Russie
Question de :
M. Sébastien Huyghe
Nord (5e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 23 juin 2016
SANCTIONS CONTRE LA RUSSIE
M. le président. La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour le groupe Les Républicains.
M. Sébastien Huyghe. Monsieur le ministre des affaires étrangères, les ambassadeurs des vingt-huit États membres de l’Union européenne ont annoncé ce mardi la reconduction des sanctions à l'encontre de la Fédération de Russie. Vous l'entérinerez dans les jours à venir, avec vos homologues, monsieur le ministre.
Alors que le blocage sur le dossier ukrainien est total, et alors que les tensions avec la Russie n'ont jamais été aussi fortes depuis la fin de la guerre froide, il est regrettable de ne pas avoir utilisé la discussion sur le renouvellement des sanctions pour essayer de sortir du blocage et d'enclencher une dynamique positive. La dernière chose dont l'Europe ait besoin, la dernière chose dont le monde ait besoin, c'est d'une nouvelle guerre froide !
Pour faire face aux grands défis auxquels nous sommes confrontés, nous avons besoin de la Russie. Nous avons besoin d'elle pour régler le conflit en Syrie, et pour lutter contre le terrorisme djihadiste, qui est notre ennemi commun.
M. Jean-Claude Perez. C'est laborieux !
M. Sébastien Huyghe. Cela ne veut pas dire que nous devrions être d'accord sur tout avec les Russes, mais cela signifie que personne ne peut se satisfaire de la situation actuelle qui, de surcroît, fait injustement souffrir nos agriculteurs, nos éleveurs et nos entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
Plutôt que de laisser ces sanctions éloigner encore plus la Russie de l'Europe, raidir les positions de part et d'autre et dégrader un peu plus encore la situation, nous aurions pu, nous aurions dû les utiliser pour créer un électrochoc positif, en proposant aux Russes la voie d'un retrait mutuel et progressif des sanctions, aussi bien européennes que russes, en échange de gestes concrets allant dans le sens de l'application des accords de Minsk.
Les accords de Minsk restent le seul cadre pour surmonter la crise ukrainienne. Ils doivent être appliqués par les Russes comme par les Ukrainiens, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Soyons réalistes : il faudra du temps avant qu'ils soient intégralement appliqués.
Il fallait sortir du blocage, et trouver un moyen d'avancer. Cette discussion sur la reconduction des sanctions vous en donnait l'occasion : vous ne l'avez pas saisie. Monsieur le ministre, que propose la France ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le député, vous avez oublié quelque chose : il existe une initiative franco-allemande, appelée Format Normandie. Nous tenons des réunions régulières dans ce cadre avec mon homologue allemand Frank-Walter Steinmeier et les ministres des affaires étrangères russe et ukrainien. Lorsque cela est nécessaire, ces réunions ont lieu au niveau des chefs d'État et de gouvernement.
Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas rendus assez loin pour que les sanctions soient levées dans le respect des accords de Minsk. Je vous rappelle que les sanctions ne sont pas un but en soi : notre objectif, à terme, est de les lever. C'est ce que j'ai dit à Vladimir Poutine lorsque je me suis rendu à Moscou. Mais pour cela, il faut des progrès concrets, réels, sur le terrain.
La violence doit reculer dans le Donbass. Il y a quelques progrès, mais ils sont encore insuffisants. Il faut aussi que les stocks d'armes soient détruits, que les échanges de prisonniers aient lieu, que l'amnistie intervienne. L'Ukraine doit aussi faire sa part : mener une réforme de décentralisation, donner un statut spécial au Donbass, et accomplir une réforme électorale. Nous sommes loin du compte !
Puisque les conditions qui nous permettraient de lever, même partiellement, les sanctions ne sont pas réunies, ces sanctions seront reconduites. Mais je vous adresse ce message : nous sommes prêts, à chaque étape, à examiner les progrès de la situation. C'est en tout cas le point de vue de la France, partagé par l'Allemagne. Il y aura un débat sur cette question au Conseil européen des 28 et 29 juin 2016. Je souhaite que les progrès accomplis soient examinés objectivement afin de mesurer ce qu'il reste à faire. Les sanctions seront prolongées pour une durée de six mois ; si, au cours de cette période, des progrès sont accomplis, alors il faudra tendre la main à la Russie pour aller vers une levée progressive des sanctions.
C'est le contraire de la guerre froide. Nous ne voulons pas la guerre froide. Nous voulons la paix, nous voulons le partenariat et la sécurité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Auteur : M. Sébastien Huyghe
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 juin 2016