Lutte contre la violence et assises départementales de la sécurité
Question de :
M. Mansour Kamardine
Mayotte (2e circonscription) - Les Républicains
M. Mansour Kamardine alerte M. le ministre de l'intérieur sur le poursuite du développement de la violence à Mayotte. Depuis un an, un retour du phénomène de bandes violentes, de bandits de grands chemins et d'agressions suivies d'atteintes aux personnes est constaté, dans les quartiers d'habitations, sur la voie publique, aux abords des structures éducatives, en milieu hospitalier, en zone rurale, au sein des emprises d'entreprises du secteur privé, y compris celles recevant du public comme les restaurants et les hôtels. Depuis le début de l'année, plusieurs assassinats sont à déplorer, de nombreuses personnes ont été mutilées, des centaines ont été blessées, les forces de l'ordre sont quotidiennement agressées. La population de Mayotte ne supporte plus l'inadéquation des moyens de lutte contre l'insécurité et la situation vécue localement. Elle s'inquiète au plus haut point et demande que des mesures de lutte générale contre les violences aux personnes soient prises sans délai. Il lui rappelle que la grave crise sociale qui a paralysé Mayotte en 2018 a été déclenchée par l'absence de prise en compte au niveau approprié par le Gouvernement de l'insécurité. Il lui rappelle également que les politiques publiques, y compris en matière de sécurité, sont élaborées sur la base d'une population officielle inférieure d'environ 40 % à la population réelle, entrainant des sous-effectifs structurels. Il lui rappelle enfin que les pouvoirs publics porteront une grave responsabilité s'ils poussaient les citoyens à s'organiser eux-mêmes pour assurer la compétence régalienne de la sécurité publique. C'est pourquoi il lui demande, à quelques semaines de la fin des vacances d'été de renforcer immédiatement et de façon permanente le plan de sécurisation des transports et des établissements scolaires, de renforcer sensiblement les effectifs permanents des forces de l'ordre à Mayotte notamment les effectifs dédiés à la sécurité publique et d'organiser des assises de la sécurité à Mayotte associant l'ensemble des acteurs institutionnels et associatifs.
Réponse publiée le 8 décembre 2020
A Mayotte, les services de l'Etat et les forces de l'ordre sont pleinement mobilisés pour garantir la stabilité, lutter davantage contre l'immigration clandestine et préserver le tissu économique local. Mayotte fait ainsi l'objet d'une attention particulière, tant dans la prise de mesures d'urgence que dans la mise en œuvre de plans spécifiques successifs. Après le plan Mayotte, sécurité pour tous en 2016 et le Livre bleu outre-mer de 2018, ont été développés un plan de développement de Mayotte en 2018 et le plan civilo-militaire Shikandra en 2019. Le ministère de l'Intérieur y est particulièrement engagé, en collaboration étroite avec le ministère des Outre-mer. Ces derniers mois, la crise sanitaire a accentué les difficultés socio-économiques et fragilisé les efforts réalisés en 2019 et début 2020, notamment dans la lutte contre l'immigration irrégulière. En la matière, les perspectives sont désormais plus favorables. L'Etat consacre à Mayotte des moyens inédits afin de maîtriser l'insécurité. La prévention et la lutte contre les atteintes aux personnes et aux biens sont la priorité des forces de l'ordre. Les forces de sécurité intérieure (FSI) ont réalisé la quasi-totalité des préconisations prévues par ces dispositifs comme le plan « coupeurs de route » ou encore le plan dans les transports scolaires mis sur pied cette rentrée avec près de 250 gendarmes mobilisés. A la fin de l'année 2020, on comptera 352 gendarmes et policiers supplémentaires par rapport à 2015 (hors gendarmes mobiles), ce qui, avec l'augmentation des escadrons de gendarmerie mobile passés à 3 depuis 2019 (209 gendarmes), porte le nombre de FSI sur place à 1 229 (729 police nationale et 500 gendarmerie nationale). Cela représente une augmentation de 60,4% depuis 