rythmes scolaires
Question de :
Mme Claude Greff
Indre-et-Loire (2e circonscription) - Les Républicains
Mme Claude Greff interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur la mise en place du décret n° 2013-77 du 24 janvier 2013 relatif à l'organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires. En effet, dans sa circonscription et partout en France le vent de protestation ne retombe pas pour dénoncer la mise en place autoritaire de cette réforme. Les familles, les enfants, les enseignants, les personnels des collectivités ont adressé un message clair. Ils veulent que ce décret soit abrogé et que le débat soit enfin institué. Le Gouvernement a-t-il enfin tiré les leçons des élections municipales ? Il ne doit plus refuser le dialogue avec la société civile sur cette question. Les élus municipaux dans leur grande majorité, dénoncent à juste titre un transfert de charges non compensé qui accentuera encore les inégalités entre grandes communes et petites communes, entre communes riches et communes pauvres. C'est le cas des communes rurales de sa circonscription qui ne pourront mettre en place la réforme faute de moyens ou l'appliqueront dans de mauvaises conditions pour les enfants. Ces élus de terrain ont entendu, contrairement à lui, les familles et les enseignants. Beaucoup ont pris une délibération pour rejeter le contenu de cette réforme entamant ainsi une forme de désobéissance civile contrainte. Le Gouvernement ne détient pas seul la vérité. Il doit écouter le message qui lui a été envoyé par les électeurs. Elle lui demande donc de préciser si le Gouvernement envisage d'annuler ce décret et de lancer enfin un débat parlementaire et un vrai débat avec la société civile comme il sait le faire si souvent avec les partenaires sociaux.
Réponse en séance, et publiée le 7 mai 2014
RÉFORME DES RYTHMES SCOLAIRES DANS LES ÉCOLES MATERNELLES ET ÉLÉMENTAIRES
M. le président. La parole est à Mme Claude Greff, pour exposer sa question, n° 636, relative à la réforme des rythmes scolaires dans les écoles maternelles et élémentaires.
Mme Claude Greff. L'intitulé est long parce que cette question, qui porte sur l'application du décret du 24 janvier 2013 relatif à l'organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires, est d'importance.
En effet, dans ma circonscription d'Indre-et-Loire et partout en France, le vent de protestation ne retombe pas pour dénoncer la mise en place autoritaire de cette réforme. Dans une récente interview, le Président de la République vient d'ailleurs de confirmer que cette réforme serait appliquée.
Les familles, les enfants, les enseignants, les personnels des collectivités et des élus ont adressé un message clair : ils veulent que ce décret soit abrogé et que le débat soit enfin institué.
Le Gouvernement a-t-il enfin tiré les leçons des élections municipales sur ce sujet ? Je ne le pense pas. Il ne doit plus refuser le dialogue avec la société civile sur cette question.
Les élus municipaux, dans leur grande majorité, dénoncent à juste titre un transfert de charges non compensé qui accentuera encore les inégalités entre communes, grandes ou petites, riches ou pauvres. C'est ainsi que les communes rurales de ma circonscription ne pourront mettre en place la réforme faute de moyens ou l'appliqueront dans de mauvaises conditions pour les enfants.
Ces élus de terrain ont entendu, contrairement à vous, les familles et les enseignants. Beaucoup veulent repousser cette réforme et certains ont pris une délibération pour en rejeter le contenu, entamant ainsi une forme de désobéissance civile contrainte.
Le Gouvernement ne détient pas seul la vérité, il doit écouter le message qui lui a été envoyé par les électeurs. Les aménagements annoncés n'apportent aucune solution de financement ou de simplification. Vous faites naître un sentiment d'inégalité entre les enfants de notre pays qui ne seront pas tous traités de la même façon puisqu'ils auront des temps scolaires et des opportunités différentes. Où est donc l'intérêt supérieur de l'enfant ?
Je vous demande donc de préciser si le Gouvernement envisage d'annuler ce décret et de lancer enfin un débat parlementaire ou un vrai débat avec la société civile, comme il le fait fréquemment avec les partenaires sociaux. Pourquoi ne pas avoir ce type de débat avec la société civile ou tout simplement avec les parlementaires ?
M. Patrick Hetzel et M. Éric Straumann . Tout à fait !
Mme Claude Greff. Dans l'interview accordée ce matin à une chaîne de télévision et à une station de radio, le Président de la République a déclaré qu'il n'avait plus rien à perdre en tant que président. Si le Président de la République n'a plus rien à perdre, la France a tout à perdre. En ce qui concerne cette réforme en particulier, ce sont nos enfants qui ont tout à perdre et c'est pourquoi je vous pose cette question.
M. Patrick Hetzel. Excellent !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la députée, je vous prie de bien vouloir excuser M. Benoît Hamon à qui s'adressait votre question.
