Question de : M. Martial Saddier
Haute-Savoie (3e circonscription) - Les Républicains

M. Martial Saddier souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la gratuité du transport scolaire. À l'heure où le Gouvernement réforme l'apprentissage et la voie professionnelle, il paraît essentiel de revenir sur le transport scolaire qui fait partie intégrante de la gratuité de l'école. En effet, selon une étude faite par la FCPE, la majorité des personnes sondées affirment payer entre 50 et 200 euros par an et pour certaines familles, en particulier de lycéens du professionnel ou d'apprentis, ils déclarent des montants entre 750 et 900 euros. Or le coût du transport scolaire influe sur les choix d'orientation et les chances de réussites des élèves, surtout si ceux-ci sont issus de départements ruraux. Face à cette situation, des régions ont mis en place des politiques de gratuité des transports. Or, dans une précision doctrinale administrative (PDA) datée du 21 février 2017, la direction de la législation fiscale (DLF) définit un seuil de 10 % pour le ratio recettes/dépenses (R/D) des services de transport scolaire afin de déclencher l'assujettissement à la TVA. Actuellement deux tiers des départements ne laissent à charge des parents d'élèves que de 0 à 10 % du coût total annuel par élève transporté, soit quelques dizaines d'euros (sur un coût total de 1 000 euros annuels). Ce calcul aura donc pour conséquence inéluctable une remise en cause généralisée de la « gratuité » assurée jusque-là, les régions étant incitées à éviter la « double peine » (financer la part familiale tout en renonçant à récupérer la TVA). Ainsi, il souhaite connaître la position du Gouvernement sur cette question de la gratuité des transports scolaires et sur cette directive de la direction de la législation fiscale.

Réponse publiée le 13 novembre 2018

Lorsqu'elle constitue une activité économique et ainsi que le prévoit l'article 256 B du code général des impôts (CGI), l'activité de transports de personnes accomplie par une personne morale de droit public est, en tout état de cause, assujettie à la TVA. Ainsi, la fourniture, par une autorité organisatrice de transports (AOT), de prestations de transports de personnes à titre onéreux doit être soumise à la TVA. Une telle activité est réalisée à titre onéreux lorsqu'il existe un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue. Pour cela, le bénéficiaire de la prestation doit en retirer un avantage individuel et le niveau de cet avantage doit être en relation avec le prix payé. A ce titre, dans le situation du transport scolaire, le seuil de 10 % n'a pas été fixé « au doigt levé », mais résulte d'une étude systématique de la jurisprudence récente de la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE). La Cour, dans l'arrêt Gemeente Borsele (Aff. C 520/14) rendu le 12 mai 2016, a jugé en présence de contributions acquittées annuellement par les usagers ne couvrant que 3 % de la totalité des frais annuels de transport, qu'il résulte d'une telle asymétrie entre les frais de fonctionnement et les montants perçus en contrepartie des services offerts, une absence de liens réels entre la somme acquittée par les familles et la prestation de services fournie. Il s'ensuit qu'aucun droit à déduction de la TVA d'amont n'a pu être admis car dans de telles circonstances, la prestation est située en dehors du champ d'application de la TVA. Toutefois, cet arrêt ne fixe pas de seuil en pourcentage permettant de considérer que la prestation entre dans le champ d'application de la TVA s'agissant du transport. Par le passé, la CJUE, dans sa décision Commission contre Finlande (Aff. C-246/08), a cependant refusé la qualité d'assujetti à une personne publique dont les revenus d'une activité d'assistance juridique ne couvraient que 8 % des coûts engagés. Dans sa décision Gemeente Woerden (Aff. C 267/15), la Cour a admis que la commune soit qualifiée d'assujettie bien que celle-ci, dans les circonstances de l'affaire, ne percevait comme recettes que 10 % de ses coûts. Dès lors qu'en matière de transport scolaire, le prix demandé aux usagers est très inférieur au coût supporté par l'AOT, l'étude de la jurisprudence européenne conduit à l'instauration d'un seuil minimal de 10 %. Pour l'AOT, le seuil de 10 % s'apprécie en fonction de l'ensemble des recettes taxables issues de l'activité de transport scolaire, y compris, le cas échéant, les subventions complément de prix mentionnées au a) du 1 de l'article 266 du CGI, rapporté à l'intégralité de son coût de revient annuel. Enfin, il est précisé que la fixation d'un seuil répond à un objectif de sécurité juridique et qu'antérieurement, l'absence de précision sur ce seuil ne signifiait pas que l'ensemble des AOT étaient fondées à déduire la TVA grevant leurs dépenses d'amont sans prendre en compte le niveau des recettes acquittées par les usagers.

Données clés

Auteur : M. Martial Saddier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Collectivités territoriales

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Dates :
Question publiée le 3 juillet 2018
Réponse publiée le 13 novembre 2018

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