Question au Gouvernement n° 1965 :
peines

14e Législature

Question de : Mme Elisabeth Pochon
Seine-Saint-Denis (8e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 12 juin 2014


RÉFORME PÉNALE

M. le président. La parole est à Mme Elisabeth Pochon, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Elisabeth Pochon. Monsieur le président, chers collègues, j'associe mes collègues Dominique Raimbourg et Colette Capdevielle à cette question qui s'adresse à Mme la garde des sceaux Christiane Taubira. Madame, hier, l'Assemblée a adopté à une très large majorité, celle de toute la gauche rassemblée, le projet de loi tendant à renforcer l'efficacité des sanctions pénales. À la posture caricaturale adoptée contre ce texte par l'opposition,…

M. Alain Chrétien. Les caricatures, c'est vous !

M. Alain Chrétien. Monsieur Chrétien, s'il vous plaît !

Mme Elisabeth Pochon. …nous avons opposé une vision réaliste, née d'un diagnostic sans concession sur la situation alarmante de la justice pénale, qui a abouti à un texte progressiste, équilibré et concentré sur son objectif de lutte contre la récidive. Il se décline en trois axes majeurs : l'individualisation des peines, la consolidation des droits des victimes et la mobilisation générale des acteurs de la chaîne pénale. Ce texte est innovant parce qu'il ne se concentre pas uniquement sur la sanction, ainsi que la droite l'a toujours fait, mais fait part égale à l'exécution des peines pour bannir de notre culture pénale ce que nous appelons communément les « sorties sèches ». Les Français doivent savoir que 80 % des détenus sortent aujourd'hui de prison sans aucune mesure de contrôle ni de suivi. Grâce à l'examen obligatoire aux deux tiers de la peine de chaque détenu et la mise en place d'un suivi individualisé, ce texte met fin à cette incohérence qui consiste à enfermer des délinquants pour des courtes peines sans créer les conditions d'un retour positif dans la société.

M. Philippe Goujon. Et les victimes ?

Mme Elisabeth Pochon. Quand la justice assure un suivi effectif des personnes sous main de justice, elle permet à l'État d'assurer la défense de la société, elle prend soin des victimes, elle réprime un acte mais elle permet aux délinquants de sortir d'un parcours d'exclusion.

Madame la ministre, vous avez montré la modernité de votre approche quand vous avez initié cette réforme par une conférence de consensus. Vous donnez une orientation nouvelle à la chaîne pénale pour développer la culture du contrôle et du suivi des délinquants. Vous ouvrez des perspectives nouvelles dans notre droit pénal en introduisant le recours à des mesures de justice « restaurative », mesure encore étrangère à nos us et coutumes. Madame, vous avez lancé notre réforme pénale sur le chemin du XXIe siècle. Pouvez-vous nous éclairer sur ces voies nouvelles et nous en dire davantage sur les moyens et l'accompagnement que vous y consacrerez ?

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée Elisabeth Pochon, vous avez eu raison de rendre hommage au travail effectué par le rapporteur Dominique Raimbourg ainsi que par l'autre responsable du texte, Colette Capdevielle. Vous avez rappelé que ce texte de loi a été adopté hier à une très large majorité ; permettez-moi d'en rappeler le nombre : 328 voix. Ce nombre sonne très agréablement à mon oreille car il représente le vote de l'ensemble des groupes de la majorité, qui ont adopté ce texte d'incontestable progrès.

M. François Rochebloine. C'est toujours mieux que votre résultat aux élections européennes !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux . Le travail que vous avez effectué en commission ainsi qu'en séance a permis, en dépit du bruit, de quelques postures ou encore de caricatures, de nous armer beaucoup mieux pour prévenir la récidive en adoptant des dispositions qui seront efficaces contre cette récidive. Nous assumons en effet très clairement les finalités et les fonctions de la peine, qui consistent à sanctionner l'auteur d'un acte, à réparer le préjudice subi par la victime lorsqu'il y en a une, à protéger la société et à préparer la réinsertion de l'auteur, parce qu'il est important qu'il sorte du parcours de délinquance. Nous nous en donnons les moyens,…

M. Philippe Goujon. C'est faux !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux . …en affichant tout d'abord les principes et en restituant aux magistrats la totalité de leur pouvoir d'appréciation, car ce gouvernement fait confiance aux magistrats. Nous affichons le principe d'individualisation de la peine parce que nous savons, en France comme en Europe ou au Canada, que ce principe garantit l'efficacité de la sanction. Nous affichons aussi très clairement notre volonté…

M. Philippe Goujon. D'ouvrir les prisons !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux . …de mettre en place tous les dispositifs nécessaires pour lutter contre les « sorties sèches », parce que ces sorties sans encadrement, sans accompagnement et sans contrainte, sont des facteurs aggravant la récidive.

Le Gouvernement se donne les moyens en augmentant les effectifs des conseillers d'insertion et de probation, des juges d'application des peines et des substituts d'exécution des peines ; surtout, nous travaillons sur les méthodes parce que nous avons bien l'intention d'évaluer cette loi et de montrer à l'ensemble des Français son efficacité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur quelques bancs du groupe écologiste.)

Données clés

Auteur : Mme Elisabeth Pochon

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 juin 2014

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