Fabrication de la liasse
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Supprimer les alinéas 12 à 14.

Exposé sommaire

L’article L. 163‑2 du code électoral instaure une nouvelle procédure de référé, ouverte uniquement pendant les périodes électorales précédant les scrutins d’ampleur nationale, qui serait portée devant un seul tribunal de grande instance. Se prononçant dans un délai de 48 heures, ce juge des référés pourrait, à la demande du ministère public ou de toute personne ayant intérêt à agir, prescrire aux hébergeurs ou, à défaut, aux fournisseurs d’accès à internet toutes mesures aux fins de faire cesser la diffusion artificielle et massive, par le biais d’un service de communication au public en ligne, de faits constituant des fausses informations.

Cette nouvelle voie de droit pose question et comporte plusieurs difficultés.

D’une part, le Conseil d’État, dans son avis du 19 avril, a souligné, notamment, la difficulté tenant à l’objet même de cette nouvelle procédure : « les « faits constituant des fausses informations » sont en effet délicats à qualifier juridiquement, à plus forte raison lorsque le juge saisi doit statuer à très brefs délais et sans que ne soit nécessairement mis en cause l’auteur des contenus litigieux. »

En outre, l’utilité de cette nouvelle procédure n’est pas évidente. Le droit français contient déjà un arsenal juridique très fourni visant à lutter contre les fausses informations, qu’elles soient diffusées en ligne ou sur un autre support. Ainsi l’article 27 de la loi du 29 juillet 1881 punit la propagation de fausses nouvelles lorsqu’elles sont susceptibles de troubler la « paix publique ». L’article L. 97 du code électoral réprime, quant à lui, la publication de fausses nouvelles ayant eu pour effet de fausser un scrutin électoral. Au-delà de ces textes spécifiques, il ne faut pas oublier que des incriminations générales peuvent être utilisées. Notamment, l’infraction de diffamation est tout à fait apte à sanctionner n’importe quelle fausse information de nature à porter atteinte à l’honneur et à la considération d’une personne, ce qui est généralement le cas d’une « fake news ». De même, si la falsification porte sur un aspect de la vie privée, l’article 9 du code civil peut parfaitement trouver à s’appliquer. Enfin, l’article 226‑8 du code pénal réprime les montages cachés et permet de lutter contre les manipulations d’images ou de sons dissimulées. Divers moyens permettent donc déjà de lutter contre les « fake news ». Dans tous ces cas de figure, si les faits sont établis de façon évidente, le juge des référés peut le cas échéant intervenir.

Enfin, ce nouveau dispositif comporte un risque de dérive majeure : la censure et donc l’atteinte à la liberté d’expression. Comme le souligne, Romain Badouard, maître de conférences à l’Université Cergy-Pontoise, si Facebook, ­YouTube ou Twitter risquent une grosse amende, comme en Allemagne, pour ne pas avoir retiré assez rapidement un contenu, alors ces entreprises préféreront censurer trop que pas assez. Or, les réseaux sociaux sont encore aujourd’hui un outil au service de la démocratie car chacun peut y prendre la parole et relayer des informations. Si les conditions pour y diffuser des contenus deviennent trop contraignantes, ce potentiel sera perdu. Les « fake news » peuvent être un obstacle à la bonne tenue du débat public, c’est indéniable. Mais une régulation trop stricte de la circulation des informations sur les réseaux sociaux fera peser demain de lourdes menaces sur l’exercice de la liberté d’expression.

Pour l’ensemble de ces raisons, le présent amendement vise à supprimer la nouvelle procédure de référé instaurée par l’article L. 163‑2 du code électoral.