Question orale n° 254 :
politique de la ville

14e Législature

Question de : M. Denis Baupin
Paris (10e circonscription) - Écologiste

M. Denis Baupin interroge M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'égalité des territoires et du logement, chargé de la ville, sur l'avenir de la politique de la ville dans les quartiers Kellermann, Paul Bourget et Porte de Vanves-Raymond Losserand situés dans les 13e et 14e arrondissement de Paris. Les indicateurs socio-économiques de ces quartiers, aggravés par les effets de la crise, dénotent leur importante fragilité. Aussi souhaite-t-il connaître les critères qui vont déterminer la géographie des futurs quartiers prioritaires. Si les critères de bas revenus, du taux de chômage sont pertinents, il souhaite savoir si les critères du taux de familles monoparentales, de la densité des quartiers, de la présence de populations non répertoriées par la statistique, qui constituent des problématiques majeures au sein de l'agglomération parisienne, seront aussi pris en compte. Il l'interroge aussi sur la participation financière de l'État, dans le cadre du futur contrat de ville, au soutien aux associations, acteurs essentiels du développement et de la médiation sociale dans ces quartiers.

Réponse en séance, et publiée le 24 avril 2013

MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE À PARIS

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour exposer sa question, n° 254, relative à la mise en oeuvre de la politique de la ville à Paris.
M. Denis Baupin. Ma question porte sur l'avenir du dispositif de la politique de la ville dans les quartiers Kellermann, Paul Bourget et Porte de Vances-Raymond Losserand, dans les 13e et 14e arrondissements de Paris.
Au cours des dix dernières années, de nombreuses opérations ont été menées dans ces quartiers, notamment dans le cadre des grands projets de renouvellement urbain ou de la réalisation du tramway. Ces projets ont permis une nette amélioration du cadre de vie des habitants. Le dispositif de la politique de la ville a également permis la réalisation d'actions de proximité, dans les domaines de la solidarité, de l'éducation, de l'emploi ou encore de la santé.
Mais malgré cette intervention publique importante, force est de constater que ces quartiers ont souffert plus durement que d'autres des effets de la crise. Les indicateurs socio-économiques sont inquiétants et confirment la grande fragilité des populations qui y vivent. C'est quotidiennement que je constate une augmentation de la précarité.
Dans ce contexte difficile, il existe tout de même un signe d'espoir : le développement d'un tissu associatif, d'animation, de lien social, qui préserve la vitalité de notre territoire.
Monsieur le ministre, vous annoncerez prochainement la nouvelle géographie prioritaire. Si les critères retenus pour définir les quartiers prioritaires, bas revenus et taux de chômage, semblent pertinents, ils ne peuvent suffire à décrire la diversité des situations vécues dans nos quartiers.
Aussi, pouvez-vous confirmer que d'autres critères seront pris en compte dans la définition des périmètres des quartiers prioritaires, tels les critères du taux de familles monoparentales, de la densité des quartiers, du taux d'échec scolaire, de la précarité au sein de l'espace public, ou encore du nombre de demandeurs de logement social ?
Les quartiers dont je vous parle sont particulièrement frappés par ces difficultés. Certes, la capitale a la réputation de concentrer les richesses, mais elle fait face à des problématiques spécifiques et ne peut, à elle seule, y répondre.
Je tiens à vous exprimer mon inquiétude quant à la fragilisation du soutien apporté aux initiatives de proximité, notamment à la pérennisation des dispositifs de postes d'adulte-relais. Qu'en sera-t-il demain de l'engagement de l'État au côté des collectivités locales pour maintenir l'action des acteurs locaux et des associations, une action qui reste peu connue et qui est pourtant essentielle ? Quelles garanties pouvez-vous apporter, monsieur le ministre, quant au maintien des crédits de l'État dans ces quartiers ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville.
