Question orale n° 1186 :
politique à l'égard des femmes

14e Législature

Question de : Mme Françoise Descamps-Crosnier
Yvelines (8e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Françoise Descamps-Crosnier attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la grande difficulté opérationnelle à traiter et résoudre, pour les acteurs publics qui y sont confrontés, la présence et le développement du phénomène prostitutionnel sur certains territoires. La ville de Magnanville, dans les Yvelines, est directement confrontée à cette situation depuis 2013. Malgré l'action déterminée et coordonnée des acteurs publics impliqués - commune, police nationale... - ainsi que des premiers résultats, la situation n'est toujours pas résolue et le phénomène perdure. Alors que les attentes de la population sont fortes, cet état de fait nourrit un sentiment d'impuissance de l'action publique préjudiciable à la crédibilité de nos institutions. Le cadre juridique actuel ne permet pas une action publique pleine et entière puisque les outils de dissuasion et de sanction restent partiels : les clients ne sont ainsi pas susceptibles de faire l'objet de sanctions pénales. Cette fragilité du cadre juridique actuel devrait être corrigée à l'occasion de la future loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Elle doit permettre de lutter efficacement contre les réseaux mafieux de proxénétisme et de traite des êtres humains, et de protéger et d'accompagner la sortie de la prostitution pour les victimes de cet esclavage moderne tout en responsabilisant le client. Il est essentiel que ce texte puisse être adopté rapidement. Aussi elle souhaite lui demander les éléments d'information à sa disposition quant au calendrier pour l'examen et l'adoption de la proposition de loi. Elle souhaite également avoir connaissance des mesures prévues pour l'accompagnement de la mise en place opérationnelle, sur le terrain, des dispositions de la future loi et des nouveaux outils qu'elle permettra de mettre en œuvre.

Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2015

MISE EN ŒUVRE DE LA PROPOSITION DE LOI RENFORÇANT LA LUTTE CONTRE LE SYSTÈME PROSTITUTIONNEL
M. le président. La parole est à Mme Françoise Descamps-Crosnier, pour exposer sa question, n°  1186, relative à la mise en œuvre de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel.

Mme Françoise Descamps-Crosnier. Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, dont j'appelle l'attention sur la grande difficulté opérationnelle qu'il y a à traiter et à résoudre, pour les acteurs publics qui y sont confrontés, la présence et le développement du phénomène prostitutionnel sur certains territoires.

La commune de Magnanville, dans les Yvelines, est directement confrontée à cette situation depuis 2013. Malgré l'action déterminée et coordonnée des acteurs publics impliqués, au premier rang desquels la commune, la direction départementale de la sécurité publique et les différents services de la police nationale, et malgré des premiers résultats, éphémères, la situation n'est toujours pas résolue et le phénomène perdure. Alors que les attentes de la population sont fortes, cet état de fait nourrit un sentiment d'impuissance de l'action publique préjudiciable à la crédibilité de nos institutions et propice à instaurer un climat délétère propre à nourrir le populisme et l'extrémisme.

Le cadre juridique ne permet pas une action publique pleine et entière puisque les outils de dissuasion et de sanction restent partiels : ainsi, les clients ne sont pas susceptibles de faire l'objet de sanctions pénales.

Cette fragilité du cadre juridique actuel devrait être corrigée à l'occasion de la future loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel ainsi qu'à accompagner les personnes prostituées. Je salue d'ailleurs l'inscription de ce texte à l'agenda de la commission spéciale avant un prochain passage en nouvelle lecture dans l'hémicycle qui n'est, lui, pas encore programmé. Ce texte doit permettre de lutter efficacement contre les réseaux mafieux de proxénétisme et de traite des êtres humains, comme de protéger et d'accompagner la sortie de la prostitution pour les victimes de cet esclavage moderne, tout en responsabilisant le client.

Il est essentiel que ce texte puisse être adopté rapidement. C’est pourquoi je souhaite vous demander, madame la secrétaire d'État, les éléments d'information dont vous disposez, s'agissant du calendrier de l'examen et de l'adoption de la proposition de loi. Je souhaite également avoir connaissance des mesures prévues pour l'accompagnement de la mise en place opérationnelle, sur le terrain, des dispositions de la future loi et des nouveaux outils qu'elle permettra de mettre en œuvre.

Je pense naturellement à la situation de la commune de Magnanville, dont les habitants sont confrontés à cette situation depuis trois ans : ils sont légitimement inquiets, compte tenu des enjeux notamment sanitaires auxquels ils sont confrontés. Aussi l'adoption de la future loi y est-elle particulièrement attendue, de même que son application rapide et déterminée.

Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, des éléments d'information que vous pourrez nous communiquer sur ce sujet.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la députée, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, qui m'a chargée de vous répondre. J'en suis très heureuse parce que je suis convaincue, comme vous, que légiférer en vue de renforcer la lutte contre le système prostitutionnel est une priorité et une urgence. Je ne suis pas la seule : cette lutte est une priorité du Gouvernement, car, comme vous l'avez souligné, le cadre juridique actuel n'est pas efficace pour faire reculer la prostitution dans notre pays. C'est la raison pour laquelle nous soutenons la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel et sommes favorables à une adoption définitive et rapide des dispositions qu'elle comporte. Les textes d'application seront publiés rapidement une fois le texte voté.

Cette proposition de loi repose sur quatre piliers : renforcer la lutte contre le proxénétisme, accompagner les personnes prostituées, sensibiliser toute la société et responsabiliser les clients achetant un service sexuel. Ce texte donnera un signal fort parce qu’il nomme les victimes et les auteurs. Il renforce les outils qui sont à la disposition des forces de police et de gendarmerie, il renforce nos moyens de lutte contre les réseaux de traite des êtres humains et il permet aux associations de terrain de mieux accompagner les personnes prostituées.

Comme vous l'avez également souligné, la responsabilisation des clients fait évidemment partie de cet arsenal, dont elle est une mesure essentielle. Son efficacité dans d'autres pays est manifeste : elle a été prouvée. Toutefois, pour faire reculer la prostitution, il est urgent que l'ensemble des dispositions de la proposition de loi puissent s'appliquer, notamment le parcours de sortie de la prostitution qui permettra, notamment, un accompagnement pour l'accès aux droits et aux soins, la mise en œuvre d'actions d'insertion sociale visant à favoriser l'autonomie des personnes dans leur vie quotidienne et l'élaboration d'un projet d'insertion professionnelle, ainsi que le versement d'une aide financière à l'insertion sociale et professionnelle.

Madame la députée, soyez certaine de la détermination du Gouvernement à agir. La preuve la plus tangible de son engagement collectif est le doublement du budget alloué à la lutte contre la traite et la prostitution dans le projet de loi de finances pour 2016, budget que j'ai eu l'occasion de vous présenter dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

M. le président. La parole est à Mme Françoise Descamps-Crosnier.

Mme Françoise Descamps-Crosnier. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de vos propos. Je sais que le Gouvernement soutient fortement la proposition de loi, y voyant une priorité et une urgence. J'ai noté en outre que les textes d'application seront pris rapidement, ce qui permettra de les rendre effectifs et opérationnels sur le terrain. J'ai également noté que le budget dévolu à cette question a été fortement augmenté, en vue d'accompagner les mesures prévues dans cette proposition de loi.

Données clés

Auteur : Mme Françoise Descamps-Crosnier

Type de question : Question orale

Rubrique : Femmes

Ministère interrogé : Affaires sociales, santé et droits des femmes

Ministère répondant : Affaires sociales, santé et droits des femmes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2015

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