COM : Polynésie
Question de :
Mme Maina Sage
Polynésie Française (1re circonscription) - Union des démocrates et indépendants
Mme Maina Sage appelle l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur la surveillance du domaine maritime national en Polynésie française et sur les moyens qui doivent y être consacrés. Lors du débat sur la politique maritime de la France qui s'est tenu à l'Assemblée nationale le 14 janvier dernier, M. Philippe Folliot, député UDI, a souligné l'importance d'une prise de conscience de la nécessité de protéger le domaine maritime de notre pays. Cette question se pose avec acuité en Polynésie française, territoire isolé situé à 17 100 kilomètres de la métropole et composé de cinq archipels, regroupant en tout 118 îles émergées et dispersées sur 5 millions de km² de surface maritime, équivalente à la surface de l'Europe. L'immensité de cette zone maritime, qui représente 47 % de la zone économique exclusive nationale, permet à la France d'être la deuxième puissance maritime mondiale. Aussi, la présence de moyens de communication et de transports maritimes et aériens est un véritable enjeu pour atténuer l'isolement des habitants de la Polynésie, au nombre de 270 000, dont 75 % sont concentrés sur l'île principale, Tahiti. Cette collectivité d'Outre-Mer dispose en conséquence de 4 aérodromes d'État, de 40 aérodromes territoriaux et d'un aérodrome militaire et de 88 ports reliant entre elles les différentes îles par l'intermédiaire du port autonome de Papeete. La question de la sécurité de cette zone immense relève de la compétence de l'État. Pour autant, les missions de sauvetage en mer ne sont pas assurées par la Société nationale de sauvetage en mer, comme dans les autres territoires de la République, mais par une association de droit privé, la Fédération d'entraide polynésienne de sauvetage en mer (FEPSM), dont les opérations de sauvetages des vies humaines sont réalisées par 431 bénévoles répartis sur 10 stations de sauvetage en mer. Ces bénévoles ont réalisé plus de 73 heures d'intervention en 2013, autant d'actions opérationnelles et préventives auprès du grand public, des plaisanciers et des professionnels de la mer, financées sur les fonds propres de la FEPSM, l'association ne recevant chaque année qu'une subvention de 10 000 euros de la direction des affaires maritimes. Aussi, pour assurer la sécurité de ces sauveteurs en mer bénévoles et leur permettre d'agir avec une plus grande efficacité, un renforcement du soutien financier de l'État apparaît nécessaire. En outre, plus préoccupant encore, l'attention de la députée a été attirée récemment sur les conséquences de la perte d'un patrouilleur des douanes portant le nom d'« Arafenua », bâtiment de 25 mètres qui, avant son échouement en juin 2013, sillonnait depuis vingt ans les eaux de la Polynésie. Il assurait des missions essentielles pour la surveillance du territoire maritime français, au travers notamment de la réalisation de contrôles de la navigation de plaisance, de pêche et de commerce et de la projection du service des douanes dans les îles éloignées car ce service n'est présent qu'à Tahiti, l'île principale. Sa présence permettait ainsi d'organiser des contrôles des goélettes et des aéroports, ainsi que des contrôles routiers. Ce type de contrôles est rendu maintenant plus difficile dans la mesure où il est désormais nécessaire d'envoyer des équipes par avion sur les lieux d'interventions. Face au risque de multiplication des trafics, et pour assurer les missions habituelles de contrôles de santé publique, de protection de l'environnement, de fiscalité des navires, d'admission temporaire des navires de plaisance, de police des pêches, et de sauvetage et d'assistance en mer, l'acquisition d'un nouveau patrouilleur constitue une priorité absolue. Un projet de commande d'un patrouilleur de 32 mètres, dont le rayon d'action permettrait d'aller aux îles Marquises, et armé par un équipage de 12 hommes, est actuellement en attente d'une décision des services de l'État. Sachant que ces actions relèvent des missions régaliennes et que les agents de la brigade de surveillance maritime des douanes de Polynésie sont actuellement mis à disposition d'autres brigades de la Direction des douanes dans l'attente qu'une décision soit prise, Mme la députée sollicite M. le ministre sur la nécessité que les fonds nécessaires à l'acquisition de ce navire soient débloqués dans les plus brefs délais. En effet, il n'est pas concevable, qu'à l'heure où notre pays est « en guerre contre le terrorisme » pour reprendre les propos de M. le Premier ministre devant la représentation nationale le 13 janvier dernier, près de la moitié de la zone maritime française soit sous-protégée du fait de l'impossibilité pour un service essentiel de l'État d'assurer ses missions habituelles, ce qui a des conséquences majeures sur la sécurité de cette zone.
Réponse en séance, et publiée le 4 février 2015
SURVEILLANCE DU DOMAINE MARITIME NATIONAL EN POLYNÉSIE FRANÇAISE
M. le président. La parole est à Mme Maina Sage, pour exposer sa question, n° 858, relative à la surveillance du domaine maritime national en Polynésie française.
Mme Maina Sage. Ma question, madame la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, est relative à la surveillance maritime en Polynésie française.
