organisation
Question de :
M. Joël Giraud
Hautes-Alpes (2e circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste
M. Joël Giraud interroge M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur le désenclavement ferroviaire du département des Hautes-Alpes. Le département des Hautes-Alpes est une des principales destinations touristiques françaises et européennes mais il souffre d'un enclavement ferroviaire qui s'aggrave chaque année. Le raccordement au réseau TGV devient très aléatoire et ne permet pas d'acheminer des capacités importantes, d'autant que la ligne ferroviaire Valence-Veynes fait l'objet de nombreux désordres et n'a toujours pas bénéficié des efforts d'un contrat de plan ; le réseau des trains de nuit est désormais réduit à sa plus simple expression avec un TET Paris-Briançon dont la mise en réservation tardive ne permet pas son utilisation à des fins touristiques, enfin le TGV le plus proche de la zone de chalandise principale (Briançon) se situe à Oulx (ligne Paris-Milan) et souffre d'une absence de raccordement ferroviaire. La question porte donc sur trois sujets : une réunion rapide sous la houlette de l'État relative au désenclavement doit réunir SNCF, TGV Europe, RFF, régions PACA et Rhône-Alpes ; la convention TET pour le train de nuit Paris-Briançon doit être maintenue ; l'État doit s'engager à lancer le débat public à l'issue de l'étude (CPER État-PACA) pour la création d'une jonction ferroviaire entre Briançon et Oulx.
Réponse en séance, et publiée le 22 mars 2013
DESSERTE FERROVIAIRE DES HAUTES-ALPES
M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour exposer sa question, n° 224, relative à la desserte ferroviaire des Hautes-Alpes.M. Joël Giraud. Monsieur le ministre chargé des transports, l'accès aux Alpes du sud par le train subit depuis plusieurs années une dégradation constante. Devant la difficulté d'accès aux points de correspondance TGV, le trafic s'effectuait entre Paris et Briançon, jusqu'à il y a dix ans, par des trains de nuit - jusqu'à vingt circulations certains samedis d'hiver -, mais aussi depuis Bruxelles, Metz, Quimper, Rennes, et ce tous les week-ends. L'arrivée du TGV à Valence a paradoxalement isolé encore plus cette région car ne peuvent assurer les correspondances à la gare de Valence-TGV que des TER de très faible capacité. L'essentiel des correspondances est donc assuré à la gare de Valence-Ville, ce qui limite le nombre de trains et ne permet pas d'accéder aux TGV pour d'autres destinations que Paris.
Pour mémoire, un accès existe aussi par Grenoble, mais la capacité de la ligne est limitée par l'établissement public de sécurité ferroviaire.
En dix ans, alors que les Alpes du sud connaissaient un accroissement considérable de leur capacité touristique - plus 60 % - sous l'effet des mesures de défiscalisation en zone de revitalisation rurale, la part du rail dans les déplacements est passée de 20 % à 2 % en 2010. Ce pourcentage est remonté à 5 % en raison de l'ouverture, pour la saison 2011-2012, des TGV Paris-Milan, la gare italienne d'Oulx étant à vingt-cinq kilomètres de Briançon.
Comme on le voit, plusieurs opérateurs interviennent sur cette desserte : TGV Europe via la gare italienne d'Oulx mais dont l'accès à Briançon est quasi confidentiel malgré le potentiel considérable, les horaires des correspondances routières n'étant pas diffusés par SNCF ; l'État au travers du train d'équilibre du territoire de nuit Paris-Briançon ; les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur avec une forte contradiction entre intérêt de l'accès touristique et déplacements locaux.
Il convient donc d'organiser, sous l'autorité des deux préfets, de Rhône-Alpes et de PACA, et des deux autorités organisatrices des transports, les régions PACA et Rhône-Alpes, un vrai Grenelle de la desserte des Alpes du sud en présence de Guillaume Pepy, président de la SNCF. Ce sera ma première demande.
En attendant ce Grenelle que j'appelle de mes voeux, le seul lien reliant Briançon au reste du monde demeure le train de nuit, le train d'équilibre du territoire Paris-Briançon. Les réservations plus d'une semaine à l'avance ne sont possibles que depuis cette saison hivernale, étant précisé que, même deux mois à l'avance, dans une région qui vend des séjours, ce n'est pas suffisant.
Votre politique de rapprochement entre SNCF et Réseau ferré de France est donc absolument indispensable. La demande du territoire porte donc sur le renouvellement de la convention relative au TET Paris-Briançon et sa mise en réservation hâtive afin de pouvoir être vendue en même temps que les séjours touristiques.
Mais l'avenir demeure toutefois sombre pour l'accès aux TGV à Valence. Ainsi que l'a précisé le rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable, le CGEDD, de janvier 2012, la ligne de Valence qui connaît de nombreux désordres géologiques et n'a jamais bénéficié des effets d'un contrat de plan entre l'État et la région Rhône-Alpes se dégrade rapidement : ralentissements permanents, entretien minimal. Cette ligne risque à terme de devenir " à exploitation restreinte " et donc de priver définitivement de tout accès les Alpes du sud.
