Question au Gouvernement n° 1377 :
Iran

14e Législature

Question de : M. Pierre Lellouche
Paris (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 27 novembre 2013


NÉGOCIATIONS INTERNATIONALES AVEC L'IRAN

M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Pierre Lellouche. Monsieur le ministre des affaires étrangères, il y a quinze jours, je vous avais en effet interrogé sur la négociation de Genève. Vous étiez alors sur une ligne de grande fermeté et l'UMP vous avait apporté son soutien tout en s'inquiétant d'ailleurs de la capacité de la diplomatie française à tenir le cap (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), malgré l'empressement de certains, je pense aux États-Unis, à signer au plus vite.

Ce week-end, l'accord transitoire a été signé et il appelle de notre part certaines réserves. On apprend d'abord qu'une négociation secrète a eu lieu depuis des mois directement entre Iraniens et Américains, véritable camouflet, un de plus, à la diplomatie française et européenne. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Quant au fond, si l'accord consacre en effet certaines avancées, je pense au renoncement à la filière du plutonium et à l'accroissement des inspections de l'AIEA, il n'en reste pas moins que l'Iran atteint la totalité de ses objectifs.

Objectif numéro un : la reconnaissance d'un droit à l'enrichissement, certes encadré, mais qui n'existe pas dans le traité de non-prolifération. Objectif numéro deux : l'Iran conserve la moitié de son stock d'uranium très enrichi, l'intégralité de ses centrales d'enrichissement et le réacteur plutonigène d'Arak.

M. Claude Goasguen. Bien sûr !

M. Pierre Lellouche. Objectif numéro trois : les 1 800 centrifugeuses restent en l'état et aucune d'entre elles ne sera détruite.

Autrement dit, il s'agit d'un accord de gel, mais en aucun cas d'un accord de désarmement. Dans ces conditions, on peut comprendre que certains soient inquiets, pas seulement en Israël mais aussi en Arabie Saoudite, dans les Émirats, en Turquie et ailleurs. En effet, l'Iran garde intacte sa capacité de passer à l'arme nucléaire à tout moment, comme jadis la Corée du Nord dans un accord du même genre signé avec les États-Unis.

Alors oui, monsieur le ministre, nous vous appelons à la plus grande vigilance. Nous aimerions connaître les tenants de cette vigilance pour maintenant et dans six mois et votre capacité à tenir les sanctions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Monsieur Lellouche, je vous entends avec plaisir, comme il y a quinze jours. J'ai parlé d'avancées, mais aussi de vigilance. Ne cherchons pas de fausses querelles là où elles n'existent pas.

M. Henri Emmanuelli. Où sont les gaullistes ?

M. Laurent Fabius, ministre. Cet accord est intérimaire. Il faudra le compléter, le renforcer. Nous allons bien sûr, dans les semaines et les mois à venir, élaborer et décider, je l'espère ensemble.

Nous avons reçu un camouflet, dites-vous, parce qu'il y avait eu des négociations secrètes. Non, monsieur Lellouche et vous connaissez suffisamment la diplomatie pour savoir ce qu'il en est. Les Américains nous ont dit, il n'y a pas de secret sur ce point au niveau des responsables, qu'ils discutaient avec les Iraniens. Parallèlement, nous conduisions la discussion avec le 5+1. Cela nous a paru tout à fait pertinent.

Lorsque les Américains et les Iraniens sont revenus, théoriquement avec une solution, la France a dit que cela ne lui convenait pas, parce qu'il manquait des éléments. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Et cette fermeté a payé.

M. Henri Emmanuelli. Et voilà !

M. Daniel Fasquelle. Non !

M. Laurent Fabius, ministre. Pour le reste, j'ai vu comme vous les réactions de chacun. Nous avons le plus grand respect pour elles, mais en même temps, nous travaillons par rapport à l'objectif de la paix et de la sécurité.

Vous avez cité les réactions d'Israël. Les dirigeants d'Israël m'ont appelé et m'ont dit que, bien sûr, ils ne pouvaient être d'accord avec ce qui est proposé, d'autant que, la semaine dernière encore, le guide iranien a tenu des propos totalement inacceptables à l'égard d'Israël. Mais ils ont ajouté qu'ils étaient reconnaissants à la France de la position de fermeté qu'elle a prise.

M. Claude Goasguen. Enfin, monsieur Fabius, ce n'est pas vrai !

M. Laurent Fabius, ministre. Il en est de même d'une façon plus positive pour l'Arabie Saoudite et d'autres pays du Golfe.

Monsieur Lellouche, nous ne travaillons pas par rapport à certain pays en particulier, même si nous avons de l'amitié pour lui : nous œuvrons pour la sécurité et pour la paix, comme je pense que vous le faites. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

Données clés

Auteur : M. Pierre Lellouche

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Affaires étrangères

Ministère répondant : Affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 novembre 2013

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