construction
Question de :
M. Romain Colas
Essonne (9e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 5 février 2015
SITUATION DU LOGEMENT
M. le président. La parole est à M. Romain Colas, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
M. Romain Colas. Ma question s'adresse à M. Patrick Kanner, ministre de la ville.
Monsieur le ministre, une récente enquête de l'Union sociale pour l'habitat nous apprend que plus de 800 opérations de construction rencontrent des difficultés, freinant la livraison de 20 300 logements, soit 20 % de la production annuelle du Mouvement HLM. L'étude souligne que près de la moitié des logements concernés sont bloqués pour des raisons politiques, liées aux dernières élections municipales. En Île-de-France, région la plus touchée par ce gel funeste des constructions, des motifs politiques sont avancés dans quatre cas sur cinq.
Cette paralysie organisée a bien entendu de lourdes et cruelles conséquences, qui ont été rappelées par la Fondation Abbé-Pierre dans son rapport annuel. Non seulement elle est irresponsable eu égard à la situation des centaines de milliers de mal-logés, mais elle a aussi des effets néfastes sur le secteur du bâtiment, en laissant les entreprises du BTP l'arme au pied, soumises au bon vouloir de certains maires, élus sur des promesses démagogiques de vitrification de leur collectivité.
Alors que sur tous les bancs de cette assemblée, il est admis que la France souffre de ségrégations sociales et territoriales, il est intolérable que certains maires préfèrent les postures politiciennes au combat acharné à mener pour le logement et la résorption des ghettos urbains.
On ne peut s'émouvoir ici, à Paris, du faible nombre de constructions, puis rentrer dans sa circonscription ou dans sa terre de future élection et encourager les municipalités qui concourent objectivement à la pénurie de logements adaptés aux besoins de nos concitoyens ! (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.– Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je le dis avec d'autant plus de conviction que j'ai vu en Île-de-France des maires labellisés « reconstructeurs » par la droite régionale, alors que certains d'entre eux se font localement, depuis mars dernier, les fossoyeurs des projets de construction. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC et écologiste.)
Je souhaite donc connaître, monsieur le ministre, les actions que le Gouvernement entend mener afin de débloquer ces projets, aujourd'hui otages de stratégies électoralistes à courte vue, qui vont à l'encontre de l'intérêt général. (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Mme Marie-George Buffet. Très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.
M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Monsieur le député, je partage votre colère. Les Français ont manifesté nombreux pour signifier leur attachement à la République, mais nous ne devons pas nous laisser leurrer par l'ampleur de ces manifestations : nombreux sont ceux de nos concitoyens qui souffrent d'être relégués dans des quartiers où s'accumulent les difficultés, sociales, économiques, urbaines. Au cœur de cette fracture, il y a le logement, avec, vous avez raison de le souligner, le double discours de certains élus qui, tout en condamnant la ghettoïsation, l'entérinent en refusant de se conformer à la loi. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC et écologiste.– Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Arrêtez !
M. Alain Marty. C'est faux !
M. Patrick Kanner, ministre. Je puis vous assurer que, face à la gravité de la situation, le Gouvernement sera force d'action.
M. Philippe Meunier. Ça promet !
M. Patrick Kanner, ministre . À la mi-mars, se tiendra un comité interministériel qui sera l'occasion de dévoiler notre plan d'action contre les inégalités, et particulièrement contre les ghettos.
M. Étienne Blanc. Donnez-nous plutôt des sous !
M. Patrick Kanner, ministre. L'État ne fuira pas devant ses responsabilités, au premier rang desquelles celle de faire respecter la loi !
Plusieurs députés du groupe UMP . Et les dotations ?
M. Patrick Kanner, ministre . À ce jour, sur les 1 022 communes soumises au bilan SRU, environ 600 n'ont pas respecté leurs objectifs de construction, dont la moitié avec un taux de réalisation inférieur à 50 %. (Huées sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.) En Île-de-France, où la crise du logement est particulièrement aiguë, quarante communes sont considérées comme carencées.
Mesdames et messieurs les députés, porter l'écharpe tricolore donne des droits, mais entraîne aussi des devoirs. Et s'il faut que les maires soient rappelés plus durement à leurs obligations, ils le seront ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.- Vives protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Oui, nous réaliserons la mixité dont notre pays a besoin et, même si cela doit prendre du temps, nous casserons les ghettos ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.– Exclamations prolongées sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Plusieurs députés du groupe UMP . Quelle mauvaise foi !
Auteur : M. Romain Colas
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Logement
Ministère interrogé : Ville, jeunesse et sports
Ministère répondant : Ville, jeunesse et sports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2015