5 ans, soit le plus gros effort outre-mer en matière d'effectifs. La réorganisation des services opérationnels, amorcée dès 2017, a permis d'adapter les forces de l'ordre à l'évolution de la délinquance : - Côté police, la direction territoriale de la police nationale de Mayotte a été mise en place le 1er janvier 2020 et sera confortée. - Côté gendarmerie, dans le cadre de la sécurité du quotidien, le département bénéficie de renforts d'effectifs depuis 2018, d'un quartier de reconquête républicaine (QRR) créé en février 2019 à la Vigie à Pamandzi avec 10 gendarmes supplémentaires, de créations de 2 brigades territoriales autonomes (BTA) à Koungou et Dembeni, et d'une brigade de prévention de la délinquance juvénile à Mamoudzou. Un important dispositif préventif et de réaction aux troubles à l'ordre public permet, à chaque fois, un retour au calme dans de brefs délais. La capacité de réaction est notamment permise par des escadrons de gendarmerie renforcés de blindés agissant très rapidement au nord comme au sud de l'île. Indispensable à toute politique de sécurité, le travail partenarial se développe. A la fin de l'été 2020, le préfet a reçu les élus et les partenaires concernés afin d'apaiser les situations et d'identifier les solutions de médiation, d'éducation et de sécurité dont ils ont besoin. Il a ainsi proposé aux élus un « pacte de sécurité » avec un contrat d'objectifs afin de poursuivre les efforts de médiation, de financements d'équipements ou de dispositifs sociaux envers la jeunesse. Il s'agit aussi de coordonner la présence de la police et de la gendarmerie dans les quartiers les plus sensibles. Plus largement, l'Etat accompagne les communes dans le développement de la vidéo-protection avec, par exemple, 127 caméras à Koungou et l'incitation à la professionnalisation des polices municipales. Les premières assises de la Sécurité se sont également tenues les 9 et 10 novembre 2020. En outre, le milieu scolaire fait l'objet de la plus grande attention. Pour la rentrée 2020, un dispositif global d'accompagnement des bus et de sécurisation des abords des établissements scolaires a été mis en place en lien avec l'Éducation nationale. Ce renforcement de la sécurisation des établissements scolaires, de leurs abords et des transports publics, conduit à fidéliser les gendarmes mobiles sur cette mission, en établissant des protocoles pour renforcer les liens et l'échange d'information avec les équipes mobiles de sécurité de l'Éducation nationale ainsi que les entreprises de transports scolaires. Sur le long terme, et concernant la stratégie de lutte contre l'immigration clandestine et de maîtrise de nos frontières, un plan gouvernemental ambitieux, terrestre et maritime, lancé en août 2019, a porté ses fruits jusqu'avant le confinement, et sera consolidé en 2021. 27 421 éloignements de migrants clandestins ont été réalisés en 2019, contre 15 007 en 2018. Après l'interruption liée à la Covid-19, la montée en puissance du rythme des expulsions concentre tous les efforts actuels du Gouvernement. Entre août et septembre, 1 667 reconduites ont été effectuées. Depuis début octobre, ce sont désormais 5 départs par semaine. Le centre de rétention administrative (CRA) a retrouvé une pleine capacité de traitement des éloignements, soit 135 places après plusieurs mois à 70 places. La reprise des reconduites vers les Comores, notamment, permet aux forces à Mayotte de procéder, à nouveau, à des interpellations à terre, et d'amorcer davantage de retours. La lutte contre les filières s'est, en outre, poursuivie. Un travail de la préfecture est d'ailleurs engagé auprès des maires afin de sensibiliser les élus et de former les polices municipales et officiers d'Etat civil sur les sujets de la lutte contre la fraude documentaire et les marchands de sommeil ou l'emploi d'étrangers sans titre.
Auteur : M. Mansour Kamardine
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Outre-mer
Dates :
Question publiée le 18 août 2020
Réponse publiée le 8 décembre 2020