DOM-ROM : Guyane
Question de :
Mme Chantal Berthelot
Guyane (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Mme Chantal Berthelot alerte M. le ministre des finances et des comptes publics sur le manque de moyens humains mis à disposition de France Domaine et l'absence d'une politique foncière de l'État en Guyane.
Réponse en séance, et publiée le 7 mai 2014
POLITIQUE FONCIÈRE DE L'ÉTAT EN GUYANE
M. le président. La parole est à Mme Chantal Berthelot, pour exposer sa question, n° 643, relative à la politique de l'État en Guyane.
Mme Chantal Berthelot. Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, sur les 83 500 kilomètres carrés du territoire guyanais, l'État possède dans son domaine privé 90 % du foncier. Le secteur privé détient moins de 10 % et les collectivités territoriales moins de 1 %. C'est un cas unique en France.
Les services en Guyane de France Domaine, qui gère le domaine privé de l'État, doivent instruire de nombreuses demandes et ne disposent pas des moyens humains adéquats pour y faire face. Force est de constater que l'accession et l'obtention des titres fonciers dans des délais convenables sont une véritable gageure dans notre territoire.
Pour étayer mon propos, monsieur le secrétaire d'État, je vais vous décrire la situation. Actuellement, les services de France Domaine doivent, chaque jour, accueillir vingt personnes en moyenne et répondre à deux cents à trois cents appels téléphoniques. Pour cela, France Domaine ne dispose que d'un effectif de dix personnes, qui parviennent à traiter, avec beaucoup de volonté, ce que je salue publiquement, deux cents demandes sur les plus de mille reçues par an. À ce jour, cinq mille dossiers sont en attente de traitement. Ce sont autant de personnes et d'associations qui attendent une réponse depuis trop longtemps.
Monsieur le secrétaire d'État, vous l'aurez aisément compris : les services de l'État en charge de ces questions arrivent à saturation, et c'est l'esprit même et l'objectif des politiques publiques voulues par l'État qui sont remis en cause.
La Guyane connaît une croissance démographique exponentielle, donc une pression foncière très forte.
Cette situation de blocage de l'accession au foncier est un frein au développement économique, au développement des politiques d'aménagement des collectivités et, en définitive, à la définition de l'avenir de notre territoire. Or, l'avenir de la Guyane et des Guyanais passe par la rétrocession des terres et l'accession au foncier détenu par l'État, ainsi que par la régularisation des titres fonciers.
C'est pourquoi je souhaiterais savoir, monsieur le Secrétaire d’État, quelles mesures le Gouvernement compte mettre en œuvre pour permettre au service de France Domaine de disposer des ressources indispensables à l'accomplissement des missions de service public attendues par les Guyanais
M. le président. La parole est à M. le Secrétaire d'État chargé du budget.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Madame la députée Chantal Berthelot, vous avez rappelé qu'en Guyane l'État est propriétaire de plus de 90 % des terres, dont la majeure partie relève du régime forestier. L'ordonnance du 2 septembre 1998 vise à répondre aux enjeux fonciers spécifiques à la Guyane, et exprime la volonté des pouvoirs publics de favoriser l'accession à la propriété foncière des personnes qui occupent, à usage agricole ou d'habitation, des terrains domaniaux.
La conduite de cette politique foncière nécessite de sécuriser les titres en assurant, préalablement à tout transfert, une parfaite identification des biens, afin de garantir les droits des acquéreurs. Les services de la direction régionale des finances publiques de Guyane mettent en œuvre les procédures de régularisation et de cession des biens domaniaux, assumant la mission de guichet unique qui n'est plus assurée, depuis 2007, par l'établissement public d'aménagement en Guyane.
En matière agricole, les cessions doivent être examinées par les services chargés de l'agriculture, pour vérifier la conformité des demandes aux orientations de la politique agricole.
Par ailleurs, afin de s'assurer que ces dévolutions n'alimentent pas la spéculation foncière, l'avis préalable et favorable des maires concernés est systématiquement sollicité, afin de veiller à ce que ces projets soient conformes aux documents d'urbanisme définis par les collectivités. Or les collectivités locales connaissent de fortes contraintes d'aménagement de leur territoire, qui ne leur permettent pas toujours de répondre aux demandes dans des délais rapides. Le respect de ces différents impératifs induit nécessairement des délais d'instruction des demandes, que vous avez regrettés.
S'agissant des moyens de l’État, pour assurer la stabilité globale des effectifs, les services de l'État – à l'exception des secteurs prioritaires définis par le Président de la République tels que l'éducation, la sécurité et la justice – sont amenés à réduire leur volume d'emplois.
La direction générale des finances publiques participe à cet effort de façon substantielle, mais nous nous efforçons de le répartir de manière équilibrée en fonction des besoins et des situations locales. Dans ce contexte national exigeant, les spécificités de la direction régionale des finances publiques de Guyane sont justement appréciées : c'est ainsi que cette direction, contrairement à toutes les autres, ne connaît aucune suppression d'emploi en 2014.
Nous examinons actuellement le déploiement du réseau sur l'ensemble du territoire national, métropolitain ou outre-mer, et je veillerais particulièrement à ce que les moyens dévolus à la direction régionale des finances publiques de Guyane tiennent compte de la spécificité que vous avez utilement rappelée.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Berthelot.
Mme Chantal Berthelot. Monsieur le ministre, j'ai bien entendu que la direction régionale des finances publiques de Guyane ne connaîtrait aucune suppression d'emploi. Néanmoins, la pression démographique est une réalité et une spécificité de la Guyane, que les services publics de l’État doivent prendre en compte. J'attends donc que vous donniez aux services de l’État les moyens permettant d'assurer à la Guyane les services publics dont elle a besoin et auxquels elle a droit.
Auteur : Mme Chantal Berthelot
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Finances et comptes publics
Ministère répondant : Finances et comptes publics
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 avril 2014