Question au Gouvernement n° 1233 :
Internet

14e Législature

Question de : Mme Axelle Lemaire
Français établis hors de France (3e circonscription) - Socialiste, républicain et citoyen

Question posée en séance, et publiée le 24 octobre 2013


ECONOMIE NUMÉRIQUE

M. le président. La parole est à Mme Axelle Lemaire, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Axelle Lemaire. J'associe à cette question ma collègue Corinne Erhel pour m'adresser à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.

Le Conseil européen qui s'ouvrira demain à Vilnius doit porter pour la première fois sur la question du numérique. Pourquoi accorder une importance à ce sujet alors que nos jeunes, en Europe, sont au chômage et que le continent se relève avec peine d'une crise économique gravissime ? Parce que le numérique, ce n'est pas du virtuel, c'est la vraie vie : 2,5 milliards d'individus sont aujourd'hui connectés à internet. Pendant cette seule question, un million et demi de contenus créateurs de valeur seront partagés sur le seul Facebook et 408 millions d'e-mails seront envoyés.

Surtout, le numérique concerne 530 000 salariés dans l’Union européenne et l'on sait de manière certaine que ce secteur est en forte croissance, qu'il crée des emplois, et l'on sait pareillement de manière certaine que le numérique aura un impact sur nos sociétés aussi important que celui qu'a eu l'apparition de l'écriture, de l'imprimerie ou la première révolution industrielle.

Or, face à ces enjeux, le silence de l'Europe sur ce sujet est angoissant.

Souvenez-vous de notre avance, de notre leadership dans les télécoms et les hautes technologies il y a quinze ans : Alcatel, Siemens, Ericsson, Sagem, Philips menaient la danse. Depuis, les géants du net américains se sont imposés et ont imposé leurs règles, en bafouant parfois les nôtres, notamment dans le domaine de la protection des données personnelles des citoyens et de la sécurité de nos entreprises.

À force de vouloir béatement imposer une libre concurrence qui n'a d'équitable que les apparences, l'Europe est en train de perdre cette bataille.

Madame la ministre, pouvez-vous nous présenter la position de la France sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Madame la députée Axelle Lemaire, vous avez raison de rappeler que le constat que nous devons aujourd'hui dresser en matière de politique européenne du numérique est un constat d'échec.

Alors même que nous nous étions fixé, en 2000, le projet ambitieux de faire de l'Europe le continent no 1 en matière d'économie de la connaissance – c'était la stratégie de Lisbonne –, force est de constater que nous avons échoué. Lorsque nous regardons avec lucidité où en est l'économie numérique en Europe, il est vrai que nous ne pouvons que dresser un constat d'échec.

Pourtant, nous avons eu des succès. Nous avons réussi à construire des réseaux à haut et très haut débit à des prix extrêmement faibles pour les consommateurs. Nous avons soutenu l'effort de recherche et développement partout en Europe. Mais il est vrai que si nous avions en 2000 six constructeurs de téléphones mobiles en Europe qui représentaient 55 % du marché, aujourd'hui, avec le rachat de Nokia par Microsoft, nous n'en avons plus un seul. Et je ne parle pas des difficultés rencontrées par les équipementiers de réseaux de télécom.

Face à cela, la France a effectivement proposé à l'Europe de réagir. Telle est la position que le Président de la République portera demain auprès de ses homologues lors du Conseil européen.

Le fait que nous ayons déjà resitué et centré le débat sur le numérique à l'échelle européenne constitue une première victoire politique parce que, vous avez raison, ce sujet n'était pour l'instant pas traité et ne l'avait pas été par la précédente majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrice Martin-Lalande. C'est complètement faux !

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Pour la première fois, nous allons proposer à nos homologues les moyens de nous donner une véritable ambition en matière de numérique.

Alors, c'est vrai, l'Europe a raté le virage de l'internet 2.0, des smartphones et des tablettes, mais elle peut encore être au centre des prochaines révolutions numériques en gagnant la bataille de l'innovation, notamment en matière de traitement massif des données, d'informatique en nuage ou d'objets connectés.

Aujourd'hui, dans la compétition mondiale en cours, tous les acteurs – vous l'avez dit – utilisent les failles de nos systèmes réglementaires pour en tirer des avantages indus. La France souhaite ouvrir la discussion sur la régulation des plateformes de certains géants du net et rétablir l'équité fiscale entre acteurs du numérique.

C'est une grande ambition que nous souhaitons porter pour la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Données clés

Auteur : Mme Axelle Lemaire

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Télécommunications

Ministère interrogé : PME, innovation et économie numérique

Ministère répondant : PME, innovation et économie numérique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 octobre 2013

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