Question au Gouvernement n° 651 :
culture et communication

14e Législature

Question de : M. Marcel Rogemont
Ille-et-Vilaine (8e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 20 mars 2013

RESTITUTION DES OEUVRES D'ART À DES FAMILLES JUIVES
SPOLIÉES DURANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
M. Marcel Rogemont. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Vous venez, madame la ministre, de remettre officiellement à leurs propriétaires, au nom de la France, sept tableaux dont ils furent spoliés lors de la seconde guerre mondiale. Il est nécessaire de rappeler que plus de 670 000 oeuvres ont été pillées dans toute l'Europe entre 1939 et 1945 par les nazis, dont plus de 100 000 pour notre seul pays, et que trop d'oeuvres n'ont pas encore été restituées. Il est vrai que ce n'est pas chose facile lorsque sur les dizaines de milliers de juifs français déportés, seuls 2 500 ont survécu.
Aussi, depuis la fin de la guerre, les pays européens ont édicté des lois relatives à la restitution des oeuvres d'art à leurs propriétaires. Malgré l'existence de ces lois, de nombreuses oeuvres d'art n'ont pas été réclamées et ont été déposées dans les collections nationales. La France a-t-elle vraiment toujours tout mis en oeuvre pour retrouver les propriétaires ?
La chute du mur de Berlin, entraînant l'accès à des informations jusque-là cachées, la numérisation des oeuvres et la tenue de conférences internationales ont sans aucun doute donné un nouvel élan aux recherches. La France, aujourd'hui, montre l'exemple avec cette restitution majeure, la plus importante réalisée depuis des lustres par notre pays.
Bien naturellement cette initiative ne peut rester sans lendemain. Il resterait plus de 2 000 oeuvres en France qui n'ont pas retrouvé leurs propriétaires légitimes. Le temps de l'histoire apaisée nous regarde. Notre pays a un devoir vis-à-vis des victimes des persécutions nazies et de leurs familles.
C'est pourquoi je vous demande, madame la ministre, de préciser à la représentation nationale les initiatives nouvelles que vous entendez prendre pour que la France assume ses responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Paul Giacobbi et M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur Marcel Rogemont, ce matin, en effet, j'ai eu beaucoup d'émotion à remettre sept tableaux des XVIIe et XVIIIe siècles aux descendants, et à leurs ayants droit, des propriétaires juifs qui en avaient été spoliés pendant la deuxième guerre mondiale.
La France n'a pas été en reste s'agissant de la restitution des oeuvres d'art spoliées. Ainsi, après la guerre, 45 000 oeuvres ont été rendues à leurs propriétaires. Mais, vous l'avez rappelé, il en reste aujourd'hui 2 000, classées MNR - " Musées Nationaux Récupération ", chacun peut voir ces petits cartels dans les musées -, susceptibles d'avoir été pris à leurs propriétaires légitimes pendant la guerre. En 1997, la commission Matteoli a entamé un travail extrêmement important. Puis, en 1998, il y a eu la création de la commission d'indemnisation des victimes de spoliation, qui travaille aujourd'hui avec les personnels du ministère de la culture et du ministère des affaires étrangères pour retrouver les propriétaires légitimes.
J'ai décidé de donner une nouvelle impulsion au dispositif car, jusqu'à présent, il fallait que les ayants droit, les familles des victimes de spoliation, fassent eux-mêmes des démarches pour pouvoir prouver leurs droits et ainsi récupérer leurs oeuvres : désormais, un groupe de travail installé par le ministère de la culture mènera des recherches à partir d'une liste de 163 oeuvres qui sont dans nos musées et dont nous avons la quasi-certitude qu'elles proviennent de spoliations. C'est un devoir moral vis-à-vis des victimes ; c'est aussi un devoir scientifique car cette page de l'histoire est également une page tragique de l'histoire de l'art. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : M. Marcel Rogemont

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ministères et secrétariats d'état

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 mars 2013

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