Accompagnement des entreprises face à l'extraterritorialité du droit américain
Publication de la réponse au Journal Officiel du 16 avril 2019, page 3568
Question de :
M. Jean-Luc Lagleize
Haute-Garonne (2e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
M. Jean-Luc Lagleize interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour accompagner les entreprises françaises et européennes face à l'extraterritorialité du droit américain. En effet, les États-Unis sont particulièrement connus pour l'extraterritorialité de leur législation. Le Foreign corrupt practices act (FCPA) par exemple est une loi fédérale américaine datant de 1977 visant à lutter contre la corruption d'agents publics à l'étranger. Cette loi a un impact international depuis 1998 puisqu'elle concerne depuis lors l'ensemble des actes de corruption commis par des entreprises ou des personnes, américaines ou non, qui sont soit implantées aux États-Unis, soit simplement cotées en bourse sur le territoire américain ou qui participent d'une manière ou d'une autre à un marché financier régulé aux États-Unis, via une transaction en dollars par exemple. À travers cette loi, et sous couvert de lutte contre la corruption, les États-Unis peuvent décider de manière unilatérale des sanctions juridiques, économiques et commerciales impactant directement des entreprises françaises et européennes, mais aussi les employés et les dirigeants de ces mêmes entreprises. Il se trouve en effet que la majorité des entreprises qui ont écopé de sanctions ou ont été poursuivies au cours des dernières années étaient européennes et non américaines. Les entreprises françaises et européennes ont ainsi dû débourser des dizaines de milliards d'euros d'amendes au fil des années, créant de fait une concurrence déloyale avec les entreprises américaines et également un manque à gagner important pour les pouvoirs publics français et européens. Il convient ainsi de mener un véritable travail de réflexion sur l'extraterritorialité de la législation des États-Unis et sur les moyens juridiques de la contrer. Il l'interroge donc sur les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour accompagner les entreprises françaises et européennes face à l'extraterritorialité du droit américain.
Réponse publiée le 16 avril 2019
Le recours croissant, par les Etats-Unis, à des dispositions extraterritoriales en matière de sanctions financières internationales et de lutte contre la corruption, est particulièrement regrettable. Il s'agit d'un point important des discussions que la France entretient avec l'administration américaine, notamment dans le cadre des échanges en cours au sujet de l'Iran, suite à la décision américaine unilatérale de réimposer les sanctions préexistantes à l'accord de Vienne de 2015. Le Gouvernement s'est engagé à mobiliser nos partenaires européens pour renforcer la souveraineté économique de l'Union européenne, notamment en étudiant la faisabilité de nouveaux outils susceptibles d'atténuer les effets de ces législations extraterritoriales sur les opérateurs européens. La Commission européenne, avec le soutien de la France et de ses partenaires européens, a d'ores et déjà étendu le champ d'application du règlement européen 2271/96, qui permet désormais de protéger les entreprises européennes exerçant des activités licites en Iran contre l'extraterritorialité des sanctions américaines, signe de notre mobilisation collective sur le sujet. Enfin, depuis l'annonce du rétablissement des sanctions américaines à l'encontre de l'Iran, en mai 2018, la France – aux côtés d'autres Etats-membres affinitaires - travaille activement à la constitution d'un canal financier autonome pour ses opérateurs, afin de pallier les défaillances de marché relevées sur les canaux bancaires. Au plan national, afin de faire face aux procédures donnant effet à des législations de portée extraterritoriale, la France dispose d'un outil de contrôle des informations transmises à des autorités étrangères : la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968, dite « de blocage », vise à encadrer la transmission d'informations à des autorités étrangères et à privilégier les outils conventionnels internationaux en vue de la recherche de preuves. Conscient que cette législation ne répond qu'imparfaitement aux difficultés rencontrées par nos opérateurs, le Gouvernement a confié à M. Raphaël Gauvain, Député de Saône-et-Loire, une mission sur les mesures nécessaires pour accroitre la protection des entreprises françaises confrontées à ces procédures administratives et judiciaires.
Auteur : M. Jean-Luc Lagleize
Type de question : Question écrite
Rubrique : Traités et conventions
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 10 décembre 2018
Dates :
Question publiée le 9 octobre 2018
Réponse publiée le 16 avril 2019