politique industrielle
Question de :
M. Serge Janquin
Pas-de-Calais (10e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Serge Janquin attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur les plans industriels d'avenir. En septembre 2013, le Président de la République et le précédent ministre à l'industrie présentaient 34 plans, associant l'État, les collectivités territoriales, les entreprises et les universités autour de grands projets pour réindustrialiser la France ; le Gouvernement espérait ainsi créer ou sauvegarder environ 500 000 emplois. Depuis, le ministre a indiqué que par souci d'efficacité et de cohérence, 13 plans industriels d'avenir seraient mis en œuvre. Dès lors se pose la question de savoir comment passer de 34 à 13 plans : est-ce que c'est par abandon de ceux qui seraient jugés les moins performants ? Si oui selon quels critères ? Est-ce par regroupement des différents projets en 13 pôles qui en assureraient la cohérence sans en abandonner aucun ? Si c'est le cas, alors cela suppose de dessiner l'architecture de ces pôles tant au plan industriel qu'au plan des territoires : les sites physiques initiaux sont-ils maintenus avec un chef de file qui en assura le commandement ? Les sites physiques sont-ils transférés sur un seul territoire ce qui supposerait l'abandon de structures déjà financées et déjà opérationnelles. La question est d'importance pour le projet porté par M. Pierre Moreau qui fut son adjoint au développement économique, au titre de Artois Comm, agglomération de 228 000 habitants, et par le conseil régional Nord/Pas de Calais. Autour du CREPIM (laboratoire européen des matériaux concernés par la sécurité incendie, et du CRITT M2 A, l'un des tout premiers clusters conçus en France. Centre d'essais moteurs et acoustique automobile, développant ses activités sur les turbocompresseurs et désormais sur un département électrique « autonomie et puissance des batteries », il travaille aussi avec le campus des métiers du lycée de travaux publics et l'université sur la thématique de « route intelligente ». Le CRITT M2 A a commencé ses activités en 2000 avec deux doctorants et un chef de projet, il recrute en 2015 son trentième collaborateur universitaire. Cet établissement a une compétence et une renommée internationales. En témoigne la réussite de la conférence qu'il a organisée en octobre 2014 et qui a réuni des industriels de l'automobile, du ferroviaire et de l'aéronautique du monde entier. C'est par rapport à ces compétences et ces enjeux d'avenir, que M. le député souhaite savoir quel sort le ministre entend réserver à ces outils exceptionnels qui témoignent du savoir-faire de nos chercheurs et de nos industriels, dans le monde entier.
Réponse en séance, et publiée le 3 juin 2015
SORT DES PLANS PLURIANNUELS D'AVENIR
M. le président. La parole est à M. Serge Janquin, pour exposer sa question, n° 1081, relative au sort des plans pluriannuels d'avenir.
M. Serge Janquin. Ma question s’adresse à monsieur le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.
En septembre 2013, le Président de la République et le prédécesseur de M. Macron au ministère chargé de l'industrie présentaient 34 plans associant l'État, les collectivités territoriales, les entreprises et les universités autour de grands projets pour réindustrialiser la France. Le Gouvernement espérait ainsi créer ou sauvegarder environ 500 000 emplois.
Depuis lors, M. Macron a indiqué que, par souci d'efficacité et de cohérence, 13 plans industriels d'avenir seraient mis en œuvre. Dès lors se pose la question de savoir comment vous pensez passer de 34 à 13 plans. Cela se fera-t-il par l’abandon de ceux qui seraient jugés les moins performants ? Si oui, selon quels critères ? Si c'est le cas, cela suppose de redessiner l'architecture de ces pôles tant au plan industriel qu'au plan des territoires, ce qui pose toute une série de problèmes que je ne développerai pas ici.
La question est d'autant plus sensible – et c’est là une nouveauté dans le débat démocratique – qu’au cours des débats sur la loi de transition énergétique, le Gouvernement, pressé de questions sur son financement, a déclaré qu’elle serait financée à 50 % sur les crédits prévus pour le Programme d'investissements d’avenir. J’aimerais comprendre comment les mêmes crédits pourraient financer deux programmes d’investissement à pratiquement deux années de différence.
C’est une question très importante pour mon agglomération et pour la région Nord-Pas-de-Calais. Le projet innovant porté par Pierre Moreau au titre d’Artois Comm et de la région autour du CREPIM, laboratoire européen des matériaux concernés par la sécurité incendie, et du CRITT M2 A, l'un des tout premiers clusters conçus en France, est un centre d'essais de moteurs et d’acoustique automobile, développant ses activités sur les turbo-compresseurs et, désormais, sur un département électrique « autonomie et puissance des batteries ». Il travaille aussi avec le campus des métiers du lycée de travaux publics et l'université sur la thématique de « route intelligente ».
Le CRITT M2 A, qui a commencé ses activités en 2000 avec deux doctorants et un chef de projet, recrute en 2015 son trentième collaborateur universitaire. Cet établissement a une compétence et une renommée internationales. En témoigne la réussite de la Conférence qu'il a organisée en octobre 2014 et qui a réuni des industriels de l'automobile, du ferroviaire et de l'aéronautique du monde entier.
