Question orale n° 186 :
lignes à haute tension

14e Législature

Question de : Mme Isabelle Le Callennec
Ille-et-Vilaine (5e circonscription) - Les Républicains

Mme Isabelle Le Callennec attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conséquences du chantier de la ligne THT Cotentin-Maine. La ligne THT Cotentin-Maine partant de Flamanville traverse cinq communes du département d'Ille-et-Vilaine. Malgré les recours déposés par les collectivités locales et les associations (contre la DUP, contre le permis de construire...), la construction de la ligne se poursuit. Compte tenu d'études visant à démontrer que la présence de champs électromagnétiques des lieux d'habitation n'est pas sans impact sur la santé humaine, des associations souhaitent réaliser une enquête sanitaire approfondie des conséquences sur la population concernée et ce sur plusieurs années. Cela nécessite l'élaboration d'un protocole de mesures pertinentes partagées par les différentes partenaires de cette enquête. Cela nécessite des moyens financiers. Les associations sont à la recherche de partenariats. Elle lui demande de bien vouloir répondre aux inquiétudes des associations et plus largement de la population concernée.

Réponse en séance, et publiée le 1er mars 2013

CONSÉQUENCES DE L'INSTALLATION DE LA LIGNE À TRÈS HAUTE TENSION COTENTIN-MAINE

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour exposer sa question, n° 186, relative aux conséquences de l'installation de la ligne à très haute tension Cotentin-Maine.
Mme Isabelle Le Callennec. Ma question s'adresse à vous, madame la ministre de l'écologie, mais aussi à votre collègue en charge de la santé. Elle porte sur la construction de la ligne à très haute tension Cotentin-Maine qui, comme vous le savez, fait l'objet de recours : recours, au nom du principe de précaution, contre la déclaration d'utilité publique, actuellement en cours d'instruction au Conseil d'État ; recours des communes de Vitré et de Bréal-sous-Vitré ainsi que d'associations de défense des riverains contre la délivrance du permis de construire la ligne.
Plusieurs pylônes sont en effet situés en zone de captage d'eau. L'un d'eux, le fameux pylône 547, est censé être positionné de part et d'autre d'un drain qui alimente la région de Vitré en eau potable ; environ 30 000 habitants sont concernés. Cela suscite des inquiétudes, y compris de la part d'hydrogéologues. Une étude d'expertise est en cours, dont les conclusions sont imminentes, et les travaux sont donc interrompus.
Madame la ministre, vous avez été interrogée à plusieurs reprises par des collègues députés du groupe écologiste sur la construction de cette ligne THT et l'EPR de Flamanville. Je vous ai moi-même écrit au début du mois d'août et n'ai reçu aucune réponse à ce jour. Je vous remercie donc d'être présente ce matin dans l'hémicycle.
Parce que les conséquences sur la santé humaine des champs électromagnétiques posent question, j'ai demandé à la ministre de la santé si son ministère comptait se saisir du sujet. Localement, toutes sensibilités politiques confondues, nous estimons que la mise en service de la ligne devrait être l'occasion de réaliser, grandeur nature, une étude d'évaluation des risques sanitaires, avec un point zéro, avant la mise en service, et une mesure constante après.
À ce jour, seul un suivi sanitaire pour les personnes volontaires a été acté. Un protocole a été établi par l'ARS de Basse-Normandie et le bilan annuel est censé être étudié par une commission composée d'experts médicaux, de représentants de l'État, d'élus et d'associations. Nous continuons à soutenir que ce n'est pas suffisant et nous proposons d'aller plus loin.
Un organisme indépendant a déjà travaillé sur ces questions : je pense au CRIIREM, le Centre de recherche et d'information indépendantes sur les rayonnements électromagnétiques, et à son étude " Vivre avec une ligne THT ". Mais il y a aussi l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, qui évalue les impacts de l'environnement sur la santé humaine et travaille sur la thématique " cancer et environnement ", ou encore l'Institut de veille sanitaire, qui s'intéresse à la surveillance des risques sanitaires associés à l'eau destinée à la consommation humaine. Peut-on à tout le moins leur confier une étude spécifique ? Vous ferez-vous notre avocate auprès de votre collègue la ministre de la santé ?
