Question orale n° 106 :
A 51

14e Législature

Question de : M. Christophe Castaner
Alpes-de-Haute-Provence (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Christophe Castaner attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur le projet de prolongation de l'A 51. Le dernier tronçon de cette autoroute, qui aurait dû relier Marseille à Grenoble et désenclaver les départements alpins, a été abandonné par le précédent Gouvernement dans le schéma national des infrastructures de transport (SNIT). Il y a quelques semaines, une commission a été chargée d'analyser notamment le budget d'investissement prévisionnel initial de ce SNIT. Les chiffres prévoyaient 245 milliards d'euros d'investissement sur 25 ans, sans même y intégrer les plus de 2 milliards d'euros de la prolongation de l'A 51. Ce projet est en débat depuis la fin des années 90, faisant de cet axe, pourtant l'unique autoroute nord-sud de la région Provence-Alpes-Côte d'azur, une voie interrompue. Aujourd'hui, les discussions en cours sur le sujet avec les concessionnaires actuels ne grèvent pas la nécessité de résoudre avec diligence cette problématique. L'aménagement d'une liaison rapide et sûre entre Sisteron et Grenoble par le col du Fau, itinéraire de l'E 712 (ex-RN 75), doit représenter une première solution. Il demande ainsi dans quelle mesure ces travaux peuvent être inscrits au calendrier des dépenses de l'État pour l'infrastructure afin de permettre à ce territoire de se développer.

Réponse en séance, et publiée le 30 janvier 2013

PROLONGEMENT DE L'AUTOROUTE A 51

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour exposer sa question, n° 106, relative au prolongement de l'autoroute A 51.
M. Christophe Castaner. Monsieur le ministre chargé des transports, je souhaite vous parler de l'A 51, cette autoroute lancée en 1987, dont le dernier coup de pioche a été donné en 1999, et qui s'arrête au sud de Gap, ne permettant pas de relier la ville de Marseille à la ville de Grenoble et à l'Isère. Ce projet d'autoroute unique pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et permettant de relier le nord au sud, n'est pas aujourd'hui parachevé ; une région de cinq millions d'habitants n'est pas connectée avec son nord.
Vous savez que le gouvernement précédent a abandonné le projet de poursuite de cette autoroute, envisageant, dans le cadre du Schéma national des infrastructures de transport, des investissements lourds qui seraient réalisés sur l'une des quatre solutions de l'interconnexion : la liaison de Sisteron à Grenoble par le col de Luce-La-Croix-Haute.
Vous avez souhaité, monsieur le ministre, pour des raisons parfaitement légitimes, évaluer le SNIT, qui représente un engagement totalement virtuel de 245 milliards d'euros, bien au-delà des capacités de l'État et des collectivités locales pour réaliser ces investissements.
Toutefois, s'il existe des réflexions et un plan B visant à mobiliser les sociétés autoroutières, il ne faut pas négliger le fait que l'inscription au SNIT de cette solution alternative par l'axe E 712, donc par la RD 1075 et la RN 85, était déjà une solution de repli. J'appelle donc votre attention sur le risque qu'au terme de cette évaluation le gouvernement actuel, après l'abandon de l'A 51 par le précédent gouvernement, pense devoir abandonner cette interconnexion. Il est impératif que nous réalisions, dans les années à venir, une liaison rapide et sûre reliant la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à la région Rhône-Alpes.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, vous appelez mon attention sur une question majeure d'aménagement du territoire dans votre région : le projet d'autoroute A 51 entre le col du Fau et La Saulce, dont le coût, estimé aujourd'hui à 2,5 milliards, n'a pas été intégré par l'ancien gouvernement dans le Schéma national des infrastructures de transport. Vous avez souligné à juste titre l'enjeu que représente ce barreau manquant pour la relation entre les différentes régions et pour votre bassin de vie.
Dans ce cadre, la possibilité d'une réalisation en concession sans aucun recours à des fonds publics est évoquée. J'ai eu l'occasion de travailler sur ce dossier : il convient d'être prudent, car tous les scénarios envisagés posent des questions d'acceptabilité, financières ou juridiques. Il est important d'être dans la réalité plutôt que dans l'annonce. De ce point de vue, je sais que j'ai affaire à des élus responsables, à rebours des faux espoirs que l'on a pu faire naître en d'autres temps.
L'estimation du trafic est comprise entre 9 000 et 14 000 véhicules par jour ; les études menées montrent malheureusement que les recettes de péage couvriraient à peine les coûts d'exploitation de la nouvelle infrastructure, ce qui rendrait donc nécessaire le versement au concessionnaire par les collectivités publiques d'une subvention d'équilibre très importante. En outre, la possibilité juridique de recourir à une concession autonome n'est pas avérée, compte tenu de la faiblesse des montants de péages attendus par rapport aux standards définis par la jurisprudence.
L'une des solutions permettant de ne pas faire financer le projet sur des fonds publics serait une forme d'adossement : l'intégration du projet à une concession existante, en compensant au concessionnaire, notamment par la prolongation de la durée de concession, les dépenses supplémentaires d'investissement.
Je suis en discussion avec l'ensemble des concessionnaires et le Gouvernement a la volonté, comme je l'ai indiqué lors de l'inauguration de l'A 89, d'établir un plan de relance autoroutier dans un dialogue et des relations équilibrés entre l'État et les concessionnaires. Le projet doit donc être évalué dans le cadre de ce plan de relance.
L'adossement se heurte malgré tout à plusieurs difficultés, liées notamment à la réglementation européenne ; il faudra vérifier qu'elles ne s'opposent pas à un financement assuré de cette manière.
La discussion est ouverte et le dossier a été déposé. Vous avez souligné la compétence de la commission Mobilité 21, qui aura, avec son président Philippe Duron, à expertiser, hiérarchiser et rendre aussi réalisable que réaliste ce qui a été listé pour 245 milliards d'euros. Voilà qui est de la plus grande importance pour les territoires.
Sachez que nous sommes très attachés à ce projet : nous nous interrogeons sur la nature de son financement et sur l'éventualité de solutions alternatives auxquelles vous faisiez référence. Je suis persuadé que, mobilisés dans cet esprit de responsabilité que je soulignais, nous parviendrons à faire de ce projet important pour votre région une entreprise visible et soutenable.
M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner.
M. Christophe Castaner. M. le ministre, je partage vos ambitions de responsabilité et de réalisation, grâce au plan de relance autoroutier. Toutefois, dans notre cas précis, il ne faudrait pas que les études relatives à l'hypothèse d'une solution autoroutière, comprenant un adossement complémentaire, gèlent la réflexion, et partant son inscription dans le schéma nouveau de transports de mobilité durable que vous allez proposer, autour de la solution RD 1 075-RN 85, dont le coût serait quatre fois inférieur à celui d'une solution autoroutière. Si, d'aventure, les raisons juridiques que vous avez évoquées rendaient la solution autoroutière impossible, il serait bon de rester mobilisés autour de cette quatrième option, qui est sans doute la moins coûteuse et la plus efficace s'agissant du développement durable.

Données clés

Auteur : M. Christophe Castaner

Type de question : Question orale

Rubrique : Voirie

Ministère interrogé : Transports, mer et pêche

Ministère répondant : Transports, mer et pêche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 janvier 2013

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