Question orale n° 1450 :
aides de l'État

14e Législature

Question de : M. Patrick Vignal
Hérault (9e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Patrick Vignal interroge Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire sur la crise que traversent actuellement les centres de villes moyennes, et sur ses conséquences pour les acteurs professionnels implantés dans ces centres-villes. C'est un constat qui peut être fait par tous, dans chaque circonscription : les cœurs de villes sont entrés en crise. Une crise sociale, qui se traduit par un exode massif des classes moyennes en périphérie et par une paupérisation des centres-villes. D'après une enquête INSEE de juin 2015, le taux de pauvreté dans les centres-villes atteint plus de quatre fois celui des couronnes périurbaines. Une crise qui est également d'ordre économique, et qui se traduit concrètement par une hausse exponentielle de la vacance commerciale. En 2001, plus de 80 villes moyennes avaient un taux de vacance commerciale en centre-ville inférieur à 5 %. En 2012, seules 35 étaient encore sous la barre des 5 %. Nous ne connaissons pas encore les chiffres pour 2016, mais ils sont vraisemblablement pires. Ces chiffres ne sont malheureusement que la partie visible d'une crise qui touche le dynamisme économique de nos territoires. Il n'y a pas que les commerçants qui sont concernés. Tous les secteurs professionnels implantés en centre-ville, qu'il s'agisse des professions libérales, des professionnels de santé ou encore des artisans, sont touchés. Baisse de la fréquentation, difficulté d'accessibilité, augmentation des contraintes liées à la mise aux normes des bâtiments, concurrence déloyale des activités implantées en périphérie... Tous les professionnels voient leurs chiffres d'affaires diminuer. Tous songent à s'implanter en périphérie, où les contraintes sont moindres, où le foncier est moins cher, où les conditions d'exercice sont meilleures. Si la tendance continue, les centres-villes deviendront d'ici quelques années de véritables villes fantômes, sinon des ghettos. Il est temps de réagir. Les centres-villes luttent pour demeurer attractifs, mais ils n'y arriveront pas seuls. C'est pourquoi, à l'échelle de sa circonscription, il a décidé de lancer un laboratoire associant ces acteurs professionnels, afin d'identifier des initiatives locales susceptibles de redynamiser les centres-villes. Au niveau national, le Gouvernement a apporté des réponses à cette crise, notamment à travers les lois ACTPE et ALUR, ainsi que par le biais du programme ANRU. Mais jusqu'à présent, ces réponses se sont concentrées en direction des commerçants, et peu en direction des autres secteurs professionnels : médecins, plombiers, notaires ... qui sont pourtant des maillons essentiels du dynamisme économique de nos centres-villes. Aussi, il aimerait savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement souhaite prendre afin de soutenir le dynamisme économique des cœurs de ville.

Réponse en séance, et publiée le 4 mai 2016

SITUATION ÉCONOMIQUE DES CENTRES DE VILLES MOYENNES
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Vignal, pour exposer sa question, n°  1450, relative à la situation économique des centres de villes moyennes.

M. Patrick Vignal. Ma question porte sur la crise que traversent actuellement les centres de villes moyennes et sur ses conséquences pour les acteurs professionnels implantés dans ces centres-villes.

C'est un constat que nous pouvons tous faire : dans chacune de nos circonscriptions, nos cœurs de villes sont entrés en crise. Une crise sociale, qui se traduit d'abord par un exode massif des classes moyennes en périphérie et par une paupérisation des centres-villes : d'après une étude de l'INSEE de juin 2015, le taux de pauvreté dans les centres-villes atteint plus de quatre fois celui des couronnes périurbaines.

Cette crise est également d'ordre économique et se traduit concrètement par une hausse de la vacance commerciale en centre-ville.

En 2001, plus de 80 villes moyennes avaient un taux de vacance commerciale inférieur à 5 %. En 2012, seules 35 villes se situaient encore sous ce seuil.

Ces chiffres ne sont malheureusement que la partie visible d'une crise qui touche le dynamisme économique de nos territoires. Les commerçants ne sont d'ailleurs pas les seuls concernés. En effet, tous les secteurs professionnels implantés en centre-ville, qu'il s'agisse des professions libérales, des professionnels de santé ou, encore, des artisans sont aujourd'hui touchés : baisse de la fréquentation, difficulté d'accessibilité, augmentation des contraintes liées à la mise aux normes des bâtiments ou, encore, concurrence déloyale des activités implantées en périphérie. Le chiffre d'affaires de tous les professionnels diminue et tous songent à s'implanter en périphérie.

Madame la secrétaire d'État, si la tendance continue, nos centres-villes vont devenir de véritables villes fantômes. Il est temps de réagir. Les centres-villes luttent pour demeurer attractifs mais ils ne peuvent y arriver seuls.

