Question de : M. Romain Colas
Essonne (9e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Romain Colas attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur la fiscalité appliquée aux bateaux-logements. Il apparaît, en effet, que les habitants concernés ne sont pas tous soumis aux mêmes dispositions fiscales sur le territoire national et s'acquittent d'une taxe foncière qui, pour beaucoup, pose question. Parce qu'ils utilisent à titre privatif une partie du domaine public, rendue possible grâce à la convention d'occupation temporaire (COT), ils sont assujettis à une redevance annuelle, tout à fait légitime et justifiée. Le fait qu'ils soient également soumis à la taxe d'habitation, dès lors qu'ils profitent des équipements et des services publics de leur lieu de résidence, n'est pas contestable non plus. Néanmoins, alors que l'article 1380 du code des impôts (CGI) stipule que « la taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France [...] », limitant ainsi l'application de ladite taxe aux biens immobiliers fixes, contrairement aux biens immobiliers mobiles tels que les camping-cars ou les mobile-homes et qui seraient stationnés sur un terrain mais sans scellement, conservant ainsi toute leur capacité mobile, les résidents de bateaux-logement y demeurent soumis. Or les bateaux-logements occupent l'espace public de façon temporaire tout en conservant leur capacité mobile puisque leurs amarres restent amovibles. En outre, la COT que chaque propriétaire de bateau est tenu de signer, prévoit que l'établissement Voies navigables de France ont toute autorité pour déplacer le bateau en cas de nécessité. Par ailleurs, selon l'article 531 du code civil, les bateaux sont considérés comme des biens meubles n'ayant aucune emprise foncière et n'occupant aucune parcelle cadastrée, seul critère d'éligibilité à la taxe foncière. Pourtant, l'article 1380 du CGI établit que ceux-ci sont soumis à la taxe foncière dès lors qu'ils sont « utilisés en un point fixe et aménagés pour l'habitation [...] même s'ils sont seulement retenus par les amarres ». Par conséquent, cette disposition, qui date du début du XXème siècle et qui visait alors les bateaux-lavoirs et les quelques rares habitants fluviaux, est en contradiction avec la définition même de la taxe foncière et l'utilisation qui est faite de nos jours des bateaux-logements qui, par la COT qui engagent leurs propriétaires, bénéficient d'un droit personnel et incessible, à durée déterminée de 5 ans, renouvelable mais révocable à tout moment par l'administration. Il existe, qui plus est, une directive interne CD6C113 permettant l'exonération de la taxe foncière pour les bateaux pouvant prouver leur mobilité dont les critères d'évaluation sont laissés à l'appréciation de chaque centre des impôts, entraînant une inégalité de traitement entre les régions. C'est ainsi que certains propriétaires de bateaux se retrouvent assujettis à la taxe foncière et à la taxe d'habitation, tandis que d'autres ne s'acquittent que d'une des deux voire d'aucune. Il souhaiterait donc qu'il puisse lui communiquer les mesures qu'il pourrait prendre pour clarifier la situation fiscale des propriétaires de bateaux-logements.

Réponse publiée le 8 mars 2016

La redevance annuelle acquittée par les propriétaires de bateaux logements en contrepartie de l'occupation privative du domaine public fluvial n'a pas le même objet que la taxe foncière sur les propriétés bâties qui revêt le caractère d'une imposition perçue au profit des communes, de leurs groupements et des départements. A cet égard, conformément au 3° de l'article 1381 du code général des impôts, les bateaux utilisés en un point fixe et aménagés pour l'habitation, le commerce ou l'industrie sont imposables à la taxe foncière sur les propriétés bâties, même s'ils sont seulement retenus par des amarres. En précisant qu'un bateau immatriculé sur les registres de l'inscription maritime et affecté à l'habitation permanente de son propriétaire ne saurait être imposé à la taxe foncière dès lors qu'en état de naviguer, il ne serait pas utilisé en un point fixe nonobstant le fait que ses déplacements seraient peu fréquents, la doctrine administrative aujourd'hui publiée au Bulletin officiel des finances publiques-impôts sous les références no BOI-IF-TFB-10-10-30 se contente de tirer les conséquences des dispositions légales, sans y ajouter. L'assujettissement à la taxe foncière sur les propriétés bâties des bateaux logements résulte en effet d'une appréciation, par le service des impôts, des circonstances de fait propres à chaque affaire, sous le contrôle du juge de l'impôt. Le Conseil d'Etat (CE) a notamment jugé qu'était imposable un pavillon flottant qui demeure amarré au quai d'un port et qui a été construit et aménagé, non en vue de naviguer, mais pour servir aux réunions des membres d'une société (CE, 8 juillet 1908, société nautique de Marseille).  De même, une péniche à usage d'habitation amarrée sur un canal alors même qu'elle a été déplacée à la demande du service de la navigation pour permettre la réalisation de travaux est imposable, dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle a effectué d'autres déplacements (Cour administrative d'appel de Nancy, 18 décembre 2003, Hoffarth). Pour ces raisons, et aussi parce qu'elle priverait les collectivités territoriales d'une ressource ou transférerait la charge fiscale sur les autres redevables de cet impôt, une mesure générale d'exonération des bateaux logements de la taxe foncière sur les propriétés bâties n'est pas envisagée.

Données clés

Auteur : M. Romain Colas

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts locaux

Ministère interrogé : Finances et comptes publics

Ministère répondant : Finances et comptes publics

Dates :
Question publiée le 22 décembre 2015
Réponse publiée le 8 mars 2016

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