une visite médicale auprès du médecin de prévention. Afin d'accompagner les services académiques ainsi que les médecins de prévention, le ministère chargé de l'éducation nationale a programmé plusieurs actions. Dans le cadre de l'animation du réseau des médecins conseillers techniques des recteurs d'académie et des médecins de prévention, des groupes de travail visant à faire un point sur les pratiques professionnelles et à définir des priorités d'actions aux médecins de prévention vont se tenir au cours du premier semestre 2016. De plus, pour faciliter l'exercice professionnel des médecins de prévention, un applicatif de gestion des visites sera prochainement déployé dans l'ensemble des académies. Enfin, les recteurs d'académie sont régulièrement sensibilisés aux enjeux de la médecine de prévention : modalités de recrutement, qualification et rémunération des médecins de prévention et organisation de la prévention médicale au niveau académique. Dans le cadre du déploiement de ce plan d'action national de prévention des risques psychosociaux, un vade-mecum, destiné aux services académiques, a d'ores et déjà été élaboré dans le cadre des travaux du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ministériel de l'éducation nationale. S'agissant de l'instauration d'outils de mesure des risques psychosociaux et plus particulièrement des suicides ou des tentatives de suicide, la DGRH du ministère organise depuis 2011, dans le cadre du dispositif de veille sociale, une remontée d'informations lui permettant d'être immédiatement alertée de tout suicide ou tentative de suicide d'un personnel et de disposer d'éléments d'information permettant d'apporter à chaque niveau les réponses aux questions qui sont posées suite à ces évènements de manière rapide et cohérente. Ces informations ne permettent pas pour autant d'avoir une vision exhaustive de la réalité car les proches des agents ne souhaitent pas toujours déclarer les causes du décès lorsqu'il survient hors du lieu de travail. En outre, les données collectées, qui concernent la population enseignante et non-enseignante relevant du ministère chargé de l'éducation nationale, ne permettent pas de dresser d'étude épidémiologique permettant de produire des estimations sur la population globale à partir de différentes méthodes statistiques précises.
Auteur : Mme Michèle Delaunay
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement : personnel
Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Dates :
Question publiée le 29 septembre 2015
Réponse publiée le 23 février 2016