Question orale n° 478 :
enseignement secondaire

14e Législature

Question de : M. Sergio Coronado
Français établis hors de France (2e circonscription) - Écologiste

M. Sergio Coronado interroge M. le ministre des affaires étrangères sur la situation du lycée franco-mexicain. La France possède un réseau culturel et éducatif unique au monde. Son réseau scolaire est présent dans 130 pays, à travers 488 établissements, et scolarise 320 000 élèves. En Amérique latine, les lycées français participent au rayonnement de notre pays, à la diffusion de la langue française. Ils permettent aux familles de scolariser leurs enfants dans un système pédagogique français. Le lycée franco-mexicain est le lycée conventionné le plus important du réseau homologué, il est un vecteur des relations anciennes et à nouveau étroites entre le Mexique et la France. Le 11 novembre 2013, le conseil d'administration du lycée franco-mexicain a décidé de déconventionner le LFM à partir de la rentrée de septembre 2014, c'est-à-dire de rompre le contrat de conventionnement renouvelé en 2002 avec l'AEFE, l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Cette décision soulève émotion et inquiétude dans toute la communauté scolaire, et jette le corps enseignant dans une incertitude insupportable. À l'approche de la visite au Mexique du Président de la République, François Hollande, c'est une très mauvaise nouvelle. Il lui demande quelles sont les actions engagées par le Gouvernement pour que le lycée franco-mexicain demeure un établissement conventionné, garantie de son excellence.

Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2014

SITUATION DU LYCÉE FRANCO-MEXICAIN DE MEXICO
Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour exposer sa question, n°  478, relative à la situation du lycée franco-mexicain de Mexico.

M. Sergio Coronado. La France, vous le savez, madame la ministre chargée des Français de l'étranger, possède un réseau éducatif unique au monde. En Amérique latine, les lycées français sont des établissements d'excellence, qui participent au rayonnement de notre pays, à la diffusion de la langue française. Le lycée franco-mexicain est le plus grand établissement en nombre d'élèves du réseau des lycées conventionnés français. Les établissements conventionnés sont gérés par des associations de droit privé, français ou étranger, et ont passé une convention administrative, financière et pédagogique avec l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger. La convention permet notamment à l'établissement de bénéficier d'un encadrement pédagogique lui assurant une qualité de formation et un enseignement selon les normes françaises.

En novembre dernier, le conseil d'administration du lycée franco-mexicain a décidé de déconventionner le lycée à partir de la rentrée de septembre 2014. Cette décision a été prise de manière unilatérale. Le principal représentant de l'Agence, la proviseure en l'occurrence, en a même fait la promotion publiquement, sans aucune réaction de sa tutelle. La communauté éducative et la communauté française installée au Mexique ont manifesté publiquement leur refus de la sortie programmée de la convention.

Je sais l'attachement du ministère des affaires étrangères au conventionnement, rappelé à plusieurs reprises, notamment par le porte-parole du ministère. Pourtant, ce 23 janvier, un protocole a été signé entre l'agence et le lycée franco- mexicain, en présence de Mme l'ambassadeur de France. Ce protocole est ressenti à ce jour comme une capitulation en rase campagne face aux exigences de l'association gestionnaire. La fin du statut des personnels résidents était une exigence ancienne. Ils sont trop revendicatifs, trop syndiqués. Cette exigence a été satisfaite et les résidents d'aujourd'hui seront remplacés demain par des personnels sous contrat local. Le maintien du personnel expatrié en était une autre. C'est normal. Il est difficile de faire fonctionner un établissement sans cet encadrement. Elle est aussi satisfaite.

Les engagements pris pour maintenir une modération des frais de scolarité ou assurer la gouvernance peuvent paraître des points positifs. Il n'en reste pas moins que l'Agence s'est privée dans cette négociation des moyens de les faire respecter. Elle n'a fait preuve d'aucune anticipation, et ce n'est pas à défaut d'avoir été avertie. Elle a subi la crise.

Pouvons-nous entériner un tel coup de force ? Un tel protocole est la porte ouverte à de futurs déconventionnements sur le réseau. Ce n'est pas un bon signe avant la visite du Président de la République en avril prochain.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l'étranger.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger. Le lycée franco-mexicain, comme vous l'avez rappelé, monsieur le député, est un établissement privé de droit mexicain homologué par le ministère français de l'éducation nationale. Il scolarise cette année un peu plus de 3 500 élèves de la maternelle à la terminale. Conventionné avec l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, il bénéficie à ce jour du détachement de seize personnels expatriés et de quatre-vingt-six enseignants résidents. L'aide apportée par l'Agence à l'établissement s'élevait en 2012 à 6 millions d'euros, auxquels s'ajoutaient 1,4 million d'euros au titre des bourses scolaires, pour 340 boursiers.

