Régulation des cryptomonnaies
Question de :
M. Luc Carvounas
Val-de-Marne (9e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Luc Carvounas interroge M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique, sur les problématiques liées à la généralisation de l'offre de cryptomonnaie à travers le territoire français à partir du 1er janvier 2019. Le G20 ne reconnaît pas à la cryptomonnaie le statut de monnaie, mais la considère comme un « crypto-actif », c'est-à-dire « des actifs virtuels stockés sur un support électronique permettant à une communauté d'utilisateurs les acceptant en paiement de réaliser des transactions sans avoir à recourir à la monnaie légale ». La Banque de France ne reconnaît pas la cryptomonnaie comme un titre de créance, ni comme une action, mais comme « tout instrument contenant sous forme numérique des unités de valeur non monétaire pouvant être conservées ou être transférées dans le but d'acquérir un bien ou un service, mais ne représentant pas de créance sur l'émetteur ». L'Autorité des marchés financiers a d'ores et déjà alerté sur les cas d'arnaques aux épargnants et de risques compris dans ces cryptomonnaie pour les consommateurs et investisseurs, particuliers ou institutionnels. En effet, le cours chaotique de ces cryptomonnaies est illustré par celui de Bitcoin, qui vient de connaître une chute toute aussi spectaculaire que son explosion il y a plus d'un an. Si le droit européen de circulation des capitaux et la réalité de l'économie interdit d'interférer en quoi que ce soit en matière d'investissement, rien n'empêche la puissance publique de prévenir ses citoyens et entreprises de toute démarche malveillante. Aussi, il semble nécessaire de conférer un statut juridique à la cryptomonnaie afin de permettre aux autorités judiciaires de sanctionner les délits liés à ce phénomène nouveau. Mais surtout, la lutte contre les démarcheurs pillant l'argent des épargnants doit être une priorité avant que ce phénomène ne prenne une dimension que l'État ne saurait maîtriser. Il lui demande des précisions quant aux politiques de préventions qui seront menées d'ici au 1er janvier 2019 afin de protéger les épargnants, les investisseurs et les consommateurs des dérives pouvant découler de l'accès généralisé à la cryptomonnaie.
Réponse publiée le 4 juin 2019
Le Gouvernement souligne que la protection des investisseurs contre les fraudes constatées en matière d'actifs numériques est au cœur de son action et du cadre réglementaire créé dans le projet de loi relatif au plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (dite loi PACTE). Les actifs numériques constituent un champ particulièrement propice à la commission de nombreuses escroqueries : manipulations de cours (dont les risques s'accroissent avec la concentration des activités de minage), cyber-attaques sur les plateformes de change ou sur les ordinateurs des utilisateurs (logiciel de rançons payables en actifs numériques), faux sites d'investissement (scams) ou levées de fonds pour des projets fictifs. Ces risques justifient donc la mise en place d'un cadre réglementaire. Plus spécifiquement, la loi PACTE, au-delà de l'application des dispositions européennes qui s'imposent en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, propose aux prestataires de services sur actifs numériques et aux émetteurs de jetons, un visa ou un agrément optionnel. Ce régime facultatif s'applique aux actifs numériques qui ne sont pas assimilables à des instruments financiers et permet d'apporter une réponse pertinente aux défis posés par ce marché émergent. Ainsi, la mise en place d'une liste blanche des projets sérieux et robustes, publiée par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) permettra d'envoyer un signal clair aux consommateurs en prenant en compte l'évolution rapide de ce marché et les limites pratiques et technologiques que pourrait rencontrer une réglementation obligatoire. Cette démarche active, volontaire des acteurs, s'accommode mieux d'un dispositif optionnel que d'un régime obligatoire et d'une liste noire, par essence incomplète, qui soulèveraient par ailleurs des obstacles de mise en oeuvre et risquerait d'induire le consommateur en erreur. Aussi, l'article 26 bis B de la loi PACTE interdit le démarchage et le parrainage aux prestataires de services sur actifs numériques n'ayant pas obtenu l'agrément optionnel de l'AMF et aux émetteurs de jetons non-labélisés. Est également interdite aux acteurs non agréés ou non labélisés par l'AMF toute publicité, directe ou indirecte, diffusée par voie électronique ayant pour objet d'inviter une personne, par le biais d'un formulaire de réponse ou de contact, à demander ou à fournir des informations complémentaires, ou à établir une relation avec l'annonceur, en vue d'obtenir son accord pour la réalisation d'une opération. Cette interdiction est de nature à limiter le risque de fraude et ainsi de perte pour les épargnants.
Auteur : M. Luc Carvounas
Type de question : Question écrite
Rubrique : Moyens de paiement
Ministère interrogé : Numérique
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 4 décembre 2018
Réponse publiée le 4 juin 2019