hygiène et sécurité
Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et lui propose la mise en place d'une expérimentation dans dix établissements de santé pour trois ans dans le but de favoriser l'utilisation du cuivre antibactérien en milieu hospitalier dans la lutte contre les infections nosocomiales. Les principaux éléments, qui motivent sa proposition d'expérimentation raisonnée à l'échelle nationale, peuvent être retrouvés dans la question écrite n° 9537 . Il s'appuie sur les estimations financières du rapport du sénateur M. Vasselle, sur les nombreux résultats positifs, éloquents, des tests en laboratoires et des expérimentations in situ conduites dans plusieurs pays dont la France, montrant le bénéfice du cuivre dans la lutte contre les maladies nosocomiales. Le sénateur Vasselle estime que le surcoût total généré par les maladies nosocomiales est de l'ordre de 2,4 milliards à 6 milliards d'euros chaque année. En France, un patient sur vingt est touché par des maladies nosocomiales, plus de 4 000 en meurent tous les ans. En se basant sur les coûts des investissements observés, sur les taux d'éradication des bactéries par le cuivre, et sur le rapport Vasselle, on peut estimer que l'équipement des hôpitaux français en cuivre permettrait à l'assurance maladie de réaliser une économie allant de 960 millions à 2,4 milliards d'euros par an. À cet aspect purement financier s'ajouteraient les nombreuses vies qui pourraient être sauvées. C'est un impératif de santé publique dont le coût d'investissement annuel serait inférieur dès la première année aux économies générées. Face à ces résultats, on constate malheureusement une frilosité des directions d'hôpitaux (notamment les centres hospitaliers universitaires), et ce malgré le bénéfice évident pour les patients. Puisque les directions ne se saisissent pas de cette potentialité, il semble que les instances à compétences techniques, comme le HCSP (Haut conseil de la santé publique), la HAS (Haute autorité de santé), l'ANSM (l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) ont leur rôle à jouer pour mobiliser la communauté médicale, dans le but de programmer des travaux susceptibles d'avoir un impact sur la qualité et la sécurité des soins des établissements de santé. Il ne faut pas s'y tromper : le pouvoir politique a une haute responsabilité, pour ne pas entretenir les résistances, voire les réponses systématiques et stéréotypées. Ainsi, il lui demande sa position sur l'opportunité que représenterait la mise en place d'une expérimentation, pendant trois ans, sur dix sites français, avec une évaluation sur les résultats en termes d'effet sur la santé publique mais également sur l'économie de la santé. Proposer une telle expérimentation, raisonnée, circonscrite, c'est faire preuve de responsabilité et d'ambition. Un tel plan d'action pourrait d'ailleurs s'intégrer dans le volet « prévention des infections nosocomiales » du « plan stratégique national de prévention des infections liées aux soins » qui sera vraisemblablement renégocié à la fin de cette année. Cela serait empreint d'un grand sens politique, et témoignerait d'une conscience aiguë des enjeux sanitaires de notre pays et des réponses pérennes et responsables que l'on peut y apporter. Le cuivre doit devenir un produit ou un service de santé répertorié dans nos nomenclatures. Les directions d'hôpitaux, les institutions aux compétences techniques et les responsables politiques ont pour cela une grande responsabilité. Il demande quelles sont les intentions du Gouvernement dans ce domaine.
Réponse en séance, et publiée le 1er mars 2013
UTILISATION DU CUIVRE EN MILIEU HOSPITALIER
M. le président. La parole est à M. Hervé Féron, pour exposer sa question, n° 169, relative à l'utilisation du cuivre en milieu hospitalier.M. Hervé Féron. Je m'associe aux fortes inquiétudes de Michel Lefait sur l'avenir du régime minier, ayant dans ma circonscription de Meurthe-et-Moselle, à Varangeville, la dernière mine de sel en activité de France. Plus de 1 100 ayants droit et 200 mineurs de fond, les derniers en activité en France, en dépendent.
J'en viens, madame la ministre, à ma question. Elle s'appuie sur de nombreuses données scientifiques et sur les résultats positifs d'expérimentations in situ menées dans le monde. Je propose aujourd'hui l'expérimentation raisonnée à l'échelle nationale de l'usage du cuivre antibactérien dans la lutte contre les maladies nosocomiales. Elle pourrait d'ailleurs s'inscrire dans le plan stratégique national de prévention des infections liées aux soins qui sera vraisemblablement renégocié à la fin de l'année. Je propose d'équiper d'éléments en cuivre - mains courantes, poignées de porte, armatures de lit et brancards, embouts de stéthoscopes, plaques de propreté - les services de pédiatrie et de soins intensifs de dix hôpitaux français particulièrement touchés par les infections nosocomiales. Je propose de mener une expérimentation sur trois ans incluant une évaluation des résultats obtenus en termes d'effet sur la santé publique et sur l'économie de la santé. Je tiens à votre disposition, madame la ministre, un dossier complet démontrant que l'équipement des hôpitaux français en cuivre permettrait à l'assurance maladie d'économiser de 960 millions à 2,4 milliards d'euros par an.