Sous l'impulsion de son président, le comité des directeurs de l'établissement, instance gestionnaire du lycée, a exprimé le 11 novembre dernier son souhait de passer du conventionnement à un accord de partenariat avec l'Agence dès la rentrée 2014. Le déconventionnement n'est pas et n'a jamais été une option acceptée par le Gouvernement. C'est pourquoi, dès cette annonce, un groupe de travail a été mis en place réunissant le comité de gestion de l'établissement, l'Agence et le poste diplomatique. Soyez assuré que nous sommes attentifs à l'avenir de cet établissement comme de tous ceux de notre réseau. Pour nous, le maintien d'une convention reste la meilleure option pour le lycée. C'est aussi la solution qui semble correspondre le mieux à l'identité franco-mexicaine de l'établissement.

Nous avons tout mis en œuvre pour faire revenir le comité des directeurs du lycée sur sa décision. Le dialogue engagé a abouti à un accord en ce sens, officialisé le 23 janvier dernier. Il a été convenu d'actualiser la convention en vigueur, signée en 2002, afin de l'adapter à la situation qui prévaut aujourd'hui au Mexique. Le déconventionnement n'est donc plus à l'ordre du jour. C'est une bonne nouvelle pour tous ceux qui s'inquiétaient de l'avenir du lycée.

Nous en profitons pour obtenir des garanties nouvelles sur l'évolution des frais de scolarité. Ainsi, nous avons la garantie qu'ils n'augmenteront pas plus que l'indice annuel des prix du secteur éducatif mexicain. Nous avons aussi insisté sur le maintien de la présence de personnels titulaires de l'éducation nationale dans une proportion similaire à la situation actuelle. La nouvelle convention permettra le maintien de personnels expatriés nommés et rémunérés par l'AEFE. Les personnels ayant un statut de résident verront leurs postes transformés en contrats de droit local, tout en conservant leur niveau de rémunération actuel, l'évolution de leur carrière étant garantie.

Enfin, le maintien du partenariat avec le ministère de l'éducation français sur les filières technologiques fait partie de l'accord, ainsi que l'accès, pour les familles non françaises, aux bourses du conseil d'administration du lycée.

En conclusion, cette nouvelle convention, comme les précédentes, portera les valeurs et les principes éducatifs partagés par le Mexique et par la France.

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je vous trouve bien optimiste, madame la ministre. Non, rien n'a été fait depuis plusieurs mois, si ce n'est plusieurs années, pour éviter le déconventionnement, alors que plusieurs signes avant-coureurs avaient été portés à la connaissance de l'Agence. Dans cette négociation où l'on a essayé de sauver les meubles, le sentiment très fort ressenti à la fois par la communauté éducative et par la communauté française, c'est non seulement que l'Agence n'était pas en position de force pour négocier mais qu'elle a provoqué elle-même cette situation par manque de réactivité et d'anticipation, et qu'au fond, elle s'est contentée de donner satisfaction aux exigences du comité des directeurs en essayant ici et là de sauver quelques points.

Vous indiquez que les personnels sous contrat local auront la garantie de bénéficier de la même rémunération et que leur carrière professionnelle n'en sera pas affectée. Vous n'en avez pas le pouvoir, l'Agence non plus. Cela dépendra de la bonne volonté du comité des directeurs puisque ce sont des contrats renouvelables tous les deux ans. Ce que vous avez oublié de signaler, c'est que cette demande de transformer les contrats de résident en contrat local avait une raison particulière, c'est que le droit d'organisation syndicale notamment est beaucoup moins libre au Mexique qu'il ne l'est en France, et que l'une des raisons du déconventionnement tenait aux relations tendues entre le comité des directeurs et les plus de quatre-vingts titulaires d'un contrat de résident.

Je regrette donc qu'alors que la situation était prévisible, l'Agence n'ait pas été capable, et sa tutelle non plus, de réagir en temps et en heure, et je m'étonne, et je ne suis pas le seul, un certain nombre de sénateurs, vous le savez, ont réagi, qu'un fonctionnaire de l'État à l'étranger puisse faire la promotion en toute déloyauté du déconventionnement d'un établissement lié à la France et à l'Agence sans que sa tutelle intervienne, laissant agir cette personne sans difficultés. Elle est toujours en poste, c'est le principal représentant de l'Agence dans l'établissement.

Données clés

Auteur : M. Sergio Coronado

Type de question : Question orale

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Affaires étrangères

Ministère répondant : Affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 2014

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