Question au Gouvernement n° 3987 :
programmes

14e Législature

Question de : Mme Annie Genevard
Doubs (5e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 26 mai 2016


ENSEIGNEMENT DE LANGUES ET CULTURES D'ORIGINE

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour le groupe Les Républicains.

Mme Annie Genevard. Conçus dans les années 1970 pour maintenir le lien des populations immigrées avec leur pays, les enseignements de langues et cultures d'origine – les ELCO – ont progressivement dérivé. Ils sont aujourd'hui un outil de repli identitaire et parfois même, comme le dit le Haut conseil à l'intégration, de véritables « catéchismes islamiques ».

Au lieu de travailler à leur suppression, vous avez fait le choix de les introduire dans les programmes scolaires dès la rentrée prochaine, mais selon les mêmes modalités et avec les mêmes professeurs étrangers : cela ne résoudra donc rien !

Dans le même temps, vous introduisez officiellement l'étude de la langue arabe dans le programme national et vous réduisez par votre réforme du collège la place du français, celle des langues anciennes qui sont nos racines ou des langues européennes comme l'allemand, qui prospéraient dans les classes bilangues. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. Christian Jacob. Eh oui !

Mme Annie Genevard. Cela, à coup sûr, divisera les Français. Pourquoi n'avez-vous pas le courage de dire aux familles que la réussite de leurs enfants passe d'abord par la maîtrise de la langue française, (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Annick Lepetit. C'est honteux !

Mme Annie Genevard. …qui n'est pas, comme le dit votre circulaire de la prochaine rentrée, un langage parmi d'autres ? (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Toutes les langues ont une égale dignité, mais le sujet n'est pas là. Monsieur le Premier ministre, vous le savez, la politique suppose des choix et des priorités. L'urgence commande que notre culture, pour être mieux partagée, s'affirme avec son mode de vie, son histoire et sa langue.

Ne croyez-vous pas que l'introduction des langues communautaires dans les programmes scolaires encouragera le communautarisme qui mine la cohésion nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Annick Lepetit. Parce que l'arabe est une langue communautaire ? N'importe quoi !

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la députée, je vous dois vraiment des remerciements pour cette question, par laquelle vous avez démontré à une grande partie de nos concitoyens – j'espère qu'ils nous écoutent ! – la conception que vous vous faites de la langue arabe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Selon vous, celle-ci est donc en concurrence avec l'allemand, par exemple, et doit, si je vous suis, être moins bien traitée et être considérée comme une langue communautaire. Nous ne serons jamais d'accord, madame la députée ! (Mêmes mouvements.)

Pour ma part, j'estime que s'il y a bien une chose à faire dans notre pays, c'est diversifier les langues que les élèves apprennent à l'école car toutes ces langues ont leur légitimité et leur intérêt.

C'est la raison pour laquelle, dans la stratégie pour les langues vivantes que je développe à l'école, je fais en sorte qu'au-delà de l'anglais, nos élèves puissent avoir véritablement accès à l'allemand, à l'espagnol, à l'italien, mais aussi à l'arabe et au chinois – et j'en suis fière ! (Mêmes mouvements.)

Mais j'en viens à votre question, qui concerne les ELCO. Vous devriez au contraire vous réjouir de ce que nous nous apprêtons à faire des ELCO, puisque nous sommes globalement tous d'accord sur ces bancs pour dire qu'ils appartiennent à un temps révolu : les années 1970, lorsque notre pays signait des conventions avec les pays dont provenaient les populations immigrées avec leurs enfants. Dans le cadre de ces conventions, on offrait à ces enfants des enseignements tant de langue que de culture, destinés à leur permettre de retourner chez eux un jour.

Aujourd'hui, tout cela n'a plus cours, évidemment, et l'apprentissage de l'arabe, du turc ou du portugais doit se faire dans un cadre scolaire, banalisé, normalisé, comme toutes les autres langues.

C'est ce que je prépare pour quelques langues dès la rentrée prochaine, et d'ici trois ans pour l'ensemble d'entre elles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Données clés

Auteur : Mme Annie Genevard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2016

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