fonctionnement
Question de :
Mme Valérie Rabault
Tarn-et-Garonne (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 19 décembre 2012
RÉFORME BANCAIRE
M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.Mme Valérie Rabault. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, depuis 2008, nous sommes touchés par une crise financière sans précédent. Cette crise s'est propagée à toute l'économie réelle ; elle s'est alors transformée en crise économique d'une ampleur inégalée, entraînant des destructions d'emplois par milliers et mettant un coup d'arrêt brutal à la création de richesse dans notre pays.
Face à cette situation et pour éviter l'effondrement de tout un système, le précédent gouvernement a été contraint d'accorder sa garantie publique à hauteur de plusieurs centaines de milliards d'euros. Il l'a toutefois fait sans demander de contrepartie, et ce en dépit des promesses du précédent Président de la République de " tirer les leçons de la crise pour qu'elle ne se reproduise pas ". Il l'a fait sans demander de contrepartie alors que d'autres pays comme les États-Unis et le Royaume Uni ont, eux, engagé un débat sur la réforme du système bancaire.
Or, monsieur le ministre, il ne peut y avoir de mobilisation d'argent public sans contrepartie. Ce principe, bafoué par la précédente majorité (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP),...
M. Thierry Mariani. Ça fait six mois que vous ressortez cet argument !
Mme Valérie Rabault. ...doit redevenir notre fil conducteur.
La première de ces contreparties doit consister à placer chacun face à ses responsabilités. Il s'agit d'identifier clairement ce qui marche et ce qui ne marche pas. Ce qui ne marche pas, c'est la survivance de l'aléa moral qui permet que des activités spéculatives puissent bénéficier d'un sauvetage financé par la puissance publique lorsqu'elles perdent de l'argent ou sont en faillite.
La seconde contrepartie découle directement de la première : il faut avoir le courage de réformer ce qui ne marche pas. Avec ce projet de séparation bancaire, vous êtes, monsieur le ministre, le premier en France, mais aussi en Europe, à proposer une solution pour réformer la banque. (Exclamations et rires sur plusieurs bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)
Aussi, pourriez-vous nous indiquer en quoi la filialisation que vous proposez constitue une séparation des activités, en quoi elle permettra de protéger l'argent des épargnants et en quoi elle garantira que les éventuelles aides publiques ne seront pas utilisées pour sauver des activités spéculatives ? (" Allô ! Allô ! " sur plusieurs bancs des groupes UMP, Rassemblement-UMP et UDI. - Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, je présenterai demain au conseil des ministres ce projet de loi visant à séparer les activités bancaires spéculatives des activités bancaires utiles au financement de l'économie. C'était une promesse très forte de François Hollande quand il était candidat. Première en Europe, ce projet, économique mais aussi politique, vise à tirer les leçons de la crise financière. Plus jamais ça : plus jamais d'aides publiques sans contrepartie !
Il vise quatre objectifs.
Son premier objectif est d'empêcher les activités spéculatives des banques de mettre en péril les déposants. On ne spécule pas avec l'argent des déposants ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.) C'est la raison pour laquelle nous allons cantonner les activités spéculatives dans une filiale ad hoc et interdire certaines activités spéculatives dangereuses comme le trading à haute fréquence ou la spéculation sur les matières premières agricoles.
Son deuxième objectif est de donner aux pouvoirs publics les moyens d'intervenir en cas de défaillance bancaire. Il n'est pas normal que ce soient les déposants ou que ce soient les citoyens, à travers les finances publiques, qui soient menacés dans ces circonstances ; il faut que ce soient les actionnaires et les créanciers. Nous mettrons en oeuvre un contrôle prudentiel renforcé en ce sens.
Son troisième objectif est d'anticiper et de prévenir. Nous créerons une nouvelle autorité qui sera à même d'imposer aux banques des mesures supplémentaires - sorte de ciseaux - afin d'écarter l'aléa moral ou le risque que vous évoquiez.
Son quatrième objectif, fondamental, consiste à protéger le consommateur. Il n'est pas normal que lorsque l'État vient au secours des banques, il néglige les citoyens les plus fragiles. Ce projet de loi comprendra des mesures qui leur seront destinées afin de plafonner les commissions, de faciliter les procédures de surendettement ou d'introduire de la concurrence dans ce que l'on appelle le crédit emprunteurs.
C'est une réforme ambitieuse, c'est une réforme forte, c'est une réforme ferme, c'est une réforme qui mérite votre soutien, mesdames, messieurs les députés : elle est historique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Auteur : Mme Valérie Rabault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 décembre 2012