Question écrite n° 26659 :
Fermeture des distributeurs automatiques de billets dans les territoires ruraux

15e Législature

Question de : M. Dominique Potier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la fermeture des distributeurs automatiques de billets (DAB) en milieu rural. Cette interpellation s'inscrit en complément des différentes questions écrites déjà posées sur le sujet et en réaction aux réponses apportées par M. le ministre qui restent partielles et insuffisantes. Il rappelle quelques chiffres préoccupants donnés dans le rapport du groupe de travail sur l'accessibilité aux espèces présidé par la Banque de France publié en juillet 2019, malgré la qualité générale de l'accessibilité aux espèces sur le territoire. Le nombre de distributeurs de billets a diminué de 5,3 % en métropole entre 2015 et 2018. 198 communes (dont 195 de moins de 5 000 habitants) ont été déséquipées, ce qui signifie la fermeture du seul DAB disponible sur la commune. 175 communes (20 508 habitants de 15 ans et plus) sont à plus de 30 minutes du DAB le plus proche. Cette tendance à la fermeture des DAB, notamment dans les territoires ruraux, entraîne déjà des conséquences négatives pour les communes les plus fragiles, parmi lesquelles le déclin de l'attractivité et la fermeture des petits commerces. On ne peut que s'inquiéter sur les perspectives à moyen et long terme. Face à cela, il convient donc d'adopter une démarche proactive et régulatrice afin d'anticiper la désertification bancaire des territoires ruraux, de la même manière que le new deal numérique doit permettre de mettre fin aux déserts numériques. À l'aune de cet objectif, on ne saurait se contenter de solutions temporaires sans engagement de l'État, à l'image de l'autorisation donnée aux commerçants de pratiquer le cash back, qui consiste à retirer de l'espèce auprès d'un commerçant en complément d'un achat réalisé à un rendu d'espèces complémentaires à un achat. Elle ne garantit ni la compensation du déséquipement des communes, ni une répartition équitable sur le territoire des services bancaires. De même, la modération des commissions imposées aux commerçants sur les paiements par carte bancaire afin de faciliter le paiement par carte pour les consommateurs ne répond que partiellement au problème. Dans de nombreuses communes, le paiement en espèces est la seule option car les commerçants ne disposent pas de terminaux de paiements, inutiles en zone blanche où la connexion numérique est insuffisante. Les déserts bancaires sont de fait aussi souvent des déserts numériques. Enfin, le fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce (FISAC), qui aurait pu servir au financement de l'installation d'un DAB dans les communes non-équipées, a été placé en gestion extinctive par la loi de finances de 2019. En conséquent, au-delà des solutions temporaires susmentionnées, il souhaite connaître ses intentions sur cette question.

Réponse publiée le 25 août 2020

La désertification bancaire et les difficultés d'accès aux espèces dans certains territoires sont une préoccupation pour le Gouvernement. Le rapport du groupe de travail sur l'accessibilité aux espèces a été publié en juillet 2019. Il confirme globalement une très bonne accessibilité aux espèces, par le biais d'un réseau de près de 53 000 distributeurs automatiques de billets et de plus de 23 000 points de distribution d'espèces, par exemple chez des commerçants ou des débitants de tabac : - 98,9 % de la population âgée de 15 ans et plus réside soit dans une commune équipée d'au moins un distributeur, soit dans une commune située à moins de quinze minutes en voiture de la commune équipée la plus proche ; - en moyenne, un habitant résidant dans une commune non équipée d'un automate est à huit minutes en voiture de la commune équipée la plus proche ; - en prenant en compte l'ensemble des points d'accès, 0,1 % de la population (soit 34 268 personnes âgées de 15 ans et plus) se situe à plus de 15 minutes d'un point de délivrance d'espèces. Il peut être rappelé que depuis 2015 la très légère baisse du nombre de distributeurs qui a été observée traduit principalement une optimisation des installations existantes, majoritairement dans les zones urbaines et péri-urbaines, communes de plus de 10 000 habitants, ayant un fort taux d'équipement, sans dégradation de l'accès aux espèces. Cette baisse résulte d'un double mouvement de fermetures de certains distributeurs très peu utilisés et d'ouverture de nouveaux distributeurs (notamment dans 131 communes préalablement non équipées), ce qui témoigne de l'adaptation du réseau de distributeurs aux besoins des territoires. Il convient par ailleurs de relever qu'il s'agit le plus souvent d'une rationalisation en zone urbaine, qui accompagne une réalité incontournable : le déclin certes très progressif mais net de l'usage des espèces par les consommateurs, et le développement des paiements dématérialisés, qui ont vocation à représenter une part croissante des transactions. Le Gouvernement demeure attentif avec la Banque de France à assurer la continuité de l'accès aux espèces dans ce contexte. A cet égard, il peut être précisé que la loi du 2 juillet 1990 prévoit que La Poste a l'obligation de faire en sorte que, sauf circonstances exceptionnelles, 90 % de la population de chaque département soit éloignée de moins de cinq kilomètres et de moins de vingt minutes de trajet automobile, des plus proches points de contact de La Poste. Le réseau de La Poste doit par ailleurs comporter au moins 17 000 points de contact au plan national. Au niveau local, cette mission est mise en œuvre dans le cadre d'une concertation au sein des commissions départementales de présence postale territoriale (CDPPT). À ce titre, La Poste maintient, au-delà de ses besoins commerciaux, un réseau de points de contact dans les zones rurales et de montagne, les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les départements d'outre-mer. Ces points de contact offrent un accès aux services financiers et au retrait d'espèces. La Banque Postale est loin d'être la seule sur le territoire ; les banques mutualistes en particulier, disposent de réseaux bancaires capillaires très développés et contribuent de manière très significative à la présence bancaire territoriale. Le contexte fortement évolutif des usages des moyens de paiement demandera une attention particulière au cours des années à venir, afin de continuer de garantir à tous et partout l'accessibilité aux espèces, et de préserver la liberté de choix du moyen de paiement, en particulier pour les populations fragiles ou habitant en milieu rural. En revanche, obliger les acteurs bancaires à implanter des agences bancaires en zones rurales serait inapproprié voire juridiquement impossible. Une telle obligation occasionnerait une compensation pour ne pas se heurter au principe d'égalité devant les charges publiques et au principe constitutionnel de libre entreprise, et, partant, induirait des coûts budgétaires. Elle provoquerait des effets d'aubaine importants compte tenu de la capillarité actuelle des réseaux, et ce alors même que des solutions privées répondent aujourd'hui efficacement aux besoins. Enfin, le Gouvernement encourage le déploiement de solutions alternatives comme les points de distribution d'espèces chez les commerçants, d'une part, et le dispositif de fourniture d'espèces dans le cadre d'une opération de paiement (dit « cash back ») qui permet un rendu d'espèces complémentaires à un achat à la demande du client auprès des commerçants qui le proposent, d'autre part, pour assurer des solutions concrètes et opérantes pour assurer un accès facilité au plus grand nombre. Le Gouvernement reste attentif au déploiement de ces dispositifs et aux réflexions en cours sur de nouvelles solutions qui permettront d'améliorer la vie des Français dans le cadre d'un accès serein aux espèces.

Données clés

Auteur : M. Dominique Potier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Banques et établissements financiers

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie, finances et relance

Dates :
Question publiée le 18 février 2020
Réponse publiée le 25 août 2020

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