Disneyland : menace de licenciement des intermittents
Question de :
M. Alexis Corbière
Seine-Saint-Denis (7e circonscription) - La France insoumise
M. Alexis Corbière attire l'attention de Mme la ministre du travail sur le risque de licenciement qui pèse sur les intermittents du spectacle à Disneyland Paris. En raison de la crise sanitaire, selon plusieurs sources, la direction des parcs de Disneyland Paris chercherait à se séparer brutalement des 350 intermittents qu'elle avait recrutés au début de l'année. Comédiens, danseurs, cascadeurs, nombre d'entre eux ont été engagés en prévision du déroulement de quatre spectacles, tous annulés en raison du confinement. Par un courriel daté du mercredi 1er avril 2020, la direction des ressources humaines du groupe les a enjoints à « une rupture amiable de leur contrat de travail » en demandant une réponse avant le 2 avril, soit en moins de 24 heures. Pire, selon plusieurs témoignages, avant même l'envoi de ce message, des intermittents auraient reçus des appels de la direction insistant sur la nécessité de rompre leur contrat. Si elles sont avérées, de telles pressions sont inacceptables. En cas de refus, la menace d'être « écarté » pour de prochaines opportunités professionnelles aurait en outre été soulevée par le groupe. Si cette menace était mise à exécution, cela priverait durablement les intermittents de débouchés professionnels que concentrent des structures d'une telle envergure. Les intermittents sont inquiets d'un possible et probable passage en force du groupe. Disney pourrait invoquer « un cas de force majeure » et procéder unilatéralement à leur licenciement. La fin de leur contrat risquerait d'entraîner la perte de leur statut. Un artiste intermittent doit en effet travailler au moins 507 heures sur une période d'un an. Or la fin anticipée de leur contrat ne leur permettrait pas de valider ce volume horaire. Autre effet pervers : de nombreux artistes licenciés par Disney sont logés dans des résidences du groupe le temps de leur mission. Ces derniers subiraient une double peine : la perte de leur emploi mais aussi celle de leur logement. Cette profession, déjà souvent précarisée par les contraintes qui pèsent sur elle, ne doit pas se voir fragilisée davantage par la crise sanitaire. Enfin, aucun motif économique ne semble justifier de telles ruptures au regard des 14,9 milliards d'euros de bénéfices dégagés par le groupe Disney l'an dernier. Il lui demande donc les mesures qu'elle entend prendre pour garantir la sauvegarde de l'emploi des intermittents du spectacle de Disneyland Paris et, par extension, des intermittents placés dans une situation similaire ou identique.
Réponse publiée le 16 février 2021
Le Gouvernement a mis en place des dispositifs de sauvegarde à destination des intermittents du spectacle. D'une part, ils peuvent bénéficier du dispositif d'activité partielle lorsque des engagements contractuels ont été pris, d'autre part leurs droits à l'assurance chômage sont prolongés jusqu'au 31 août 2021 pour tenir compte de l'arrêt de l'activité et de sa reprise difficile. Les solutions sont adaptées en fonction de l'évolution de la crise sanitaire. À ce titre, le dispositif d'activité partielle vient d'être à nouveau prolongé. Concernant le dispositif d'activité partielle, le décret n° 2020 1681 du 24 décembre 2020 et le décret n° 2020-1786 du 30 décembre 2020 viennent de paraître. En janvier comme en février, les entreprises des secteurs protégés (parmi lesquels les secteurs culturels) ou fermées sur décision administrative continueront de bénéficier d'une prise en charge à 100 % (l'allocation versée à l'employeur est de 70 % du salaire brut, l'indemnité au salarié de 70 % du salaire brut). Pour les autres entreprises, le reste à charge continuera d'être de 15 % (allocation de 60 % du salaire brut antérieur, indemnité de 70 % du salaire brut). Plus spécifiquement, pour le secteur de la culture, et afin d'adapter le dispositif aux nouveaux engagements conclus dans le temps, le Gouvernement a souhaité également actualiser la mise en œuvre du dispositif élaboré en mars 2020 : désormais, en cas de contrat ou de promesse d'embauche avant le 10 décembre, l'employeur pourra solliciter le bénéfice de l'activité partielle pour les représentations programmées entre le début du couvre-feu (17 octobre 2020) et la date de réouverture des salles de spectacle, qui ont fait l'objet d'une annulation liée à la crise sanitaire. En ce qui concerne la protection sociale des intermittents, le Président de la République, sur proposition du ministère de la culture, avait annoncé son souhait de voir leurs droits prolongés jusqu'au 31 août 2021 afin, de la même façon, de tenir compte à la fois de la période d'arrêt de l'activité, mais également des conditions de reprise progressives. Ces aménagements spécifiques ont été actés et sont prévus par l'arrêté du 22 juillet 2020 portant sur les mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 5421-2 du code du travail, ainsi que par le décret n° 2020-928 du 29 juillet 2020 portant sur les mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement des artistes et techniciens intermittents du spectacle. Cette mesure d'urgence mise en place par l'État se traduit par la mobilisation de 949 M€. Ce dispositif protecteur prévoit également de prolonger l'indemnisation des intermittents au titre des annexes VIII et X, ou au titre des allocations de solidarité intermittent (allocation de professionnalisation et de solidarité et allocation de fin de droits), sans réexamen des droits avant le 31 août 2021, sauf demande de réadmission anticipée de la part de l'intermittent. La date anniversaire est donc repoussée au 31 août 2021. Cela signifie qu'en août 2021, la recherche des 507 heures de travail en vue d'une réadmission au régime des intermittents sera aménagée. Si la condition d'affiliation minimale de 507 heures au cours des 12 derniers mois n'est pas remplie, les heures de travail manquantes pourront être recherchées sur une période de référence allongée au-delà des 12 mois précédant la dernière fin de contrat de travail. Il est prévu que ces mêmes conditions de comptabilisation des heures s'appliquent si le demandeur d'emploi demande à bénéficier de la clause de rattrapage ou des allocations de solidarité intermittents. Afin de faciliter l'atteinte du seuil de 507 heures, le nombre d'heures d'enseignement pouvant être prises en compte au titre des annexes VIII et X a été augmenté (la limite de 70 heures est ainsi portée à 140 heures et celle de 120 heures pour les artistes et techniciens de 50 ans et plus à 170 heures). Les ministères de la culture et du travail, de l'emploi et de l'insertion professionnelle ont engagé un travail d'instruction qui a pour objectif d'anticiper les difficultés que pourraient rencontrer les populations d'intermittents qui, du fait des restrictions sanitaires, n'auront pas été en capacité de réunir, à l'issue de l'année blanche, les 507 heures leur permettant une réouverture de droits à ce régime de l'assurance-chômage. Il n'appartient pas, en revanche, à l'État de se prononcer sur les relations contractuelles individuelles internes à Disneyland Paris. Les services de l'État seront toutefois attentifs à ce que les actions conduites par Disneyland Paris soient conformes au droit et ne contournent pas les règles en vigueur.
Auteur : M. Alexis Corbière
Type de question : Question écrite
Rubrique : Arts et spectacles
Ministère interrogé : Travail
Ministère répondant : Culture
Dates :
Question publiée le 14 avril 2020
Réponse publiée le 16 février 2021