tabagisme
Question de :
Mme Dominique Orliac
Lot (1re circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste
Question posée en séance, et publiée le 5 juin 2014
CIGARETTE ÉLECTRONIQUE
M. le président. La parole est à Mme Dominique Orliac, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Mme Dominique Orliac. Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, vous allez prochainement présenter un plan national de réduction du tabagisme, dans la continuité du plan cancer annoncé en février dernier par le Président de la République. La cigarette électronique alimente de nombreuses discussions dans notre pays et dans les pays européens, discussions accélérées par la position de la Commission européenne du 18 décembre dernier.
D'une part, la Haute autorité de santé ne reconnaît pas le rôle de la cigarette électronique dans le sevrage ou la réduction du tabagisme, en raison de l'insuffisance de données sur la preuve de son efficacité et de son innocuité. D'autre part, l'Office français de prévention du tabagisme donne ses conseils aux médecins pour intégrer la cigarette électronique dans le sevrage tabagique.
Pour les buralistes, le vrai problème concerne la vente, car la cigarette électronique, similaire à la cigarette classique par sa gestuelle et son composé nicotinique, est aujourd'hui en vente libre. Elle crée une nouvelle forme de tabagisme passif, dont les risques ne sont pas évalués, notamment en ce qui concerne l'exposition des patients asthmatiques, et contribue à renormaliser progressivement le tabac dans notre société. De plus, les jeunes générations s'orientent vers l'utilisation conjointe de la cigarette normale et de la cigarette électronique.
Sans encadrement clair, nous mettrions à bas des années d'efforts en faveur de la prévention des risques du tabac en France, alors même que l'OMS estime que le tabac pourrait être responsable d'un milliard de morts au XXIe siècle et qu'une immense majorité des Français est hostile à cette pratique.
Madame la ministre, doit-on donc considérer la cigarette électronique comme un outil d'aide à l'arrêt du tabac ? Si oui, est-il raisonnable de laisser ce produit sous un statut de produit de consommation courante, sans respecter la loi Évin qui impose que la vente se fasse dans des bureaux agréés et qu'elle soit soumise aux taxes et interdite de publicité, et sans faire intervenir les professionnels de santé, actifs dans la prévention et la prescription de traitements classiques d'aide au sevrage par substitut nicotinique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Vous avez raison, madame la députée, de rappeler que le combat contre le tabac et le tabagisme doit nous mobiliser. Nous ne le dirons jamais assez : le tabac tue. Il tue 73 000 personnes par an en France, c'est-à-dire autant de victimes en quinze jours que les accidents de la route en un an. Un fumeur sur deux mourra à cause du tabac.
C'est dans ce contexte que la cigarette électronique a connu un essor spectaculaire et mal maîtrisé. Est-elle la réponse miracle au défi du tabac ? Évidemment non. Nous devons toutefois distinguer entre deux situations. Pour faire reculer le tabagisme, il faut d'abord que les fumeurs d'aujourd'hui arrêtent de fumer. À ces gens-là, je dis simplement ceci : mieux vaut recourir à la cigarette électronique qu'à la cigarette tout court. N'hésitez pas : abandonnez vos cigarettes classiques, prenez la cigarette électronique et l'on pourra ainsi espérer que vous arrêterez de fumer. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas interdire la cigarette électronique.
Cependant, il y a aussi toutes les personnes qu'il faut empêcher de commencer à fumer, en particulier les jeunes, auxquels vous avez fait référence. Au cours de l'année dernière, le nombre de jeunes ayant fumé leur première cigarette est égal à celui des jeunes ayant pris leur première cigarette électronique. C'est pourquoi nous devons strictement encadrer le recours à la cigarette électronique, dont vous voyez donc, madame la députée, qu'elle a un statut particulier. Elle n'est ni un produit du tabac, ni un médicament de sevrage. Selon les cas, elle peut avoir un intérêt ou, au contraire, être préoccupante. C'est à cette situation que nous devons répondre ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)
Auteur : Mme Dominique Orliac
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Affaires sociales
Ministère répondant : Affaires sociales
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 juin 2014