Notre collectivité est isolée, en plein cœur du Pacifique Sud. C'est un territoire dont la surface maritime est grande comme l'Europe, 5 millions de kilomètres carrés, ce qui représente la moitié de la surface maritime française, un tiers de la surface maritime européenne. La Polynésie dispose de quarante-sept aérodromes, dont quarante-trois territoriaux, et de quatre-vingt-huit ports maritimes. Vous imaginez donc bien que cette question de la surveillance maritime et des moyens de transport est primordiale pour notre collectivité. À ce titre, je souhaitais attirer l'attention du ministre des finances sur deux points principaux.
Le premier concerne l'aide que nous apportons à notre fédération d'entraide polynésienne de sauvetage en mer. Nous n'avons pas la SNSM en Polynésie, nous avons une association locale, avec 430 bénévoles qui assurent des missions dans plus de dix points de la Polynésie et, très franchement, l'aide qui leur est accordée est minime. Je souhaitais donc demander au Gouvernement de renforcer son soutien financier à cette fédération, ne serait-ce que pour équiper les bénévoles.
Le second point, le plus grave, concerne la surveillance maritime de notre zone puisque nous avons perdu le patrouilleur des douanes, l'Arafenua. Il opérait des missions de surveillance douanière, de contrôle des bateaux de plaisance, de pêche, de commerce, mais assurait aussi un service redéployé des douanes, essentiellement dans les îles éloignées, venait en relais pour des actions douanières à terre, des actions de surveillance au profit de notre environnement, des actions de sauvetage en mer. Ce patrouilleur s'est échoué en juin 2013 et, malheureusement, la brigade qui lui était dédiée a été redéployée au sein d'autres brigades. Très concrètement, nous sommes passés de 150 jours de surveillance en mer à 80 jours.
Nous sommes donc inquiets. Comme je l'ai souligné, c'est un territoire grand comme l'Europe, qui représente la moitié de la surface maritime française. Ne serait-ce que pour la sécurité de notre espace maritime, nous vous sollicitons parce que nous sommes dans une période où nous devons renforcer notre sécurité au titre de la lutte contre le terrorisme.
Ce sont tous ces enjeux qui se jouent aujourd'hui de l'autre côté de la planète, il ne faut pas nous oublier. Nous comptons sur vous, madame la ministre, pour relayer très fortement ce message au sein du Gouvernement. C'est une urgence, c'est primordial pour la sécurité de tous les Français.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Madame la députée, l'implication du Gouvernement dans le maintien de la sécurité en mer et la surveillance de son domaine maritime, notamment dans le Pacifique, demeure pleine et entière, même si c'est complexe, vous avez raison de le souligner.
Le ministre des finances et des comptes publics m'a chargée de vous répondre qu'il avait pris en compte votre préoccupation quant au niveau de la subvention publique attribuée à la fédération d'entraide polynésienne de sauvetage en mer, dont la détermination relève toutefois des attributions du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
S'agissant de la présence maritime de l'État en Polynésie, la vedette garde-côtes de la douane, bâtiment hauturier de 32 mètres, s'est en effet échouée en revenant d'une mission aux Marquises, le 1er juin 2014. Cette fortune de mer a entraîné la perte du bâtiment, qui a dû être démantelé sur place. L'atoll a également fait l'objet d'une dépollution, qui s'est achevée en septembre dernier.
La rupture capacitaire pour l'exercice des missions de l'action de l'État en mer en Polynésie fait toutefois l'objet d'un examen approfondi, sous l'égide du secrétariat général de la mer, afin de trouver des solutions de court terme et de long terme.
Une réunion s'est tenue le 29 janvier au secrétariat général de la mer en présence de la direction générale des outre-mer et de l'état-major de la marine. Plusieurs options sont en cours d'évaluation, qui concernent le développement du renseignement maritime afin d'exercer des contrôles plus ciblés, la redéfinition de l'emploi des moyens de l'État sur zone et l'exploitation d'images satellitaires. La solution identifiée pourra naturellement faire l'objet d'un échange avec les collectivités concernées.
Vous serez associée au rapport qui sera réalisé à la suite de cette réunion du 29 janvier, comme les parlementaires qui en feront la demande. Il est important d'associer les collectivités parce que cette question demande effectivement deux types de réponses : à court terme, comment faire le plus vite possible, et, à moyen terme, que faire pour assurer la sécurité et rasséréner les populations et les visiteurs de cette partie de France que nous aimons particulièrement ?
M. le président. La parole est à Mme Maina Sage.
Mme Maina Sage. Je vous remercie, madame la ministre, pour ces éléments de réponse. Une réunion a été organisée en urgence et j'en suis ravie pour tous ceux qui travaillent à la surveillance de cette très grande surface maritime puisqu'elle représente la moitié de la surface maritime française.
Dans le cadre de la restructuration des moyens que vous mettez en œuvre dans l'espace français, on pourrait peut-être, en urgence et en attendant une solution définitive, nous faire parvenir un patrouilleur de manière à combler le manque de moyens actuels.
Auteur : Mme Maina Sage
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Finances et comptes publics
Ministère répondant : Finances et comptes publics
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 janvier 2015