C'est pourquoi, à l'échelle de ma circonscription, de Montpellier jusqu'à Lunel – ville qui a été récemment touchée par ce phénomène – j'ai décidé de lancer un laboratoire associant à la fois les acteurs professionnels, les commerçants et les responsables de l'emploi public afin d'identifier des initiatives locales susceptibles de redynamiser ces bassins de vie.

Je dois d'ailleurs souligner que le Gouvernement a déjà apporté des réponses à cette crise, notamment avec la loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises – ACTPE –, la loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové – ALUR – ainsi que par le biais du programme de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine – ANRU.

Néanmoins, ces réponses sont concentrées en direction des commerçants et peu en direction des autres secteurs professionnels qui sont pourtant des maillons essentiels du dynamisme économique de nos centres-villes tels que l'internet, l'e-économie et le numérique, lequel s'apprête à révolutionner le commerce.

Aussi, madame la secrétaire d'État, j'aimerais savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement souhaite prendre afin de soutenir le dynamisme économique de nos centres-villes. Quand seront-ils une véritable cause nationale ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du numérique.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État chargée du numérique. Mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Patrick Vignal, Martine Pinville ne peut être présente ce matin mais elle m'a chargée de vous répondre et de vous féliciter pour l'initiative que vous avez prise face à la situation bien réelle de dévitalisation des centres-villes, celle-là même que vous avez parfaitement décrite.

Le Gouvernement a fait du maintien du commerce de proximité dans les centres-villes une priorité de ce quinquennat. La loi ACTPE, promulguée le 18 juin 2014, a introduit des mesures importantes à cet effet. Certaines ont un caractère un peu technique mais je souhaite les exposer car c'est avec l'ensemble de ces outils que nous parviendrons à revitaliser les centres-villes.

Il s'agit d'abord de la rénovation du régime des baux commerciaux, avec la limitation de la hausse des loyers commerciaux à 10 % en cas de déplafonnement et la reconnaissance de l'indice des loyers commerciaux et de l'indice des loyers des activités tertiaires comme seules références – et non l'indice du coût de la construction – pour le calcul de l'évolution des loyers commerciaux.

Cela s'accompagne d'un rééquilibrage des relations entre bailleurs et locataires, qui est assuré par l'obligation d'un état des lieux lors de la prise d'un local et d'un inventaire précis des catégories de charges locatives.

D'autres outils ont été mis à la disposition des élus pour dynamiser le commerce de proximité en ouvrant la possibilité de déléguer le droit de préemption des communes à des opérateurs mieux outillés – par exemple, des sociétés d'économie mixte – ou à des intercommunalités qui peuvent mutualiser les ressources et en allongeant le délai pour retrouver un repreneur de fonds de commerce.

Une expérimentation des contrats de revitalisation artisanale et commerciale, dont les modalités d'attribution ont été précisées par un décret du 3 juillet 2015, a également été lancée.

Ces contrats permettent aux élus locaux, via un mécanisme de préemption rénové, de choisir après un appel d'offres un opérateur qui sera chargé de racheter les fonds de commerce, de les rénover et de les louer dans des périmètres marqués par une disparition progressive des activités commerciales et artisanales.

Ces mesures viennent compléter le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce – le FISAC –, que vous connaissez. Toute une gamme d'outils existe donc, dont l'utilisation dépend beaucoup de la mobilisation des partenaires locaux.

Par ailleurs, la secrétaire d'État en charge du commerce a souhaité apporter une réponse ciblée au phénomène de dévitalisation d'un certain nombre de centres-villes. Conjointement avec la ministre chargée de l'égalité des territoires, elle a ainsi confié récemment – il y a deux mois – une mission à ce propos à l'Inspection générale des finances et au Conseil général de l'environnement et du développement durable.

Il s'agit d'étudier les difficultés rencontrées par les centres-villes, en particulier ceux des villes de moins de 100 000 habitants, de faire le bilan de l'efficacité des outils existants et de formuler de nouvelles propositions, notamment à partir des bonnes pratiques développées sur le territoire national, et en regardant ce qui se passe dans des pays voisins, ce phénomène n'étant pas exclusivement franco-français et concernant tous les pays européens.

Les conclusions tirées de cette mission, attendues pour le mois de juin 2016, devraient permettre d'identifier les moyens les plus adaptés dans une logique de stimulation de l'activité économique locale, ce qui est absolument essentiel pour le dynamisme des villes – répartition de la présence commerciale et des professions libérales.

Avec des villes aussi belles que la vôtre, monsieur le député, on ne peut que vouloir se mobiliser pleinement !

Données clés

Auteur : M. Patrick Vignal

Type de question : Question orale

Rubrique : Aménagement du territoire

Ministère interrogé : Commerce, artisanat, consommation et économie sociale et solidaire

Ministère répondant : Commerce, artisanat, consommation et économie sociale et solidaire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 avril 2016

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