C'est au vu de ces compétences et de ces enjeux d'avenir que je souhaite savoir quel sort le ministre de l’industrie entend réserver à ces outils exceptionnels qui témoignent du savoir-faire de nos chercheurs et de nos industriels en Europe et dans le monde.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le député, un an et demi après leur lancement, les 34 plans de la Nouvelle France industrielle ont fait l'objet, ces derniers mois, d'une revue stratégique conduite par M. Emmanuel Macron. Ce travail a montré qu'il est pertinent de prolonger et d’amplifier cette démarche en faveur de la réindustrialisation du pays. En témoignent la mobilisation des industriels qu'elle a suscitée, avec plus de 250 entreprises impliquées, et ses premiers résultats, issus notamment des 330 projets et 3,7 milliards d’euros d'investissements déjà engagés sur les priorités identifiées.
M. Emmanuel Macron en a lancé la seconde phase le 18 mai à l'École des mines de Nantes. Autour de l'ambition centrale de l'industrie du futur, qui associe l'ensemble des filières et secteurs, elle consiste à regrouper les priorités des 34 plans en neuf solutions correspondant à neuf grands marchés d'avenir : les nouvelles ressources, la ville durable, la mobilité écologique, les transports de demain, la médecine du futur, l'économie des données, les objets intelligents, la confiance numérique et l'alimentation intelligente.
Cette nouvelle logique poursuit trois objectifs : répondre plus directement aux besoins et aux marchés en profitant des synergies entre les forces industrielles développées au sein des 34 plans, renforcer la dimension internationale de la Nouvelle France industrielle et augmenter sa visibilité pour les investisseurs, partenaires et clients internationaux, piloter plus efficacement le dispositif pour lui donner plus d'agilité et de réactivité.
Il s'agit donc bien de capitaliser sur les 34 plans initiaux. Le Gouvernement continuera d'appuyer les neuf solutions et le projet de « l'industrie du futur » sur les initiatives régionales et les pôles industriels répartis sur l'ensemble du territoire national.
En revanche, la concentration des priorités industrielles en neuf solutions n'a pas pour logique d'entraîner une concentration territoriale des pôles industriels concernés. Par exemple, le regroupement au sein de la solution « transports de demain » des thématiques ferroviaire, avec le TGV du futur, navale, avec les navires écologiques, et aéronautique, avec l’avion électrique et le dirigeable, n'a nullement la vocation de rassembler les structures de ces secteurs très distincts.
En revanche, ceux-ci pourront développer des synergies industrielles sur des secteurs communs, comme le stockage de l'énergie.
S'agissant de l'exemple que vous citez, la mise en synergie des thématiques du stockage de l'énergie, de l'électromobilité, du véhicule autonome et du véhicule « deux litres aux 100 kilomètres » au sein de la solution « mobilité écologique » représente une opportunité pour l'écosystème de recherche industrielle d'Artois Comm, qui pourra renforcer sa visibilité et développer ses compétences en cohérence avec la politique industrielle menée par le ministre.
Ces neuf solutions permettent non seulement d'implanter des productions industrielles sur tous les territoires de France, mais aussi de mutualiser la recherche et l'innovation, pour être encore plus forts à l'international.
M. le président. La parole est à M. Serge Janquin.
M. Serge Janquin. Je serai bref. Je n'ai pas pour habitude de faire semblant de comprendre ce qui n'est pas encore tout à fait clair pour moi : il faudra donc essayer d'élucider la question des financements. J'ai l'impression que nous sommes dans le cadre d'une économie circulaire où l'on déconstruit les financements des plans d'avenir conçus il y a deux ans, pour les affecter désormais – dans une démarche de reconstruction intelligente – à la loi de transition énergétique. C'est peut-être tout à fait cohérent, tout à fait légitime.
Cela dit, si j'ai bien compris la réponse donnée par Mme Delga, le ministre de l'économie reste préoccupé par l'implantation territoriale des plans industriels d'avenir. Cette implantation territoriale est déjà acquise ; elle pourrait se prolonger sous réserve de mise en cohérence. Je suis tout à fait rassuré de ce point de vue. Vous savez mieux que moi, madame la secrétaire d'État, qu'un débat important a lieu dans nos territoires : il ne faut pas laisser les savoirs et les crédits se concentrer dans la France des métropoles, au détriment d'une France périphérique qui en serait dépourvue. Si cela se produisait, il ne faudrait pas s'étonner des inégalités de traitement entre les territoires !
L'État n'a plus les moyens de corriger ces inégalités territoriales uniquement à l'aide de crédits. Mais quand il s'agit de faire de l'égalité horizontale entre les collectivités territoriales, les plus riches rechignent beaucoup à donner un peu aux plus pauvres. Si nous voulons améliorer l'égalité territoriale, c'est donc à la source qu'il nous faut agir, c'est en suscitant les intelligences et les activités sur les territoires, notamment périphériques.
Auteur : M. Serge Janquin
Type de question : Question orale
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique
Ministère répondant : Économie, industrie et numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2015