tribunaux de commerce
Question de :
Mme Catherine Vautrin
Marne (2e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 2 mars 2016
TRIBUNAL DE COMMERCE DE REIMS
M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour le groupe Les Républicains.
Mme Catherine Vautrin. Tout d'abord, je crois que la crise agricole est suffisamment grave pour que l'on évite les effets de manches, surtout de la part d'un ministre dont on aimerait qu'il soit plus entendu à Bruxelles ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. – Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Il y a dix-huit mois, Châlons-en-Champagne s'est vue rayée de la carte militaire et de la carte administrative. Ces décisions ont évidemment des conséquences désastreuses pour notre département.
Le 26 février dernier, les Marnais ont reçu un nouveau choc : le tribunal de commerce de Reims ne figure pas dans la liste des dix-huit tribunaux de commerce spécialisés établie à la suite de la loi Macron.
Vous parlez de proximité, monsieur le ministre ; or ce décret crée un vide sidéral entre Paris et Strasbourg. On ne peut que regretter l'absence de compétences spécifiques liées au contentieux dans le domaine de la vigne et du vin – rien de moins que notre deuxième poste d'exportation ! –, où l'on sait que les conflits commerciaux ont souvent une dimension internationale et nécessitent une juridiction spécialisée. Pourtant, tels étaient précisément l'un des critères de la loi Macron.
Alors pourquoi cette suppression ? Quelle place, demain, pour ces dossiers dans l'immense contentieux qu'auront à traiter les juridictions parisiennes ?
Vous parlez d'équilibre des territoires, or le tribunal a ouvert près de 2 000 procédures en 2015, des chiffres proches de ceux d'autres villes retenues dans la liste. Pourquoi ce choix, donc ?
Vous parlez d'aménagement du territoire, de renforcement de l'échelon local, mais la réalité, pour nous, est assez simple. Ce sont trois textes : fusion des régions, loi NOTRe, loi Macron. À chaque fois le centre de décision local a disparu.
Vous parlez de rationalisation de l'économie et des dépenses publiques, mais qui peut raisonnablement penser que des représentants du personnel convoqués demain à des audiences de règlement judiciaire se rendront à Paris ou Strasbourg à moindre coût que dans le bassin rémois où ils résident ?
Ma question est très simple, monsieur le ministre : êtes-vous prêt à revoir cette liste et à y faire figurer le tribunal de Reims ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, la réponse à la question que vous posez est par essence délicate, et je veux vous dire pourquoi.
Il existe aujourd'hui en France 134 tribunaux de commerce. Tous souhaitaient conserver une compétence et pouvaient légitimement y prétendre. La loi du 6 août 2015 a prévu que seuls quelques-uns seraient chargés d'une mission particulière,…
M. Marc Le Fur. C'était une erreur !
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. …afin de s'appuyer, dans des contentieux extrêmement difficiles, sur la spécialité et l'expertise nécessaires pour que les jugements soient fiables, pour que la juridiction commerciale soit impartiale et pour que la réponse soit efficace.
En fonction de cette perspective, qui a été voulue par l'Assemblée nationale et par le Sénat, nous avons examiné selon quels critères nous pourrions dégager des éléments de choix.
Je rappelle que le Parlement a modifié le souhait initial du Gouvernement, en portant le seuil à 250 salariés par entreprise là où le Gouvernement proposait de le fixer à 150. L'autre seuil, celui du chiffre d'affaires, a été fixé à 20 millions d'euros. Nous devions aussi tenir compte de l'avis du Conseil national des tribunaux de commerce, des encouragements des élus, de la carte judiciaire déjà élaborée.
Il a fallu ensuite faire un choix. L'intention initiale du Gouvernement était de ne retenir que neuf tribunaux. Compte tenu de l'intégration de différentes spécificités, ce chiffre a été porté à dix-huit.
Depuis la parution du décret, de très nombreux parlementaires, députés comme sénateurs, m'ont écrit pour me demander pourquoi le tribunal de commerce de leur circonscription n'avait pas été retenu. Je ne peux leur dire que ce que je vous dis s'agissant de Reims, madame la députée : nous avons élaboré des critères qui sont par essence subjectifs. J'en assume la subjectivité parce qu'il fallait faire un choix.
J'ai donc le regret de vous indiquer que je ne reviendrai pas sur cette position. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. Christian Jacob. Dites plutôt que c'était une mauvaise loi !
Auteur : Mme Catherine Vautrin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 mars 2016