perspectives
Question de :
M. Bertrand Pancher
Meuse (1re circonscription) - Union des démocrates et indépendants
M. Bertrand Pancher appelle l'attention de M. le ministre de la défense, sur la fermeture anticipée pour le 1er juillet 2013 du 8e régiment d'artillerie de Commercy (Meuse). Celle-ci a d'ailleurs été annoncée sans que les élus locaux et les parlementaires du département n'en soient avertis. En 2008, la situation particulière du bassin de Commercy avait été reconnue par le précédent Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui avait décidé de surseoir à la décision de fermeture tant qu'il n'y aurait pas d'équivalent en termes d'emplois. Cela s'était matérialisé par la signature d'un contrat de développement économique afin de compenser la perte des emplois du régiment. Devant l'improbabilité d'installer des grandes administrations d'État, la nécessité de pérenniser la présence militaire de Commercy s'imposait à tous. Le bassin de Commercy a déjà perdu 1 000 emplois en dix ans, le taux de chômage dépasse les 12 %, la zone est classée en zone de revitalisation rurale. Par ailleurs, l'armée est un secteur essentiel de la vie locale puisque les 950 militaires représentent à eux seuls 10 % de la population du pays de Commercy. L'ensemble de ces arguments ont déjà été évoqués dans des courriers au ministre de la défense et au Président de la République, courriers cosignés par les parlementaires meusiens et élus locaux. Commerçants, artisans, chefs d'entreprises ont investi dans l'espoir de redynamiser le territoire en attendant l'arrivée de l'avionneur Safran. Avec cette décision d'annonce de fermeture, les pertes générées seront dramatiques : - 10 % de chiffre d'affaires attendu chez les commerçants, - 20 % à - 25 % constaté déjà dans l'immobilier, des projets de constructions d'école vont être stoppés, des pertes de postes d'enseignants seront peut-être à prévoir. Aussi, il lui demande si des mesures compensatoires seront trouvées mais surtout si l'État respectera sa parole.
Réponse en séance, et publiée le 28 novembre 2012
FERMETURE DU 8E RÉGIMENT D'ARTILLERIE À COMMERCY
M. le président. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour exposer sa question, n° 17, relative à la fermeture du 8e régiment d'artillerie à Commercy.M. Bertrand Pancher. Madame la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, j'espère avoir autant de chance que Mme Andrieux en revenant dans ma circonscription, mais j'en doute. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
En pleine torpeur estivale, vous avez envoyé le major général de l'armée annoncer en catimini la fermeture anticipée, pour le 1er juillet 2013, du 8e régiment d'artillerie de Commercy, sans même prendre la peine d'en avertir les élus locaux ni les parlementaires du département. En 2008, la situation particulière de ce bassin avait été prise en compte par le précédent Président de la République, chef des armées, Nicolas Sarkozy. Il avait décidé de surseoir, par écrit, à la décision de fermeture tant qu'il n'y aurait pas de contrepartie équivalente en termes d'emplois. Cela s'était matérialisé par la signature d'un contrat de développement économique afin de compenser la perte des emplois déjà intervenue. C'était un acte très courageux en matière d'aménagement du territoire.
Le bassin de Commercy a perdu mille emplois en dix ans et le taux de chômage y dépasse les 12 %. L'armée est un acteur essentiel de la vie locale : 950 militaires représentent 10 % de la population du pays de Commercy. L'ensemble de ces arguments, évoqués dans un courrier au Président de la République, n'a pour l'instant pas reçu de réponse par courrier. Les commerçants, les artisans et les chefs d'entreprise ont cru en la parole de l'État et ont investi pour redynamiser le territoire. Votre décision couperet induit des pertes généralisées et dramatiques : une baisse de 10 % du chiffre d'affaires est attendue pour les commerçants et une baisse comprise entre 20 % et 25 % a été constatée dans l'immobilier. Des postes d'enseignants sont perdus, des investissements dans les établissements scolaires sont annulés.
Aujourd'hui, nous constatons un décalage entre la date prévue pour le départ du dernier militaire et l'arrivée effective de nouveaux emplois sur le territoire.
Ma question est simple. Quelles mesures compensatoires seront trouvées pour que l'État respecte sa parole ? Allez-vous revenir partiellement ou en totalité sur la décision de dissoudre ce régiment ? Comment allez-vous répondre au cri des populations du sud meusien abasourdies par la violence de votre décision et au silence des familles de militaires, furieuses, et qui, elles, ne peuvent pas s'exprimer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le député, la dissolution du 8e régiment d'artillerie qui interviendra effectivement à l'été 2013 a été décidée dès 2008 par le précédent gouvernement. Elle s'inscrit dans la logique de rationalisation de l'artillerie qui a prévalu lors des travaux du précédent Livre blanc. La décision entérinant la dissolution de ce régiment à l'été 2013 n'a toutefois été prise qu'après un examen très attentif du dossier, réalisé sur instruction du ministre de la défense, et à l'issue de l'entretien accordé le 2 juillet 2012 à M. Muller, maire de Commercy, accompagné de M. Masseret, président de la région Lorraine.
