réforme
Question de :
M. Guénhaël Huet
Manche (2e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 30 novembre 2016
COMPTE PÉNIBILITÉ
M. le président. La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe Les Républicains.
M. Guénhaël Huet. Monsieur le Premier ministre, en 2015, près de 520 000 salariés, pour la grande majorité des hommes, ont ouvert un compte pénibilité selon les quatre critères en vigueur : travail de nuit, travail répétitif, travail en horaires alternants ou travail en milieu hyperbare. Six autres critères sont depuis entrés en vigueur, en juillet dernier. Aujourd'hui, 32 % des travailleurs déclarent être soumis au bruit, 48 % se disent soumis aux postures douloureuses et 68 % à des mouvements répétitifs, soit autant de travailleurs pouvant prétendre au compte pénibilité.
Un rapport, que votre administration a publié très récemment mais également très discrètement, dresse un bilan négatif de la mise en application de ce dispositif, estimant qu'il est bien loin d'atteindre ses objectifs. En outre, ce rapport n'évoque à aucun moment sa mise en œuvre concrète et encore moins son financement dans la durée.
Pourtant, le Conseil d'orientation des retraites a révélé que le dispositif était clairement sous-financé en raison même de la possibilité de partir en retraite anticipée deux ans plus tôt. Cela entraînera à la fois une diminution des cotisations, et donc des recettes, et une charge supplémentaire pour les régimes de retraite.
Monsieur le Premier ministre, une nouvelle fois, vous instaurez un dispositif sans tenir compte des difficultés qu'il génère pour les entreprises. Vous avez pourtant déclaré, lors des universités d'été du MEDEF, il y a deux ans, que vous aimiez les entreprises.
M. Régis Juanico. Les salariés !
M. Guénhaël Huet. Je crois que c'est l'inverse : vous ne les aimez pas, vous les méprisez. Vous alourdissez leurs charges et leurs contraintes. Tout cela est très loin du choc de simplification que vous prônez.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous comprendre que les entreprises ont besoin de souplesse pour être compétitives et quand allez-vous prendre enfin les mesures indispensables pour relancer la compétitivité de notre pays ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le député, permettez-moi tout d'abord de vous rafraîchir quelque peu la mémoire. En 2003, c'est par un amendement de Xavier Bertrand à la loi relative à la réforme des retraites, portée par François Fillon, que fut reconnue la pénibilité au travers d'une négociation au niveau des branches. Neuf ans plus tard, cette disposition de la loi n'était toujours pas appliquée.
M. Christian Jacob. Moins de condescendance s'il vous plaît !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Sur le fond, la main sur le cœur, tout le monde est d'accord pour reconnaître la pénibilité de certains métiers et le fait qu'un ouvrier a presque sept ans d'espérance de vie de moins qu'un cadre. En revanche, il n'y a plus personne dès qu'il s'agit de mettre en œuvre une mesure en la matière.
Pour notre part, nous nous étions engagés à l'appliquer, et nous tenons nos promesses. En effet, 500 000 salariés ont bénéficié d'une reconnaissance de la pénibilité de leur travail en fonction des quatre premiers facteurs. Où en sommes-nous aujourd'hui ? Les organisations patronales souhaitaient ne plus avoir à remplir la fiche individuelle de pénibilité, dans un souci de simplification. Nous avons tenu compte de cette demande et privilégié les référentiels de branche dans chacune d'entre elles.
D'ailleurs, la semaine dernière, j'ai signé avec Marisol Touraine quatre arrêtés d'homologation s'agissant de grosses branches – je pense au commerce de gros et international, aux écaillers - poissonniers – pour près de 265 000 salariés. À partir du 1er janvier, les six autres facteurs seront pris en compte. Mais aujourd'hui, en effet, il y a dans certaines branches professionnelles, à la demande de certaines organisations patronales, de la rétention d'informations pour que les référentiels ne sortent pas.
Je vous le dis ici très clairement : nous sommes dans un rapport de forces politique vis-à-vis de ces branches où les référentiels sont prêts ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Auteur : M. Guénhaël Huet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Retraites : généralités
Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 novembre 2016