Question de : M. Dominique Potier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Dominique Potier alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les orientations stratégiques actuellement suivies par l'Office national des forêts (ONF), qui suscitent des inquiétudes quant à l'avenir de l'Office et pourraient fragiliser son rôle dans la lutte contre le changement climatique. De la métropole à l'outre-mer, l'ONF assure la gestion de près de 11 millions d'hectares de forêts publiques appartenant à l'État et aux collectivités territoriales. La forêt française est la troisième forêt européenne en superficie (la forêt guyanaise mise à part). Elle est la principale forêt européenne en termes de biodiversité tant par les espèces végétales qui la composent que par la faune sauvage qui l'habite. Elle est un des poumons majeurs de l'Europe et le principal instrument naturel de lutte contre le réchauffement climatique. Elle représente 25 % de la surface forestière nationale. Enfin, elle est la principale source de production de bois en France. Les missions de l'ONF sont situées à la croisée des enjeux économiques, écologiques et sociaux, ce qui en fait un acteur incontournable au service du développement durable et de la transition énergétique. Chaque jour, les forestiers veillent à l'entretien, au développement et au renouvellement des forêts et des espaces naturels. Fort de son expérience de gestionnaire des forêts publiques, l'ONF propose des prestations à destination des collectivités, des entreprises et des particuliers souhaitant valoriser leurs espaces naturels. À la demande de l'État, l'ONF assure également plusieurs missions d'intérêt général dans le domaine des risques naturels : protection du littoral, restauration des terrains de montagne ou encore défense des forêts contre les incendies. Or, dans un contexte financier difficile et face à des centaines de suppressions d'emplois dans les années à venir, l'ONF semble se tourner vers une politique d'exploitation accrue des bois, au détriment de la gestion durable des forêts. Les orientations poursuivies conduisent ainsi à abandonner des missions régaliennes de surveillance du territoire par les agents armés de l'ONF, à mettre fin à ses missions environnementales qui garantissent un bon état de la forêt et des milieux forestiers ou encore à une perte irréversible de compétences du fait de la réduction du recrutement sur concours (notamment d'ingénieurs forestiers). Cette situation met clairement en péril la capacité de l'État français non seulement à dégager un bénéfice durable de l'exploitation de ses forêts, mais également à lutter contre le dérèglement climatique. Il lui demande donc davantage de transparence sur le maintien des missions de service public de l'Office national des forêts et l'appelle à maintenir dans ses préoccupations primordiales les services environnementaux rendus par les forêts et leur biodiversité, notamment face au réchauffement climatique.

Réponse publiée le 19 février 2019

L'action de l'office national des forêts (ONF), établissement public à caractère industriel et commercial, est guidée par la mise en œuvre d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) fixant ses axes de travail. Le COP a été signé par l'État, la fédération nationale des communes forestières et l'ONF le 7 mars 2016 pour la période 2016-2020. Le COP confie en premier lieu à l'ONF la mission, prévue à l'article L. 221-2 du code forestier, de gérer durablement les forêts publiques, en intégrant leur triple vocation écologique, sociale et économique. L'exploitation raisonnée des forêts est prévue dans le cadre d'aménagements forestiers programmant les coupes et les travaux. La récolte de bois dans les forêts publiques contribue à l'approvisionnement de la filière bois et apporte des recettes aux communes concernées permettant notamment d'investir dans le renouvellement de ces forêts. L'ONF joue ainsi un rôle moteur, au sein de la filière forêt-bois, en faveur de la transition énergétique et dans la préservation et le développement de notre patrimoine forestier. Le secteur forêt-bois constitue en effet un secteur stratégique pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 inscrite dans le plan climat et déclinée par la stratégie nationale bas carbone en cours de révision. Il alimente l'économie en produits bio-sourcés et renouvelables, fournit la biomasse pour l'énergie et constitue un puits de carbone significatif. Dans ce contexte, les ministères de tutelle, ministère de l'agriculture et de l'alimentation et ministère de la transition écologique et solidaire, accordent la plus grande importance à son bon fonctionnement. Le COP prévoit en effet la stabilité des financements de l'État, ce qui est exceptionnel dans le paysage des opérateurs qui sont tous soumis à des réductions de moyens. Pour sa part, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation maintient ses financements à l'ONF à hauteur de 140,4 M€ par an au titre du « versement compensateur », pour contribuer à la couverture du coût que représente pour l'ONF la gestion des forêts des collectivités et à hauteur de 26,2 M€ par an pour financer les missions d'intérêt général qui sont confiées à l'ONF. Dans le même temps, l'ONF doit améliorer la marge de ses activités commerciales et maîtriser ses charges, et donc ses effectifs, pour limiter son endettement. Cette orientation implique des changements significatifs passant notamment par une gestion dynamique des ressources humaines. L'exercice 2017, a conduit à la dégradation de la situation financière de l'ONF, l'endettement a atteint 320 M€, pour un plafond autorisé en loi de finances de 400 M€. Cette dégradation est liée à une activité bois en repli tandis que les charges ne diminuent pas à due concurrence des produits. Le dépassement observé sur la masse salariale en 2017 (+ 4,8 M€) a conduit à des décisions interministérielles. L'État a versé la totalité de la contribution d'équilibre en 2018 et ainsi mobilisé 5,7 M€ supplémentaires par rapport aux crédits inscrits au budget initial. En contrepartie, l'ONF a gelé 145 équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT) pour assurer la maîtrise de la masse salariale. Ces efforts consentis par l'ONF devront être poursuivis en 2019, avec l'application d'un schéma d'emploi de - 80 ETP portant ainsi le plafond d'emploi à 8 536 ETPT en loi de finances initiale. Cette situation financière tendue ne remet cependant pas en cause l'avenir de l'établissement. Dans le cadre de son contrat d'objectifs et de performance 2016-2020, l'ONF a engagé de gros efforts pour améliorer l'efficacité de sa gestion : augmentation du chiffre d'affaires et de la valeur ajoutée, maîtrise des charges, autant d'efforts qui commencent à porter leurs fruits. Une mission interministérielle a été lancée par le Gouvernement afin de proposer les évolutions possibles pour assurer un modèle soutenable pour l'ONF et son articulation avec le développement des territoires. Elle contribuera à la préparation du futur COP, afin que celui-ci participe à l'objectif de relance de la filière engagé dans le cadre du plan d'action interministériel forêt-bois. Les conclusions de la mission sont attendues pour la fin du premier trimestre 2019.

Données clés

Auteur : M. Dominique Potier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Bois et forêts

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Dates :
Question publiée le 27 novembre 2018
Réponse publiée le 19 février 2019

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