C'est pourquoi, dans le cadre de l'actuel contrat de projets État-région entre l'État et la région PACA, s'achève l'étude en vue du débat public pour la mise en place d'une connexion ferroviaire entre Briançon et Oulx.
En 2005, la direction régionale de l'équipement de PACA avait mené une étude qui démontrait qu'un potentiel de 1,5 million de voyageurs existait sur cet axe. Cette ligne fait partie des cinq lignes inscrites au schéma national des infrastructures de transport au titre des liaisons transfrontalières.
À présent, on attend que l'État s'engage à lancer le débat public à l'issue de cette étude, d'autant que des financements existent au niveau transfrontalier et que le potentiel en matière de voyageurs démontre la faisabilité des scénarios les plus modestes qui ont l'avantage d'être totalement complémentaires du Lyon-Turin et de lui apporter du trafic de voyageurs sans soulever au contraire du Lyon-Turin d'opposition en Italie.
Ce territoire ne peut rester à ce point sans perspectives d'accès au TGV. Nous comptons donc sur votre engagement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, cher Joël Giraud, la desserte en transports collectifs de la ville de Briançon est l'un des points abordés par le rapport qui a été élaboré en 2012 par le CGEDD sur la desserte ferroviaire des villes alpines.
Le Conseil recommande notamment de pérenniser le train de nuit Paris-Briançon en améliorant le niveau de service offert à l'occasion de l'élaboration de la prochaine convention d'exploitation des trains d'équilibre du territoire. Nous nous inspirerons de ces recommandations.
Tenant compte des conclusions de ce rapport, je vous confirme que le périmètre de la convention TET, dont la prolongation pour une durée d'un an est en cours de définition, continuera d'intégrer le train de nuit Paris-Briançon. De même, comme vous le proposez et comme le recommande le CGEDD, je partage l'idée que nous pouvons mieux coordonner les offres ferroviaires sur le territoire, qu'elles soient organisées par l'État, la SNCF, la région PACA ou la région Rhône-Alpes, en vue de mieux desservir ce territoire. Si les deux autorités organisatrices en agréent, je proposerai qu'un travail commun soit mené avec l'État et la SNCF au niveau local, afin d'examiner les modalités d'une meilleure articulation des services existants.
Quant à la ligne Valence-Veynes, qui relie les Hautes-Alpes au réseau principal et permet en particulier d'accéder aux services TGV, elle connaît effectivement des désordres importants à l'origine des incidents que vous rapportez régulièrement. L'état de cette ligne, utilisée aujourd'hui par huit trains par jour et dont plusieurs sections de voie et des ouvrages d'art sont en mauvais état, ne permet pas en effet d'y offrir une qualité de service satisfaisante. Pour éviter que celle-ci soit encore dégradée par des limitations de vitesse imposées et pour garantir la sécurité des voyageurs, des travaux de rénovation de la voie ont été programmés à hauteur de 11 millions d'euros. Ils seront financés par RFF et réalisés en 2013 et 2014.
Vous évoquez enfin le projet de nouvelle liaison ferroviaire du Montgenèvre, entre Briançon, en France, et Oulx, en Italie. C'est un dossier qui a fait l'objet d'échanges récents avec les autorités italiennes, notamment lors de sommets franco-italiens. Elles nous ont confirmé, lors de la dernière réunion du groupe de travail ferroviaire de la commission intergouvernementale des Alpes du sud, en janvier 2013, la priorité qu'attache le gouvernement italien à la nouvelle liaison ferroviaire entre Lyon et Turin. Ce projet de nouvelle liaison ferroviaire sous le Montgenèvre ne figure aujourd'hui en Italie dans aucun document de programmation. Je ne suis pas persuadé, compte tenu du nouveau paysage politique italien, que nous aurons des précisions ou des éclairages complémentaires, mais nous pourrons relayer votre demande.
Les études menées par la région PACA sur ce projet concernant le Montgenèvre permettront, tout en tenant compte des contraintes budgétaires qui s'imposent tant à l'État qu'aux collectivités territoriales, d'éclairer les acteurs sur son efficacité, sa rentabilité écologique et socio-économique. Plusieurs scénarios de raccordement, pour un coût compris entre 800 millions d'euros et 8,7 milliards d'euros, ont été proposés. C'est dire s'il est important que nous nous imprégnions des études menées pour avoir une vision un peu plus claire.
Sur cette base, l'État, la SNCF et RFF pourront apporter une réponse à votre combat de longue date en faveur d'une meilleure desserte de votre territoire par les liaisons ferroviaires.
M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.
M. Joël Giraud. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse très favorable à la desserte de notre territoire. C'est un type de réponse que nous n'avions pas eu depuis fort longtemps.
Je me permets simplement de préciser qu'il existe un échange de lettres entre le président de la région du Piémont et le président de la région PACA, en faveur du percement d'une liaison ferroviaire entre Briançon et l'Italie, justement pour ces questions d'apport de trafic supplémentaire au Lyon-Turin, ces dossiers étant intimement liés.
Auteur : M. Joël Giraud
Type de question : Question orale
Rubrique : Transports ferroviaires
Ministère interrogé : Transports, mer et pêche
Ministère répondant : Transports, mer et pêche
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 12 mars 2013