Question au Gouvernement n° 4147 :
organisation

14e Législature

Question de : M. Renaud Gauquelin
Rhône (7e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 14 juillet 2016


RECRUTEMENT DE M. BARROSO PAR GOLDMAN SACHS

M. le président. La parole est à M. Renaud Gauquelin, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Renaud Gauquelin. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, mesdames et messieurs, certains voudraient jeter les peuples dans les bras des populistes opposés à la construction européenne qu'ils ne s'y prendraient pas autrement ! Après d'autres, voici que José Manuel Barroso, récemment encore patron de la Commission européenne sur une longue période, devient conseiller de la firme américaine Goldman Sechs (Rires sur les bancs du groupe Les Républicains) – pardon, Goldman Sachs ! –, source de la crise des subprimes et porteuse, il y a dix ans, du masque de la dette souveraine de la Grèce, qui a plongé le peuple grec dans des difficultés majeures. Que l'on parle avec l'accent français ou anglais, la vérité est la même !

Ce recrutement est immoral ; ce recrutement ternit l'image de l'Europe ; ce recrutement est opposé à la lettre et à l'esprit des engagements que prennent pendant leurs fonctions, mais aussi au-delà, tous les commissaires européens. Au même moment, à l'opposé, Michel Sapin et le Gouvernement français, lors de l'Eurogroupe, ont pris la défense du Portugal et de l'Espagne qui, parce qu'ils ont « fourni des efforts monstrueux », ne méritent pas d'être sanctionnés. Dans le même état d'esprit, afin de donner aux peuples une image positive et juste de l'Europe, notre Gouvernement – nous l'évoquions ce matin même à l'Assemblée – lutte d'arrache-pied contre certains abus scandaleux en matière de travailleurs détachés.

M. Christian Jacob. Voilà une question spontanée !

M. Renaud Gauquelin. Une fois encore, notre pays est à la pointe de ce combat : cette année, douze fois plus de contrôles ont été effectués que l'an dernier. Mes chers collègues, voilà des actions de notre Gouvernement qu'il faut rappeler ! À l'opposé, l'attitude personnelle de certains commissaires européens – dont le plus connu du grand public, M. Barroso – n'est ni morale ni conforme aux règles européennes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Luc Laurent. Honteux !

M. Renaud Gauquelin. Monsieur le ministre, là aussi la France doit être à l'avant-garde : quelle est la réaction du Gouvernement à cet événement ?

M. Christian Jacob. Écrivez mieux les questions pour qu'il soit capable de les lire !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Monsieur le député, vous venez de le dire : l'embauche de l'ancien président de la Commission européenne, M. Barroso, par la banque d'affaires Goldman Sachs, est particulièrement scandaleuse, compte tenu du rôle joué par cette banque dans la crise financière de 2008, mais aussi du trucage des comptes publics de la Grèce pendant la crise. Cette affaire soulève un problème majeur : celui des règles relatives aux conflits d'intérêts, qui doivent s'appliquer aux anciens membres de la Commission et tout particulièrement à ses présidents. Il s'agit, de la part de M. Barroso, d'une faute morale, politique et déontologique.

M. Damien Meslot. Et Mauguin ?

Un député du groupe Les Républicains. Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. C'est le pire service qu'un ancien président d'une institution européenne pouvait rendre au projet européen à un moment de l'histoire où ce projet a au contraire besoin d'être soutenu, porté et renforcé.

Les articles 17 du traité sur l’Union européenne et 245 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne forment la base du code de conduite qui s'applique aux commissaires jusqu'à dix-huit mois après le terme de leur mandat. Il est clair que si ce code n'empêche pas qu'un tel fait puisse aujourd'hui se produire de façon légale, c'est qu'il faut changer ce code et son application, et renforcer le contrôle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Christian Jacob. Il faut changer de gouvernement !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Nous demandons donc qu'une action soit entreprise par la Commission européenne pour renforcer les règles relatives aux conflits d'intérêts. Le président de la Commission doit être au-dessus des pressions d'intérêts privés. Il faut étendre la durée d'interdiction d'embauche par une entreprise privée, élargir la liste des incompatibilités et renforcer le contrôle.

M. Claude Goasguen. Assez !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. On pourrait pour cela créer un organe indépendant au sein duquel seraient représentés le Parlement européen dans sa diversité et des juristes internationaux, qui serait chargé d'évaluer le risque de conflit d'intérêts après la fin des fonctions et d'interdire ce genre d'embauches. Avec cette affaire, M. Barroso fait le lit des anti-européens. Je l'appelle donc solennellement à renoncer à son poste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Données clés

Auteur : M. Renaud Gauquelin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Union européenne

Ministère interrogé : Affaires européennes

Ministère répondant : Affaires européennes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 juillet 2016

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