À cet aspect purement financier s'ajoute la perspective de sauver de nombreuses vies. Chaque année, 4 000 personnes meurent de maladie nosocomiale, soit autant que par accident de la route. Or 99 % des bactéries responsables des infections nosocomiales, même très résistantes aux antibiotiques, meurent en moins de deux heures sur une surface cuivrée. Le professeur Michael Schmidt, de l'université de Caroline du Sud, a démontré que l'usage du cuivre permet de réduire de 40,4 % l'incidence des infections nosocomiales. C'est un impératif de santé publique dont le coût d'investissement annuel serait inférieur aux économies générées dès la première année.
Il est temps, madame la ministre, d'être volontariste en dépassant les résistances des directions d'hôpitaux et en montrant que le cuivre est un produit et un service de santé qui a vocation à apparaître dans les nomenclatures. Les directions d'hôpitaux, les institutions aux compétences techniques et les responsables politiques ont une importante responsabilité dans cette conquête sanitaire. Je vous demande donc, madame la ministre, votre appréciation sur cette proposition volontariste, responsable et scientifiquement fondée.
M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député Hervé Féron, vous m'interrogez sur les moyens de favoriser l'utilisation de cuivre antibactérien en milieu hospitalier dans le but de lutter contre les maladies nosocomiales. Comme vous le savez, la qualité des soins et la sécurité des patients constituent pour moi une priorité de santé publique dont j'ai fait part lors du lancement du programme national pour la sécurité des patients dans le cadre des journées qui les ont rassemblés il y a quelques semaines. Je considère en effet que la lutte contre les infections associées aux soins est essentielle si nous voulons promouvoir la qualité des soins et la sécurité des patients.
Dans le cadre de la lutte contre les infections nosocomiales, la France s'est dotée en 2001 d'un dispositif performant visant à améliorer les pratiques des professionnels grâce à l'articulation des systèmes d'alerte, d'expertise et de soutien aux établissements de santé. À plusieurs reprises, ce dispositif a montré sa capacité à identifier des phénomènes émergents et à les combattre. Cependant, 7 % des hospitalisations se compliquent d'une infection nosocomiale, soit environ 750 000 cas sur les quinze millions d'hospitalisations annuelles et on estime à 4 000 le nombre de décès qui pourraient en résulter. Les infections nosocomiales généreraient par ailleurs un surcoût annuel estimé, pour autant qu'on le puisse, entre 2,4 et 6 milliards d'euros. C'est pourquoi nous devons être particulièrement attentifs à toutes les innovations.
Vous faites état d'expérimentations récentes, conduites dans plusieurs pays et aux résultats prometteurs, de l'utilisation en milieu hospitalier d'équipements en cuivre pour la maîtrise des infections nosocomiales. En France, deux établissements ont fait en 2011 le choix du cuivre : le centre intergénérationnel multi-accueil de Laval en Mayenne et le centre hospitalier de Rambouillet dans les Yvelines. Ces établissements ont mené leur réflexion à partir du double constat que plus du tiers des infections hospitalières sont contractées par contact avec des objets et surfaces contaminés et que le cuivre a des vertus antimicrobiennes et biocides.
J'ai donc demandé à l'agence nationale du médicament et des produits de santé et au haut conseil de la santé publique de conduire cette année une expertise sur les expériences menées dans ces établissements et de rendre un avis sur le coût et l'efficacité de tels équipements. Les résultats de cette saisine et les données à venir de l'enquête nationale de prévalence des infections nosocomiales permettront de mieux évaluer le plan stratégique national de prévention des infections associées aux soins. Comme vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement a pris le problème à bras-le-corps. Nous verrons au terme de cette évaluation si nous pouvons généraliser la démarche que vous évoquez.
M. Gérard Bapt. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Hervé Féron.
M. Hervé Féron. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je suis ce dossier, qui m'intéresse sans que j'en sois spécialiste, depuis quatre ans. J'ai posé la question à de nombreuses reprises sous des formes variées et constate que ce gouvernement y accorde une plus grande attention que celle que lui accordait le précédent. Je me félicite que vous ayez engagé cette étude.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question orale
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales et santé
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 19 février 2013