Fermeture administrative et prise en charge assurantielle pour les commerçants
Question de :
M. Guillaume Peltier
Loir-et-Cher (2e circonscription) - Les Républicains
M. Guillaume Peltier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences financières d'une fermeture administrative pour les locataires gérants commerçants. En effet, un commerçant doit non seulement faire face au paiement de son loyer (dû au propriétaire des murs), mais aussi au paiement du droit de terrasse, des charges classiques, ainsi qu'au paiement d'une redevance (due au propriétaire du fonds de commerce), le montant de cette dernière étant calculé lors de la signature du bail sur trois à six jours de chiffre d'affaires. Or, une décision gouvernementale de « fermeture obligatoire des lieux recevant du public non indispensable à la vie du pays », comme récemment face à la crise sanitaire du covid-19, prive les commerçants concernés du moindre chiffre d'affaires pour respecter leurs obligations contractuelles. Ainsi, il lui demande s'il envisage de rendre obligatoire la prise en charge automatique par les assurances de la redevance payée par un locataire gérant d'un commerce, au cas où ce dernier ferait face à une fermeture administrative de son commerce.
Réponse publiée le 22 décembre 2020
Le caractère inédit de la crise sanitaire qui frappe notre pays suite à la propagation du virus Covid-19 a conduit l'État à interdire l'accès au public d'un grand nombre d'établissements et à restreindre les déplacements des personnes aux seuls achats de première nécessité pendant la période du confinement. Cette situation sans précédent impacte brutalement la trésorerie et la situation financière de nombreuses entreprises qui ont vu disparaître tout ou partie de leur chiffre d'affaires. Afin d'accompagner les entreprises, le Gouvernement a rapidement édifié un important dispositif d'aides publiques et de reports de charges visant à assurer la trésorerie et plus généralement la survie des entreprises, mesures tant générales (chômage partiel, prêt garanti par l'État) que spécifiques s'agissant des TPE (fonds de solidarité, report/annulation des charges fiscales et sociales, aide des régions…). Parmi les nombreuses préoccupations économiques liées à la crise, la problématique du paiement des loyers s'est rapidement révélée un sujet central entre bailleurs et preneurs. Les graves conséquences de la crise sanitaire sur la situation financière des entreprises et en particulier des plus fragiles d'entre elles, a conduit l'État à prendre très rapidement un certain nombre d'initiatives en matière de paiement des loyers, en veillant à respecter les spécificités du contrat de bail qui, comme le contrat de location-gérance, relève du droit privé dans son application. Par ailleurs, il convenait de prendre en compte la grande disparité de situations au sein même de ces deux catégories d'acteurs et l'hétérogénéité des situations et des modèles économiques. Sur le plan juridique, il était difficilement concevable d'imaginer un système contraignant au sujet de contrats dans lesquels l'État n'était pas partie. Pour ces raisons, les initiatives prises par l'État revêtent principalement un caractère incitatif et les mesures édictées concernent uniquement les loyers, compte tenu de l'importance de ce poste de dépense pour la plupart des commerçants, notamment. Les redevances dues par le locataire-gérants n'ont pas été intégrées dans ces dispositifs. En conséquence, il appartient à chaque bailleur et locataire-gérant de se reporter aux contrats de location et d'assurances afin d'examiner les clauses prévues concernant la question du paiement des redevances. Par ailleurs, la prise en charge de ce type de dépense par les assurances n'a pas été envisagée en raison du caractère national et difficilement prévisible de la durée de la pandémie et, par conséquent, du poids financier potentiel qu'il représenterait pour ces entreprises. Cependant, une réflexion est en cours pour définir un nouveau cadre assurantiel adapté permettant à l'avenir une meilleure protection des entreprises notamment en cas de nouvelles catastrophes sanitaires. C'est la mission du « groupe de travail sur le développement d'une couverture assurantielle des événements exceptionnels, dont les pandémies » installé par le ministre de l'économie et des finances le 22 avril dernier. Ce groupe qui réunit les services de l'État, les représentants de la profession ainsi que des parlementaires et les représentants des organisations patronales doit prochainement faire des propositions prochainement, en vue d'une concertation plus large visant à valider des propositions à l'été. Ceci étant précisé, il importe de rappeler les principales mesures prises de part et d'autres sur la question des loyers qui aident de nombreux commerçants à faire face aux conséquences financières de la crise sanitaire, en complément des autres mesures dont elles peuvent bénéficier par ailleurs (activité partielle, fond de solidarité, prêts garantis par l'État…) : Le Président de La République, a annoncé, dès le 16 mars, le report