M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Baupin, la multiplication et l'enchevêtrement des zonages ont rendu illisibles les contours de la politique de la ville et ont contribué au saupoudrage de ses crédits spécifiques. De 751 zones urbaines sensibles et 100 zones franches urbaines en 1996, et moins de 1 500 quartiers en 2006, nous sommes passés à près de 2 500 quartiers concernés par les contrats urbains de cohésion sociale.
C'est pourquoi le Comité interministériel des villes, réuni sous la présidence du Premier ministre le 19 février, a notamment décidé de mettre en oeuvre une géographie prioritaire rénovée, en se fixant comme objectifs de simplifier et de resserrer la géographie prioritaire actuelle autour d'environ 1 000 quartiers.
Pour cela, il s'agit d'utiliser un critère objectif, simple et révélateur de la situation de décrochage des quartiers par rapport au territoire national et à leur agglomération : la part de population à bas revenus. Si cet indicateur est qualifié de révélateur, c'est qu'il est en effet fortement corrélé aux autres difficultés socio-économiques rencontrées. Les familles monoparentales, avec un seul revenu pour l'ensemble de leurs membres, sont ainsi particulièrement exposées à ces difficultés.
Si la question de la densité des quartiers n'est pas un critère en tant que tel, elle intervient dans la définition des quartiers dans la mesure où ceux-ci devront atteindre une taille de population minimale.
En revanche, la présence de populations non répertoriées par la statistique ne peut, par définition, entrer en considération dans la définition des quartiers prioritaires. C'est au vu de ces différents éléments que pourra être examinée la situation des quartiers auxquels vous faites référence, dans les 13e et 14e arrondissements de Paris.
Si la géographie prioritaire permettra de définir la liste des quartiers prioritaires les plus en difficulté sans tenir compte de la richesse de la collectivité dans laquelle ils sont situés, en revanche, celle-ci entrera en considération dans la modulation de la participation financière de l'État.
Celle-ci se traduira en premier lieu par le renforcement des crédits de droit commun et la territorialisation des politiques des différents ministères dans les quartiers prioritaires. Nous avons déjà commencé en fléchant 30 % des emplois d'avenir vers les quartiers prioritaires, en y renforçant la scolarisation des enfants à partir de deux ans, ou en nous engageant à y développer des maisons de santé.
Par ailleurs, les crédits spécifiques de la politique de la ville seront également mieux mobilisés dans le cadre de contrats de ville de nouvelle génération, portés au niveau intercommunal pour valoir projet de territoire. Un contrat unique pour intégrer les enjeux de cohésion sociale et de renouvellement urbain ; un contrat global pour mobiliser le droit commun de l'État, des collectivités territoriales et des organismes sociaux, en impliquant tous les acteurs - préfet, maire et président de l'intercommunalité, région, département, recteur, agence régionale de la santé, caisse d'allocations familiales, Pôle Emploi, l'institution judiciaire, les chambres consulaires.
Ces crédits spécifiques garantiront le soutien aux associations de proximité selon des procédures simplifiées. Les principes de définition de la géographie réglementaire ainsi que les modalités précises de mobilisation de ces moyens seront intégrés dans un projet de loi qui sera transmis au Parlement avant l'été, les textes d'application devant être pris avant l'automne.
M. le président. La parole est à M. Denis Baupin.
M. Denis Baupin. Je remercie M. le ministre de sa réponse. La prise en compte du taux de familles monoparentales est essentielle. Dans l'un des quartiers que j'ai évoqués, il atteint 47 %. Toutefois, je regrette que les populations non répertoriées ne soient pas prises en compte. On comprend bien évidemment la difficulté statistique, mais dans une ville telle que Paris, qui attire plus que d'autres les personnes sans droits, sans domicile, sans papiers, il s'agit d'un élément très important de fragilisation des quartiers, qui doit être pris en considération dans la sectorisation.

Données clés

Auteur : M. Denis Baupin

Type de question : Question orale

Rubrique : Aménagement du territoire

Ministère interrogé : Ville

Ministère répondant : Ville

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 avril 2013

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