réfugiés
Question de :
Mme Danielle Auroi
Puy-de-Dôme (3e circonscription) - Écologiste
Question posée en séance, et publiée le 18 février 2016
ACCUEIL DES RÉFUGIÉS ET SOLIDARITÉ EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à Mme Danielle Auroi, pour le groupe écologiste.
Mme Danielle Auroi. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. « La maison brûle mais nous regardons ailleurs », disait Jacques Chirac à propos du climat. Aujourd'hui, nous pouvons le dire de l'Europe devant le risque des replis nationalistes, du Brexit et autres forces de désintégration à l'œuvre dans l'Union : l'Europe brûle… Allons-nous regarder ailleurs ? Face à l'Europe de toutes les peurs et de tous les replis, le couple franco-allemand doit de nouveau montrer la direction de l'Europe de la solidarité, ce que fait Mme Merkel et que vous semblez remettre en cause, monsieur le Premier ministre.
Notre responsabilité collective est majeure : nous devons, plus que jamais, faire preuve de lucidité et de courage. Les solutions ne passent pas par un repli sur soi ; elles sont européennes. Notre Union de 500 millions d'habitants, l'ensemble le plus riche de la planète, ne serait pas capable d'accueillir deux millions de réfugiés ? Cessons de nous faire peur : cet accueil coûterait 0,2 % du PIB de l'Union !
Il faut retrouver le chemin de la solidarité et de la raison. Il s'agit non seulement d'un impératif moral et du respect du droit international, mais aussi, toutes les études le montrent, de notre intérêt économique à court et moyen termes, y compris pour éviter le travail clandestin.
Établissons dès lors un compromis à même de redonner du sens au projet européen : soutenons la chancelière Merkel dans sa politique d'accueil tout en obtenant un véritable plan de relance européen, y compris pour l'emploi et la transition énergétique, avec un desserrement de l'étau austéritaire. Un tel accord entre les peuples fondateurs, pivots de l'Union, pourrait redonner un cap et recréer de la confiance.
Pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, dans ce moment dangereux pour la démocratie et la paix, nous préciser la position du Gouvernement à cet égard, à la veille d'un Conseil européen particulièrement crucial ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame Auroi, face au risque de repli sur soi et aux forces de désintégration européennes, le couple franco-allemand a évidemment un rôle essentiel à jouer, vous avez raison de le souligner. C'est la conviction du Gouvernement, et le Premier ministre l'a réaffirmé lors de son déplacement à Munich à la fin de la semaine dernière. Nous pensons qu'il faut assumer avec détermination le fait que la France, l'Allemagne et les autres pays attachés à trouver des solutions européennes doivent permettre l'accueil des réfugiés qui ont besoin d'une protection internationale mais aussi assurer le contrôle aux frontières extérieures communes de l'Union car c'est l'avenir même de Schengen qui est en jeu.
Cela signifie que les décisions qui ont été prises en commun lors des conseils européens, avec la chancelière Merkel et le Président de la République, doivent maintenant être pleinement mises en œuvre : instauration d'un système de gardes-frontières et de gardes-côtes européens ; relocalisation des réfugiés actuellement accueillis dans les centres d'enregistrement en Grèce et en Italie d'une façon solidaire dans l'ensemble des pays de l’Union européenne – et la France a pris dans ce domaine des engagements qu'elle respectera. De plus, il faut évidemment lutter contre les trafics de personnes et donc mettre en œuvre l'accord avec la Turquie pour lutter contre les filières qui exploitent aujourd'hui la misère tout en mettant des vies humaines en danger et continuent à alimenter la route des Balkans. Cette route est aujourd'hui inacceptable parce qu'elle déstabilise toute une série de pays aux frontières de l’Europe et qu'elle a créé une situation qui, en Allemagne même, n'est pas considérée comme soutenable.
Par conséquent, nous pensons qu'il faut en effet une solidarité franco-allemande sur le sujet. Elle doit s'exercer sur des bases conformes aux valeurs européennes mais aussi réalistes pour préserver l'unité européenne, et permettre de se projeter dans une intégration plus approfondie de l'Union. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : Mme Danielle Auroi
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 février 2016