Gabon : la France complice de la dynastie Bongo
Question de :
M. François Ruffin
Somme (1re circonscription) - La France insoumise
M. François Ruffin attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la disparition inquiétante de quatre syndicalistes. Entre le 10 et le 12 juillet 2019, quatre syndicalistes ont été enlevés par des hommes armés, à leur domicile, en plein Libreville, la capitale du Gabon. Parmi eux, Simon Ndong Edzo, le secrétaire général de la centrale syndicale Dynamique Unitaire et Sylvie Nkogue Mbot, leader du syndicat des professionnels de santé Hippocrate. Un opposant, Privat Ngomo, a également été interpellé par la police alors qu'il lisait une déclaration devant l'ambassade de France appelant Emmanuel Macron à cesser de soutenir le président gabonais Ali Bongo. Depuis le 12 juillet 2019, aucune nouvelle des quatre syndicalistes enlevés. Cela semble être une pratique hélas trop courante de ce régime douteux. Oui, douteux : en 2016, Ali, le fils d'Omar Bongo, parrain de la « Françafrique », était vainqueur d'une élection présidentielle controversée. Par exemple, dans sa région natale, le Haut-Ogooué, Ali Bongo avait recueilli 95,46 % des voix (contre 49,80 % au niveau national) de 99,93 % des inscrits. Un vrai plébiscite à la nord-coréenne ! Le « QG » du candidat de l'opposition, Jean Ping, avait été pris d'assaut par les forces de sécurité faisant des morts. En 2017, le Parlement européen avait adopté une résolution condamnant la fraude électorale et les violences qui s'en étaient suivies. Mais l'État français, lui, avait entériné la victoire de M. Bongo. Depuis, il soutient le pouvoir en place. L'Agence française de développement (AFD) a accordé un prêt de 255 millions d'euros à l'État gabonais. L'argent des contribuables sert-il réellement à construire des écoles, des routes et des hôpitaux au Gabon ? Il convient d'en douter. Malgré le pétrole, malgré le bois, malgré le manganèse, et même malgré l'or, les immenses richesses ne semblent pas ruisseler dans la population. Le pays pointe à la 110e place sur 189 à l'indice de développement humain. La faute à un clientélisme forcené, à un népotisme historique, sous le regard bienveillant, voire complice, de l'État français. Il lui demande d'intervenir auprès de la dynastie Bongo, de toute urgence pour faire libérer les syndicalistes, c'est le minimum qu'il puisse faire.
Réponse publiée le 15 octobre 2019
La France suit avec une grande attention la situation au Gabon. Les personnalités qui avaient été arrêtées entre le 10 et le 12 juillet, hommes politiques et syndicalistes, ont depuis été relâchées. La France souligne régulièrement auprès des autorités gabonaises, avec lesquelles elle entretient un dialogue constant, son profond attachement à la liberté d'expression. Au sujet des élections présidentielles de 2016, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères s'est exprimé à plusieurs reprises. Il avait notamment fait valoir que la contestation des résultats devait pouvoir se faire par les voies institutionnelles, dans le cadre des procédures transparentes et impartiales. La France a estimé que les autorités gabonaises avaient la responsabilité première de prendre les initiatives qui restaureraient la confiance des Gabonais en leurs institutions et n'éloignaient pas le Gabon des normes internationales en matière de droits de l'Homme et d'État de droit. Le Gabon a connu entre-temps, l'organisation d'un scrutin législatif en octobre 2018 qui s'est déroulé sans heurts. Au plan économique, la France se mobilise aux côtés du Gabon et plus généralement auprès des États membres de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) pour les aider à faire face à la situation financière difficile qu'ils connaissent. Dans le cadre d'une approche régionale et d'une démarche collective et coordonnée des partenaires de la CEMAC, la France apporte ainsi son appui au programme que le Gabon a conclu avec le FMI. Ce programme comporte notamment un volet relatif à l'apurement des arriérés intérieurs, dont les arriérés de TVA. L'aide française se matérialise par un prêt de soutien budgétaire opéré par l'Agence française du développement, mis en place au bénéfice de l'État gabonais, dans le cadre du programme du FMI.
Auteur : M. François Ruffin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 23 juillet 2019
Réponse publiée le 15 octobre 2019