Question orale n° 479 :
commissariats

14e Législature

Question de : M. François Asensi
Seine-Saint-Denis (11e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. François Asensi interroge M. le ministre de l'intérieur sur les moyens à la disposition du commissariat de Sevran. Malgré les besoins prioritaires de la ville de Sevran, ce commissariat a vu ses effectifs décroître substantiellement, avec la perte de 11 postes de policiers depuis 2001. Ses moyens humains et matériels ne lui permettent pas d'assurer de manière efficace la sécurité dans tous les quartiers de Sevran, malgré le travail et l'abnégation des agents de police. Ce commissariat, obtenu de haute lutte en 1989 à la demande de l'ancien maire de Sevran et de son député, grâce à la mobilisation de la population, demeure un commissariat subdivisionnaire rattaché au commissariat d'Aulnay-sous-Bois. Cette subordination a des conséquences fortement préjudiciables : manque de réactivité, non-priorité de certaines interventions. La population sevranaise s'est émue que le projet de reconstruction du commissariat prévu en 2015, après plusieurs années de retard, se fasse sans obtention d'un statut de commissariat de plein exercice. Une pétition lancée il y a quelques semaines a réuni plusieurs centaines de signatures pour exiger l'obtention d'un commissariat autonome, d'un commissaire, de moyens propres et supplémentaires. Avec 4 631 policiers, contre 6 765 policiers dans les Hauts-de-Seine, le département de la Seine-Saint-Denis subit de plein fouet les inégalités territoriales et la défaillance de l'État dans ses missions régaliennes. La circonscription de police d'Aulnay-Sevran est l'une des moins bien dotée, comme souligné par le rapport de la Cour des comptes de juillet 2011. Afin de rétablir l'égalité républicaine et le droit fondamental de vivre en sécurité quel que soit son lieu d'habitation, il lui demande de doter Sevran d'un commissariat de plein exercice à la mesure d'une ville de plus de 50 000 habitants confrontée à des problématiques de sécurité complexes.

Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2014

SITUATION DU COMMISSARIAT DE POLICE DE SEVRAN
Mme la présidente. La parole est à M. François Asensi, pour exposer sa question, n°  479, relative à la situation du commissariat de police de Sevran.

M. François Asensi. Monsieur le ministre, ma question porte sur le cruel manque de moyens du commissariat de Sevran.

Sevran demeure la seule ville de cette taille en Seine-Saint-Denis à ne pas disposer d'un commissariat de plein exercice, malgré les problèmes de sécurité liés aux trafics, ce qui nous paraît tout à fait incohérent.

Son commissariat subdivisionnaire demeure rattaché au commissariat d'Aulnay-sous-Bois, avec des conséquences très concrètes et fortement préjudiciables : manque de réactivité, non-priorité de certaines interventions, dépendance pour le matériel et les ordres d'intervention. Un exemple significatif : le courrier concernant la ville de Sevran n'est pas traité sur place mais à Aulnay-sous-Bois.

En outre, depuis 2001, onze postes de policiers ont été supprimés. Le commissariat de Sevran est le plus mal doté du département, la circonscription de police Aulnay-Sevran l'une des plus mal pourvues, comme l'a souligné le rapport de la Cour des comptes de juillet 2011 sur les inégalités territoriales.

Malgré l'engagement remarquable des policiers, le commissariat n'est pas en mesure de répondre à toutes les demandes d'intervention, même sensibles. Les plaintes d'administrés sont légion. Samedi dernier encore, un ami médecin a vu sa voiture vandalisée alors qu'il exerçait dans un quartier sensible. Aucun véhicule de police n'était disponible pour lui venir en aide. Ce n'est pas tolérable.

Certes, l'État a accepté de financer la reconstruction du commissariat. C'est une bonne chose : il est plus que temps ! Depuis 1989 et l'implantation d'un bâtiment provisoire à ma demande et celle de l'ancien maire, les locaux s'étaient fortement dégradés. Cette reconstruction est une avancée importante pour l'accueil des victimes et les conditions de travail des policiers.

Mais la population sevranaise s'est émue en apprenant récemment que le futur commissariat demeurerait dans les faits une annexe d'Aulnay. Une pétition a réuni plusieurs centaines de signatures pour exiger l'obtention d'un commissariat autonome, d'un commissaire, de moyens supplémentaires.

