Question au Gouvernement n° 2456 :
presse

14e Législature

Question de : M. Michel Françaix
Oise (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 15 janvier 2015


AIDES À LA PRESSE

M. le président. La parole est à M. Michel Françaix, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Michel Françaix. Madame la ministre de la culture, la barbarie n'a pas de visage, n'a pas de conscience, n'a pas d'âge. Aujourd'hui, la France se rappelle l'importance, l'absolue nécessité vitale de la liberté, elle se rappelle le besoin existentiel de pouvoir s'exprimer. Aujourd'hui, la France se rassemble pour hurler son refus que quelques fous puissent réduire un peuple à la peur et au silence. Aujourd'hui, la France se surprend à un sursaut d'orgueil pour être unie, parce qu'ensemble on est un peuple fort.

Il n'y a pas de pire dictature que celle qui rampe, nous impose des clichés, un modèle unique, un format de pensée. Mais nous voici dans les jours d'après. La barbarie profite de la mollesse de nos esprits, de nos failles éducatives et culturelles, de nos peurs de l'autre. La liberté, les libertés ont besoin de recul, d'analyse, de culture, de partage. Attenter à cette richesse, c'est appauvrir la République.

La presse est l'un des piliers d'une démocratie forte et fière. Les aides à la presse sont une spécificité française pour garantir liberté et pluralisme. Les trois millions de ventes, aujourd'hui, de Charlie Hebdo, sont une réponse forte à l'émotion de tout un peuple. Vous venez de confirmer à Mme Marie-George Buffet qu'une aide spécifique pourrait sans doute être trouvée et attribuée à Charlie Hebdo, mais pensons, madame la ministre, aux jours d'après. Nous avons plus que jamais l'ardente obligation de faire vivre Charlie Hebdo mais aussi de contribuer au développement de la presse citoyenne à but non lucratif. Madame la ministre, je sais que vous vous y employez, et vous nous trouverez à vos côtés dans ce juste combat. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et plusieurs bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député Michel Françaix, la culture de la haine prospère partout où règne la haine de la culture. Songeons à Boko Haram, dont le nom signifie littéralement rejet ou haine du livre ou de la culture laïque, pensons à la destruction des bouddhas par les talibans, pensons à la destruction du patrimoine culturel et monumental par AQMI ou par Daech : partout, toujours, les fanatiques s'en prennent à la culture, à ses lieux, à ses symboles, à ses représentants. Pourquoi ? Parce que la culture est précisément le sacré d'une société laïque. Et partout où la culture est mise en cause, partout où elle est mise en danger, partout où elle est menacée – comme cela a été le cas dans notre pays la semaine dernière mais également dans le monde entier, où les journalistes exercent parfois leur métier dans des conditions de sécurité extrêmement difficiles –, partout, donc, c'est par la culture qu'il nous faut répondre.

La culture est ce qui permet à l'esprit critique de s'exprimer, de se développer, c'est donc le meilleur rempart, la meilleure réponse au dogmatisme et à l'obscurantisme. Lorsque la culture et nos valeurs sont mises en cause, c'est donc bien par la culture qu'il nous faut répondre. Alors, oui, il était indispensable que Charlie Hebdo soit dans les kiosques ce matin. Oui, il était indispensable que la liberté d'expression, que la liberté de création puissent être réaffirmées, et c'est la communauté nationale dans son ensemble qui a souhaité affirmer son attachement à ces valeurs fondamentales de notre République que sont la liberté de la presse, la liberté de la création. Comment ? En manifestant dans les rues de la France entière ce week-end, mais également en achetant massivement Charlie Hebdo ce matin, en souscrivant des abonnements de soutien. Le secteur de la presse a aussi été solidaire, puisque la rédaction de Charlie Hebdo a pu être hébergée, puisque la distribution a été assurée gratuitement. C'est bien dans ce sens qu'il nous faut aller, et c'est dans ce sens que je travaillerai pour assurer à la presse sa liberté et sa pérennité. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Données clés

Auteur : M. Michel Françaix

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Presse et livres

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 janvier 2015

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