Le 7 septembre dernier, votre directeur de cabinet a reçu les représentants des associations, qui, depuis lors, attendent un signe de votre part. Ils ont clairement posé la question du principe de précaution, celle des exigences en matière de gestion des risques, celle, enfin, du suivi sanitaire des personnes qui vivront à proximité de cette ligne de 400 000 volts. Disposez-vous d'éléments de nature à répondre à leurs inquiétudes, et comment accueillez-vous nos propositions ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Madame la députée, la très importante question que vous posez concerne l'ensemble des lignes à haute tension et pas seulement la ligne Cotentin-Maine, même si vous avez rappelé les contentieux en cours au sujet de cette dernière, contentieux sur lesquels je ne m'exprimerai pas en raison de la séparation des pouvoirs. Cette ligne à haute tension est nécessaire pour l'EPR, mais aussi pour les projets d'hydroliennes, ce qui a été l'occasion de ma venue dans la Manche lundi dernier.
Les inquiétudes des riverains sur l'impact environnemental et sanitaire des lignes à haute tension ne doivent pas être sous-estimées, et le sujet mérite la plus grande transparence. Lors de la Conférence environnementale de septembre 2012, il a été décidé d'actualiser l'ensemble de l'expertise scientifique et sanitaire sur les champs d'extrêmement basse fréquence créés par les lignes à haute tension, en vue de poser de nouvelles règles ainsi que d'améliorer l'information et la concertation. Je suis navrée que votre courrier n'ait pas obtenu de réponse ; j'ai eu l'occasion de m'exprimer ici même, lors d'une séance de questions au Gouvernement, sur le sujet.
Comme vous le savez certainement, trois rapports scientifiques ont été établis en 2010, le premier par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, le deuxième par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, le troisième par le Conseil général de l'environnement et du développement durable. Le précédent gouvernement n'avait tiré aucune conclusion de ces rapports.
Le travail de l'ANSES a permis de confirmer les effets à court terme des champs d'extrêmement basse fréquence, qui sont connus et bien documentés, et qui déterminent les valeurs limites d'exposition. Cette analyse soulevait toutefois des interrogations concernant les effets sur la santé humaine à long terme. Il existe en particulier des corrélations avec les leucémies infantiles ; même si les scientifiques affirment que la causalité n'est pas précisée, la corrélation est indéniable.
J'ai demandé que l'ANSES procède d'ici à la fin de l'année à l'expertise des travaux scientifiques récents sur les effets des champs d'extrêmement basse fréquence sur la santé humaine mais aussi sur la santé animale. Je travaille avec Stéphane Le Foll, concernant ce dernier problème, à la relance du groupe sur la sécurité électrique pour les élevages. Des études sont également en cours sur la santé des enfants, avec plusieurs cohortes de recherche, pilotées par le ministère de la santé. Le Gouvernement tirera comme il se doit les conséquences de ces études.
Soyez assurée que l'amélioration de l'information du public concernant les connaissances scientifiques sur l'exposition aux effets de ces lignes à haute tension et les conséquences qu'il faudra en tirer font partie des préoccupations du Gouvernement. Vous connaissez la nécessité du développement des lignes à haute tension : il est question, dans les prochaines années, pour la sécurité de l'approvisionnement et du réseau électrique français, de construire de 2 000 à 3 000 kilomètres de lignes supplémentaires. Les conditions dans lesquelles cela pourra se faire, la planification territoriale de ces constructions, devront bien sûr intégrer ces problématiques.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.
Mme Isabelle Le Callennec. Merci, madame la ministre, pour cette réponse consistante. J'insiste sur la problématique des zones de captage d'eau, qui me paraît très importante. Merci d'avoir souligné que les inquiétudes ne doivent pas être sous-estimées et d'avoir rappelé les études réalisées. Je vous demande la plus grande transparence et la plus grande information des associations et des élus locaux.

Données clés

Auteur : Mme Isabelle Le Callennec

Type de question : Question orale

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie

Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 février 2013

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