Aucun élément objectif n'est apparu susceptible de remettre en cause une mesure certes lourde de conséquences pour la commune mais qui, malheureusement, conditionne aussi la capacité de la défense, et plus particulièrement celle de l'armée de terre, à atteindre les objectifs de déflation des effectifs et de diminution de la masse salariale fixés par la loi de programmation militaire 2009-2013. Le maire de Commercy a bien évidemment été personnellement informé, le 31 juillet 2012, par le ministre de la défense lui-même, qui lui a fait savoir sa décision.
En matière de mesures de compensation, Commercy, éligible au dispositif des cessions à l'euro symbolique, bénéficie depuis le 18 juillet 2011 d'un contrat de développement économique. C'est le seul contrat de ce type signé dans le cadre du plan de restructuration des armées. Il a la particularité de permettre d'engager des actions de redynamisation économique du territoire en amont de la dissolution effective de la formation.
L'effort budgétaire ainsi consenti par l'État est exceptionnel. Il s'élève à 14,5 millions d'euros sur un total de 25 millions d'euros de financement prévus par le CDE. En un an, plus de 1 million d'euros de subventions a été accordé à 27 entreprises du bassin de Commercy, contre l'engagement de création de plus de 130 emplois.
L'entreprise Société bois massif a déjà transféré son siège social et une partie de sa production de la région parisienne à Commercy. Ce transfert, subventionné par les crédits du FRED, devrait permettre de créer soixante emplois en trois ans. Le groupe aéronautique Safran va également s'implanter à Commercy. Cette unité de production, qui représentera un investissement d'environ 60 millions d'euros, créera dans un premier temps 180 emplois. À terme, l'effectif pourrait atteindre 400 salariés. Le site français devrait produire 50 % des aubes et carters nécessaires à la nouvelle génération de moteurs LEAP, plus économes en carburant, dont 3 500 exemplaires sont déjà commandés pour l'équipement des futures flottes d'avions court et moyen courriers d'Airbus comme de Boeing. Le groupe belge Cockerill maintenance et ingénierie projette de créer à Commercy un centre de formation de tireurs canons et de mécaniciens de tourelles. Ce projet, qui a déjà reçu l'accord de principe du ministre de la défense, permettrait la création d'une cinquantaine d'emplois directs et la présence sur le site, pour des formations de longue durée, de nombreux stagiaires étrangers à pouvoir d'achat élevé. Au total, ce sont donc 600 emplois directs qui sont d'ores et déjà attendus sur le territoire.
Par ailleurs, il apparaît aujourd'hui nécessaire de rappeler que la décision prise par le précédent Président de la République de surseoir à la fermeture de ce régiment précisait bien que ce moratoire avait pour objectif de permettre de trouver une solution compensatoire en termes d'emplois. Elle n'imposait nullement de prolonger ce moratoire jusqu'à la reconstitution effective de ces emplois. Certes, on ne peut nier le décalage entre le calendrier du départ du dernier militaire et l'arrivée effective de ces nouveaux emplois sur la zone. Mais on retrouve la même situation dans tous les contrats de site. En outre, le niveau des futurs emplois ainsi que leur pérennité au vu des projections de commande de Safran constitueront un avantage réel par rapport au passé.
En effet, a contrario du 8e RA, autonome pour son gardiennage, sa restauration et ses transports, les entreprises qui s'installent seront créatrices d'un nombre important d'emplois indirects dans ces domaines de soutien. Quant aux emplois induits, il importe de rappeler que les effectifs du 8e RA sont très largement composés de personnels célibataires logés au quartier. Il est trop tôt pour évaluer l'impact économique, sur le bassin de Commercy, des familles qui s'installeront progressivement, mais il n'est pas exclu que le bilan soit positif sur ce plan-là également.
En conclusion et conformément aux engagements pris auprès des élus, aucun contrat ne fait l'objet de plus d'attention, d'investissement humain et de financement que celui de Commercy. Une réunion pilotée par le préfet et organisée à la demande expresse du ministre de la défense devrait très prochainement réunir, autour de la table, l'ensemble des élus et des autres parties prenantes afin de faire un point précis du degré d'avancement des mesures d'accompagnement de cette restructuration.
M. Bertrand Pancher. Pourrais-je répondre, monsieur le président.
M. le président. Le temps qui était imparti à cette question a été largement dépassé, mon cher collègue, j'en suis désolé.
Auteur : M. Bertrand Pancher
Type de question : Question orale
Rubrique : Aménagement du territoire
Ministère interrogé : Défense
Ministère répondant : Défense
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 novembre 2012