Tout d'abord, il n'est pas juste de parler d'une absence de concertation concernant la réforme des rythmes scolaires. Dès le mois de juillet 2012, une grande concertation a été lancée pour refonder l'école. Un travail par ateliers a été organisé avec les acteurs : les représentants des familles, des enseignants, des collectivités locales. Dans ce cadre, les collectivités ont pu exprimer leurs préoccupations.
Cette concertation a conduit le Gouvernement à mettre en œuvre la réforme en tenant compte des spécificités locales. Le décret du 24 janvier 2013 n'impose pas partout et à tous un modèle unique qui serait rigide mais il fixe un cadre national à l'intérieur duquel différentes déclinaisons locales sont possibles et même encouragées. Ainsi, en concertation avec les partenaires locaux, les directeurs académiques ont-ils fixé l'organisation de la semaine.
Ce dialogue essentiel se matérialise dans le projet éducatif territorial qui permet de mobiliser l'ensemble des ressources d'un territoire en fonction de ses spécificités, afin d'offrir à chaque enfant un parcours éducatif cohérent et de qualité.
Cette nouvelle approche du temps scolaire est préconisée par tous les chercheurs et chronobiologistes. Elle est essentielle car pour apprendre à lire, à écrire et à compter, il est plus efficace de travailler à neuf heures trente le mercredi plutôt qu'en fin de journée le reste de la semaine.
Afin de pallier les difficultés que peuvent rencontrer certaines communes – et que personne ne nie – des dérogations portant notamment sur un arbitrage entre le samedi et le mercredi ont été rendues possibles. De plus, dans un souci de dialogue et de pragmatisme, un comité de suivi de la réforme des rythmes scolaires a été mis en place.
Par ailleurs, compte tenu des difficultés locales qui peuvent apparaître sur le terrain – encore une fois, nous ne les nions pas – un projet de décret autorisant des expérimentations a été élaboré le 25 avril 2014. Il permet de regrouper les activités périscolaires sur une seule après-midi dans le cadre d'un projet pédagogique de qualité et d'alléger la semaine en réduisant le nombre d'heures d'école par semaine et en étalant ces heures sur les vacances.
Les interventions d'hier au Conseil supérieur de l'éducation ont indiqué un attachement très large aux principes de la réforme des rythmes scolaires et à son application générale lors de la rentrée 2014 avec les nouvelles modalités d'expérimentation qui seront évaluées sur le plan pédagogique de manière sérieuse et documentée par les inspecteurs de l'éducation nationale, les inspecteurs d'académie et les recteurs.
Parlons des moyens. Malgré un contexte budgétaire très contraint, un fonds accompagne les communes dans l'organisation d'activités périscolaires et la Caisse nationale des allocations familiales participe également à la prestation de service ordinaire et au contrat « enfance jeunesse ».
Les communes pourront également s'appuyer sur leurs ressources humaines propres et sur le riche tissu associatif local, à commencer par les mouvements d'éducation populaire et les associations agréées par le ministère de l'éducation nationale.
Les communes peuvent aussi proposer à des enseignants volontaires d'intervenir sur le temps périscolaire. Enfin, elles peuvent recruter des jeunes dans le cadre d'un emploi d'avenir et bénéficier ainsi d'une prise en charge par l'État des trois-quarts de la rémunération de ces jeunes. Voyez que les solutions sont multiples.
Élever le niveau de tous, réduire les inégalités scolaires, promouvoir une école qui donne les mêmes chances à tous les enfants de la République : voilà des objectifs qui devraient nous rassembler alors que nous devons progresser dans les évaluations européennes dans lesquelles nous n'avons cessé de régresser au cours des dernières années.
Ces objectifs doivent nous rassembler dans l'intérêt supérieur de l'enfant, des familles, des élus mais aussi dans l'intérêt supérieur de la nation car il s'agit de notre avenir.
M. le président. La parole est à Mme Claude Greff.
Mme Claude Greff. Vous nous proposez de très nombreuses solutions, madame la secrétaire d’État, mais j'aimerais que cette imagination débordante vous permette de répondre à la question suivante : comment le transfert de charges va-t-il être compensé, comme prévu dans la Constitution ? Quand il transfère des charges aux communes, l'État doit en effet apporter une compensation financière.
Le Président de la République et le Gouvernement doivent donc développer encore leur imagination débordante, tout en apprenant le sens de deux mots essentiels : l'obstination qui est une qualité, et l'entêtement qui est un défaut. En raison de votre entêtement, cette réforme va droit dans le mur.
C'est la raison pour laquelle ni les enseignants, ni les parents, ni même les élus locaux n'acceptent cette manière qu'a le Gouvernement de vouloir imposer quelque chose qui ne marche pas.
Auteur : Mme Claude Greff
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er avril 2014