Monsieur le ministre, les Sevranais ont droit à ce commissariat de plein exercice. Le nombre des incivilités et des délits, l'emprise du trafic de drogue et la violence qu'il génère, tout cela justifie un engagement de l'État. Il n'est plus acceptable que la Seine-Saint-Denis dispose de moins de policiers que les Hauts-de-Seine, malgré deux fois plus de délits. Le droit fondamental de vivre en sécurité doit être une réalité, à Sevran comme dans toute la République.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Monsieur le député François Asensi, je connais la souffrance des habitants de Sevran. Je me suis rendu en avril dernier dans la cité des Beaudottes. Je suis allé dans les halls d'immeuble, à la rencontre des habitants, et des forces de l'ordre qui travaillent chaque jour sur le terrain.

J'ai également visité le commissariat de Sevran, qui est effectivement vétuste et insuffisant. Je suis conscient des difficultés existantes pour les policiers, engagés sur le terrain, qui y travaillent – je leur rends d'ailleurs hommage –, mais aussi pour les victimes. J'ai soutenu le projet d'un nouveau commissariat, qui est un projet d'envergure, de près de 12 millions d'euros, à la taille des enjeux. Ce nouveau commissariat, qui sera livré à la fin du premier trimestre 2015, sera presque deux fois plus grand que l'actuel, ce qui permettra d'améliorer incontestablement l'accueil du public. Il montre également de la part de l'État un profond respect à l'égard des habitants de Sevran comme des policiers. Vous me permettrez, monsieur Asensi, de souligner l'action du maire de Sevran, car j'imagine que votre question n'a en aucun cas le moindre lien avec le contexte électoral…

M. François Asensi. Non !

M. Manuel Valls, ministre. Je veux donc souligner l'action résolue et le courage de Stéphane Gatignon, le maire de Sevran. Vous auriez été « déçu », monsieur Asensi, que je n'en dise rien. Le commissariat de Sevran est un commissariat subdivisionnaire, dépendant de celui d'Aulnay, mais il recueille toute l'attention et tous les efforts nécessaires. Des évolutions administratives sont possibles, notamment parce qu'il y aura également un nouveau commissariat à Aulnay où je me suis rendu il y a quelques jours – le commissariat actuel est également dans un état épouvantable. La délinquance n'a pas de frontières. Notre projet nous conduira à revoir la carte et l'organisation de la police. Dans ce cadre, des évolutions sont tout à fait possibles pour le commissariat de Sevran.

Enfin, je rectifie les chiffres que vous avez cités, monsieur Asensi, sans pour autant sous-estimer la situation. Au 31 décembre 2013, l'effectif était de 4 174 unités en Seine-Saint-Denis contre 3 187 dans les Hauts-de-Seine. Nous cherchons à minimiser les effets passés de la RGPP dans le département. Depuis la mise en place de l'agglomération parisienne, la direction territoriale de la Seine-Saint-Denis a perdu 4 % de ses effectifs, quand Paris en a perdu 11 % et les Hauts-de-Seine 8 %. De plus, des renforts sont effectués régulièrement par les policiers départementaux ou les unités des forces mobiles. Toujours est-il que la réponse à l'insécurité à Sevran a commencé avec le projet de rénovation du commissariat et la création d'une zone de sécurité prioritaire qui couvre les trois secteurs sensibles de la cité haute, de la cité basse et de la cité des Beaudottes que j'évoquais tout à l'heure.

Nos priorités sont claires : la lutte contre les trafics de drogue, en combattant les bandes dans ce territoire comme sur l'ensemble du département. Vous témoignez à Sevran d'un besoin d'État et de protection, qui justifie la mobilisation des habitants et des élus. Nous serons très attentifs à la situation, aux moyens qui seront mis ainsi qu'à l'organisation administrative du commissariat.

Mme la présidente. La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. Merci, monsieur le ministre, pour votre réponse. J'observe que vous avez fait allusion aux élections municipales, contrairement à moi, et que, par conséquent, vous êtes sorti de la question que je vous avais posée ; mais c'est un peu dans votre style.

M. Manuel Valls, ministre. Soyez beau joueur, monsieur le député !

M. François Asensi. Je veux simplement dire, monsieur le ministre, qu'il y a dans le troisième district de la Seine-Saint-Denis six commissariats et qu'un seul n'est pas de plein exercice, celui de Sevran, contrairement à ceux du Blanc-Mesnil, de Villepinte, du Raincy, de Clichy-sous-bois et de Livry-Gargan. Or, vous savez bien que la situation au Raincy n'est pas la même qu'à Sevran. On aurait pu penser que vous donneriez des moyens supplémentaires au commissariat de Sevran, mais ce n'est pas ce que vous avez fait aujourd'hui et je le regrette.

M. Manuel Valls, ministre. C'est de la mauvaise foi !

Données clés

Auteur : M. François Asensi

Type de question : Question orale

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 2014

partager