Question orale n° 29 :
lycées

14e Législature

Question de : M. Jean-Luc Warsmann
Ardennes (3e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Luc Warsmann attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les menaces de fermeture de sites ou de sections dans les collèges et lycées des Ardennes pour la rentrée 2013. De très nombreux parents d'élèves et enseignants interpellent en effet actuellement les élus sur ce sujet. L'inquiétude porte par exemple sur le maintien des classes d'enseignement général au lycée de Bazeilles, lycée créé en 1991 et représentant un exemple de mixité des élèves dans un établissement accueillant des sections hôtelières, technologiques et professionnelles, ainsi que des classes d'enseignement général.

Réponse en séance, et publiée le 28 novembre 2012

MAINTIEN DES CLASSES D'ENSEIGNEMENT GÉNÉRAL AU LYCÉE DE BAZEILLES

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour exposer sa question, n° 29, relative au maintien des classes d'enseignement général au lycée de Bazeilles.
M. Jean-Luc Warsmann. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, je tiens à vous remercier de votre présence dans l'hémicycle. Je veux vous parler de la situation des Ardennes, un département qui connaît des difficultés économiques et sociales importantes, dont la population baisse et qui a une dimension à la fois rurale et ouvrière - un département donc dont beaucoup de secteurs géographiques ont de faibles densités.
Évidemment, chaque année, la carte scolaire doit évoluer. Cela se fait habituellement dans la discussion, sauf pendant la grave crise de 2005-2006, quand un inspecteur d'académie avait décidé qu'il fallait fermer tous les collèges de moins de trois cents élèves. Toute la société s'est révoltée : faites-vous communiquer, monsieur le ministre, les cahiers de doléances où les habitants ont exposé ce qu'ils pensaient de cette attitude ! Le plan a été retiré.
Je veux vous avertir ce matin que beaucoup d'enseignants et de parents d'élèves pensent que cela recommence. Il nous semble qu'une partie de la technostructure de votre ministère est en train de mettre sur pieds un plan de fermetures d'établissements. L'argument est toujours le même : dans les zones rurales, il y a des établissements avec des effectifs assez limités, qui ne peuvent offrir toutes les options ni toutes les filières ; on ne peut donc les maintenir. Mais ni les parents d'élèves, ni les enseignants ne demandent toutes les options et toutes les filières ! Chacun est bien conscient qu'en zone rurale, ce n'est pas possible. Mais ce n'est pas parce que 5 % des élèves ressortissant du secteur d'un collège ou d'un lycée sont obligés d'aller dans un autre établissement pour suivre les filières qu'ils souhaitent qu'il faudrait fermer ce collège ou ce lycée, qui correspond aux besoins de 95 % des enfants du secteur ! Cet argument n'est pas recevable.
La situation est en train de se dégrader. Quand un chef d'établissement dit à ses enseignants que le plus souhaitable pour les élèves, c'est qu'une partie des filières ferme et que le travail des professeurs n'est vraiment pas de bonne qualité ; quand on entend dans une réunion avec votre ministère que tel collège ressemble plutôt à une colonie de vacances... Imaginez-vous la tension que tout cela est en train de provoquer ?
Aujourd'hui, les Ardennais pensent que vous n'êtes pas informé, que cela ne vient pas de vous. C'est pour cela que je suis venu vous en parler personnellement. On a l'impression qu'une machine infernale est à nouveau en train de se mettre en place. Vous savez comment cela peut être ressenti, quand une partie de la technostructure d'un ministère vient expliquer aux gens qu'elle va faire leur bien contre leur volonté, parce qu'ils ne savent pas ce dont ils ont besoin et qu'il faut leur dire comment s'organiser...
J'ai deux exemples à vous donner. Dans le collège multisites Grandpré-Buzancy, le site du Chesne est menacé. Et au lycée de Bazeilles, il est à nouveau question de fermer les filières d'enseignement général parce qu'il y a un autre lycée à quelques kilomètres de là.
Je me suis renseigné avant de venir en séance : ce matin, l'enfant qui est parti le plus tôt pour aller dans ce lycée, dans les filières générales qu'il est question de fermer, est parti à 6 heures 35 ; il avait une heure de bus. On ne peut pas rallonger indéfiniment ce temps de transport !
Monsieur le ministre, ma question est simple : quelle est votre position ? Avez-vous donné des consignes pour que, dans les Ardennes, un plan de fermeture de sites de collège ou de filières d'enseignement général soit mis en place ? Si ce n'est pas le cas, pouvez-vous nous garantir qu'il n'y aura aucune fermeture de force et que, s'il y a des évolutions, elles se feront dans la discussion ? Quand des évolutions sont nécessaires, vous trouverez toujours des élus, des responsables enseignants et des parents d'élèves pour les faire - cela a été le cas ces dernières années - mais, monsieur le ministre, ne laissez pas remettre le département à feu et à sang comme en 2005-2006 ; ce n'est vraiment pas l'intérêt général.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.
M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Je suis très heureux de vous retrouver, monsieur Warsmann, et je veux essentiellement vous rassurer.
Vous l'avez fort bien dit vous-même à la fin de votre intervention : s'il doit y avoir des évolutions, et c'est certainement le cas, elles doivent se faire dans la concertation. C'est tout à fait mon point de vue.
Ai-je donné, me demandez-vous, des consignes ? Évidemment, non. Vous l'avez d'ailleurs vous-même indiqué : c'est inenvisageable, et cela ne correspondrait pas du tout à la politique que nous menons, à cette priorité que nous donnons à l'éducation nationale. Nous nous soucions très particulièrement - vous le savez et nous l'avons manifesté, c'était une première, lors des affectations de postes à la rentrée - des territoires ruraux, qui connaissent effectivement un certain nombre de phénomènes de désertification.
Nous avons aussi le souci de la réussite éducative pour tous, et il nous faut concilier ces deux préoccupations. Cela doit, on le voit quand on considère les résultats du département que vous représentez si bien, conduire à certaines évolutions qui, s'agissant des collèges, doivent se faire dans la concertation avec les élus locaux, avec le conseil général, avec les maires et avec les parents d'élèves ; c'est ce que j'ai toujours demandé. D'ailleurs, comme vous, je ne crois pas que l'on arrive à quoi que ce soit quand on veut passer en force.
S'agissant plus précisément du lycée de Bazeilles, bien entendu, des évolutions sont nécessaires, dans l'intérêt même du regroupement et de l'excellence. Le lycée se verra d'ailleurs développé comme pôle des métiers, avec ses spécificités.
Pour le reste, aucune décision n'est prise. Je vais donc voir si les choses se font avec trop de brutalité et, le cas échéant, j'interviendrai, car cela n'est pas du tout notre politique.
Je veux donc vraiment, monsieur le député, vous réconforter, vous rassurer. Je vous le dis, nous nous soucions très particulièrement du maillage territorial, de la solidarité des territoires, de la réussite éducative de tous les élèves, où qu'ils habitent.
M. Jean-Luc Warsmann. Merci, monsieur le ministre !

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Warsmann

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 novembre 2012

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