Air France
Question de :
M. Alain Chrétien
Haute-Saône (1re circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 7 octobre 2015
AIR FRANCE
M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien, pour le groupe Les Républicains.
M. Alain Chrétien. Monsieur le Premier ministre, insupportables sont ces images de dirigeants d'Air France molestés, lynchés par de soi-disant syndicalistes, qui tournent en boucle sur toutes les télévisions du monde ! En outre, elles sont désastreuses pour l'image de la compagnie engagée dans une concurrence féroce.
Voilà plusieurs semaines qu'un bras de fer sans issue s'est engagé entre certains personnels intransigeants et une direction acculée à prendre des mesures drastiques.
Où êtes-vous, monsieur le Premier ministre ? Où est l'État actionnaire, qui doit taper du poing sur la table pour faire cesser cette chienlit portant atteinte à l'un des fleurons de notre pays ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Avez-vous pensé aux effets catastrophiques de cette situation sur les investissements étrangers ? Air France n'est pas une entreprise comme les autres : elle porte l'image de tout un pays, d'un savoir-faire, de valeurs d'excellence et d'accueil.
Que doivent penser les entreprises internationales qui souhaitent investir chez nous ? Vont-elles retrouver leurs dirigeants dans le même état que ceux d'Air France ?
Vous avez une responsabilité directe dans un fiasco qui montre l'incapacité de mener un réel dialogue social en France, où le patron est toujours montré du doigt.
La violence et l'intimidation sont-elles les nouveaux marqueurs des syndicats qui ont appelé à voter pour vous en 2012 ? Qu'attend le PS pour les dénoncer ?
Vous n'avez pas le droit de mettre en péril notre compagnie nationale. C'est trop grave, car Air France, c'est la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, je vous remercie du caractère modéré et nullement caricatural de votre question ! (Sourires et applaudissement sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) La situation d'Air France est suffisamment grave pour qu'on l'envisage avec le sérieux nécessaire.
Depuis plus d'un an, avec M. Vidalies, je soutiens la direction d'Air France.
M. Guy Geoffroy. Comme la corde soutient le pendu !
M. Manuel Valls, Premier ministre. La compagnie nationale, confrontée à des défis majeurs, dont la concurrence, n'a pas d'autre possibilité que de procéder à des réformes nécessaires, partagées par tous.
Ce matin même, je suis allé dans les locaux d'Air France, à Roissy, pour rendre hommage et exprimer mon soutien, ma solidarité, mon affection – et, je pense, celle de tous – aux deux cadres et à tous ceux qui ont été humiliés, frappés, molestés. Cet acte est évidemment intolérable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste, du groupe de l'Union des démocrates et indépendants, et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)
Il devra faire l'objet de sanctions exemplaires. La justice a été saisie. La police mène une enquête indispensable, car dans notre pays – et pas seulement pour des raisons d'image, même si celles-ci sont essentielles –, la violence est intolérable, et doit être condamnée avec la plus grande force. (Mêmes mouvements.)
J'en appelle une nouvelle fois à la responsabilité de chacun en vous mettant en garde contre toute confusion. Monsieur le député, soyez sérieux : je ne sache pas que le Syndicat national des Pilotes de ligne ait appelé à voter en 2012 pour François Hollande.
Alors que cette organisation se refuse à toute discussion sérieuse sur l'avenir de la compagnie, il appartient aux pilotes d'Air France de faire preuve de lucidité.
Eux qui accomplissent un métier admiré et s'acquittent d'une mission essentielle – transporter des millions de passagers par an – doivent s'asseoir autour de la table, discuter et participer à la recherche de la solution pour l'avenir d'Air France.
Enfin, vous avez prononcé le mot de « chienlit », que nous avons déjà entendu en fin de matinée. La remise en cause permanente des corps intermédiaires, des syndicats, de l'indépendance de la justice et de ce qui fonde la démocratie, par ce mot de « chienlit », qu'a employé également Nicolas Sarkozy, est dangereuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Puisqu'il existe un débat dans notre pays sur une certaine conception de la démocratie et sur une certaine vision de la France, affrontons-le.
Vous voulez abattre les corps intermédiaires, remettre en cause les syndicats, politiser. Non, la négociation, le dialogue social, le respect des corps intermédiaires, de la démocratie, des syndicats, des élus et des associations, et plus largement des Français, ainsi que d'une certaine idée de la France, nous les défendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : M. Alain Chrétien
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Transports aériens
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 octobre 2015