du paiement des loyers des factures d'eau, de gaz et d'électricité pour les plus petites entreprises en difficulté. L'ordonnance du 25 mars 2020 est venue en préciser le cadre. Concrètement, pour bénéficier de ce report de loyers, il est nécessaire que les entreprises remplissent les conditions d'éligibilité au fonds de solidarité créé par l'État et les Régions pour prévenir la cessation d'activité des très petites entreprises (TPE), micro-entrepreneurs, indépendants et professions libérales particulièrement touchés par les conséquences économiques du Covid-19 : avoir 10 salariés au plus, un chiffre d'affaires annuel inférieur à 1 million d'euros et un bénéfice annuel imposable inférieur à 60000 euros. Par ailleurs, pour les bénéficiaires du premier volet de l'aide, un second volet permet aux entreprises de percevoir une aide complémentaire comprise entre 2 000 et 5 000 euros (selon la taille et la situation de l'entreprise et sous réserve du respect de certains critères) permettant de couvrir en partie le paiement des loyers. Pour les entreprises des secteurs de l'hôtellerie, restauration, cafés, tourisme, événementiel, sport, culture, ainsi que les entreprises de secteurs connexes, qui ont subi une très forte baisse d'activité, le fonds de solidarité a été prolongé jusqu'à la fin de l'année 2020 et élargi aux entreprises des secteurs concernés ayant jusqu'à 20 salariés et réalisant un chiffre d'affaires allant jusqu'à 2 millions d'euros. Les aides versées dans le cadre du deuxième volet du fonds, peuvent aller jusqu'à 10 000 euros et être utilisées pour le règlement des échéances locatives. Parallèlement, le Gouvernement a mené de nombreuses initiatives auprès des bailleurs à destination des TPE et des PME. Ainsi, plusieurs fédérations représentant des bailleurs ont consenti par solidarité à l'annulation de 3 mois de loyers pour les TPE de moins de 10 salariés et demandé à leurs adhérents - pour les autres entreprises fragilisées par la crise économique et sanitaire - d'engager des discussions avec leurs locataires en difficulté afin de réduire la tension sur leur trésorerie, en adaptant au cas par cas la réponse, et les aménagements qui pourraient être accordés. Afin d'inciter les bailleurs à consentir des annulations de loyers commerciaux, la deuxième Loi de finances rectificative pour 2020, adoptée le 23 avril 2020 permet aux bailleurs constitués sous forme de sociétés commerciales qui acceptent d'abandonner des créances de loyers, de déduire ces abandons de créances de leur bénéfice imposable, sans qu'il soit nécessaire de justifier du caractère normal d'un tel abandon. Récemment, les travaux de concertation confiés par le Ministre de l'économie à Mme Prost, conseillère maître à la cour des comptes, entre les fédérations de bailleurs professionnels et les fédérations de commerçants, ont abouti à la signature d'une charte encadrant les reports et annulations de loyers pour la période de confinement et la période de reprise jusqu'au 30 septembre 2020. Cette charte permet aux commerçants et aux bailleurs de se référer à un accord cadre commun et des règles de bonne conduite pour leurs discussions de gré à gré. La charte a reçu l'adhésion des fédérations de bailleurs (CNCC, FSIF, UNPI, AFG, ASPIM, FFA) et de fédérations de commerçants (Confédération des commerçants de France, Commerçants et artisans des métropoles de France, fédérations de l'habillement, de l'équipement du foyer, des détaillants de la chaussure, de la photographie, la fédération des marchés de gros, le syndicat national des antiquaires, le Comité des Galeries d'art). Dans cette charte, les bailleurs acceptent de reporter 3 mois de loyers (2 au titre du confinement et 1 correspondant à un prorata des 4 mois de reprise jusqu'à septembre) pour les commerçants qui en ont besoin, quelle que soit leur taille. Le bailleur et son commerçant devront s'accorder avant le 30 juin sur le règlement des sommes reportées et l'échéancier de remboursement, qui pourra s'étendre au-delà du 30 septembre si la situation du commerçant le justifie. L'ensemble de ces mesures constitue un soutien essentiel aux commerçants fragilisés par la crise économique et sanitaire liée au Coronavirus Covid-19 depuis le mois de mars. Elles devraient également favoriser le redémarrage de l'économie dans les mois à venir. Le Gouvernement poursuivra son soutien aux TPE et aux indépendants durant cette phase délicate de reprise. Le plan de relance dédié au commerce de proximité, à l'artisanat et aux indépendants dévoilé le 29 juin 2020 par le ministre de l'économie et des finances comporte des mesures très concrètes pour renforcer la trésorerie des entreprises comme le maintien du fonds de solidarité pour le mois de juin, le déblocage anticipé des plans d'épargne retraite et la suppression sur 3 ans de la majoration de la base taxable de 25 % pour les indépendants qui n'adhèrent pas à un organisme de gestion agréé.
Auteur : M. Guillaume Peltier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Dates :
Question publiée le 2 juin 2020
Réponse publiée le 22 décembre 2020