Question au Gouvernement n° 1385 :
réglementation

14e Législature

Question de : M. Gilles Savary
Gironde (9e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 28 novembre 2013


DIRECTIVE EUROPÉENNE SUR LE DÉTACHEMENT DES TRAVAILLEURS

M. le président. La parole est à M. Gilles Savary, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Gilles Savary. Ma question, à laquelle j'associe ma collègue Chantal Guittet, s'adresse au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Notre Assemblée a adopté à l'unanimité, le 11 juillet 2013, une résolution européenne sur la proposition de directive d'application de la directive dite « détachement des travailleurs », en cours de discussion à Bruxelles. Les travaux que nous avons menés ont mis en évidence l'ampleur des abus du détachement et leurs développements considérables ces dernières années. Depuis 2006, le nombre de travailleurs détachés en France est passé de 38 000 salariés à 144 000 en 2011. Aujourd'hui, entre 220 000 et 300 000 salariés low cost ne sont pas déclarés et ne sont donc pas identifiés par l'inspection du travail.

La France est, de son côté, le deuxième pays « détacheur » d'Europe. Nous envoyons environ 135 000 ouvriers, ingénieurs, commerciaux, en mission temporaire pour représenter nos intérêts économiques en Europe. Ce n'est donc pas le détachement qui est en cause, mais son détournement désormais massif et systématique à des fins d'optimisation et de dumping social, permis par l'absence d'harmonisation sociale européenne. Depuis 1996, date de la directive initiale, ni la Commission, ni la France, n'ont pris la moindre initiative pour prendre la mesure de ce phénomène.

La majorité libérale de l’Union européenne fait aujourd'hui obstacle à un durcissement de la directive. Vous avez adopté, monsieur le ministre, une position très ferme au Conseil qui vous est reprochée, ici ou là, dans les rangs de l'opposition, mais nous vous encourageons, de notre côté, à ne rien lâcher. Après celle du 6 novembre dernier, vous avez fait ce matin en conseil des ministres une communication sur ce dossier particulièrement sensible. Quel est votre état d'esprit à quelques jours du conseil Emploi, politique sociale, santé et consommateurs, dit « EPSCO », quelle position comptez-vous y défendre et quelles hypothèses de travail envisagez-vous pour l'avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le député, c'est un dossier dont vous connaissez tous les aspects car vous avez pu l'examiner aussi bien en tant que député de la République, ici même, qu'en tant que député européen. En cinq ans, lors de la dernière législature, le nombre de salariés détachés a été multiplié par quatre tandis que les fraudes se multipliaient de manière insupportable, conduisant à des situations humaines inadmissibles, à l'exploitation de salariés venus d'ailleurs dans des conditions qu'aucun d'entre nous ne peut accepter.

La fraude au détachement signifie aussi la mise en œuvre d'une concurrence déloyale extrêmement préjudiciable à notre tissu économique. Dans le secteur du bâtiment, les grandes ou les petites entreprises sont ainsi soumises à une concurrence ravageuse dont les conséquences peuvent être terribles pour notre territoire.

Nous devons lutter par tous les moyens possibles contre ces fraudes. Nous allons renforcer les contrôles en France et nous vous proposerons de modifier notre législation. Surtout, nous devrons mettre en place au niveau européen une règle qui soit la même pour tous car si nous voulons lutter contre les grands réseaux, contre ces cascades de sous-traitance qui partent d'un donneur d'ordre français et passent par cinq, six, sept voire huit autres entreprises en Europe, nous devons pouvoir agir partout ensemble. Là est l'enjeu du prochain conseil des ministres du travail.

Je serai d'une grande fermeté. Là où nos prédécesseurs n'ont jamais rien obtenu, nous parviendrons à renforcer les moyens de lutter contre la fraude ! (Vifs applaudissements continus sur les bancs du groupe SRC.) Et nous ne sommes pas isolés : l'Allemagne est avec nous ! L'Espagne est avec nous ! L'Italie est avec nous ! L'ensemble de cette Europe qui tient à préserver un socle social se battra à nos côtés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.– Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : M. Gilles Savary

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 novembre 2013

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