Question écrite n° 33684 :
Politique mémorielle sur les combattants d'Afrique de la Seconde Guerre mondiale

15e Législature

Question de : M. Jacques Marilossian
Hauts-de-Seine (7e circonscription) - La République en Marche

M. Jacques Marilossian attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants, sur la place et le rôle des combattants d'Afrique durant la Seconde Guerre mondiale. Le ministère des armées a publié en juin 2020 à l'usage des maires de France un livret de 100 fiches biographiques sur ces combattants encore méconnus de la majorité des Français. Cette démarche pourrait être développée par d'autres publications à destination du grand public en soutenant la recherche universitaire et une déclassification plus importante. Le soutien à la recherche et à la publication sur les combattants d'Afrique de la Seconde Guerre mondiale pourrait être également abordé dans le cadre d'une politique mémorielle fondée sur l'esprit de résistance et de la reconnaissance. Les combattants d'Afrique ont participé à l'effort de guerre de manière déterminante et méritent une reconnaissance pleine et entière pour le sang versé. Leur anonymisation au XXIème siècle n'est plus permise, comme ce fut le cas quand la France résistante fit le choix regrettable de « blanchir » la « colonne Leclerc » (future « 2ème DB ») avant son entrée dans Paris le 25 août 1944. Or depuis sa création, la colonne Leclerc était composée majoritairement de combattants d'Afrique, notamment de soldats natifs de l'ancienne Afrique équatoriale française (AEF). Il souhaite donc savoir si le Gouvernement compte axer sa politique mémorielle de façon plus active en faveur de la reconnaissance publique des combattants d'Afrique de la Seconde Guerre mondiale.

Réponse publiée le 12 janvier 2021

Le ministère des armées porte une attention particulière au souvenir des combattants africains engagés dans les conflits mondiaux. L'hommage rendu par la Nation à ces troupes revêt plusieurs dimensions (entretien et valorisation de lieux de mémoire, célébrations, soutiens à des productions éditoriales et audiovisuelles). De nombreux hommages ont été rendus à ces valeureux soldats : le 15 août 2014, lors du 70ème anniversaire du débarquement de Provence, de nombreux combattants d'Afrique ont été décorés dans les ordres nationaux. Le 15 avril 2017, 28 anciens tirailleurs sénégalais (de nationalités sénégalaise, congolaise, centrafricaine et ivoirienne) ont reçu la nationalité française lors d'une cérémonie à l'Élysée, en présence du Président de la République. Le 15 août 2019, à l'occasion du 75ème anniversaire du Débarquement de Provence, le Président de la République a rendu un hommage appuyé à l'action des combattants d'Afrique ayant libéré la France. Il a lancé un appel aux maires pour les inciter à donner à leurs rues et places des noms de combattants d'Afrique. Dimanche 21 juin 2020, s'est déroulée à la nécropole nationale du Tata sénégalais de Chasselay la cérémonie commémorative du 80ème anniversaire des combats de Montluzin et du massacre de Chasselay. La secrétaire d'État auprès de la ministre des Armées a procédé au dévoilement du panneau historique installé à l'entrée de la nécropole. Il est un rappel pour le visiteur des combats des 19 et 20 juin 1940, des massacres de prisonniers et l'édification du Tata sénégalais. S'agissant des cimetières et nécropoles, il convient de mentionner le cimetière militaire de Thiaroye (Sénégal) qui comporte 202 tombes « in memoriam » de soldats inconnus, morts durant la Seconde Guerre mondiale, dont les victimes de la repression du 1er décembre 1944. Longtemps laissé à l'abandon, il est entretenu par le ministère des armées depuis 2014. Le cimetière rénové a été inauguré par le Président de la République avec son homologue sénégalais, lors du Sommet de la francophonie, en novembre 2014. Dans le cadre de sa politique culturelle et de mémoire, le ministère des armées développe une politique de soutien aux productions éditoriales et audiovisuelles, dont certaines sont consacrées à l'Armée d'Afrique. En 2014, le ministère a coédité avec les éditions Perrin le livre d'E. Jennings, « La France Libre fut africaine », qui rappelle le rôle prépondérant de l'odyssée africaine et des troupes d'Afrique noire dans la Libération. Dans le cadre des célébrations officielles du cinquantième anniversaire des indépendances africaines et malgache (en 2010), le ministère a mis en oeuvre plusieurs projets et initiatives relatives au patrimoine qu'il conserve et à la mémoire partagée qu'il anime. Le coeur du projet consistait en la réalisation d'un véritable centre de ressources, accompagné d'actions de terrain dont une série de rencontres et d'échanges avec les anciens combattants, les forces armées et la population. En 2010, il s'agissait de mettre en œuvre un programme culturel associant les armées, la diplomatie, la culture et l'éducation dans une programme global intergénérationnel ayant pour objectif de créer un centre de ressources. En métropole, et complément des cérémonies officielles et des actions spécifiques de médiation culturelle organisées autour du portail internet, la DMPA a mené des actions de terrain pour renforcer la dimension pédagogique des célébrations : le muséobus des forces armées du Sénégal fut le point d'ancrage de ces rencontres. En région comme à Paris et sa banlieue, les jeunes et les scolaires furent invités à visiter le muséobus, à assister à la projection de films et documentaires, à dialoguer avec les personnels des Forces armées sénégalaises et les personnalités qualifiées associées à ces échanges ; la tournée du muséobus comprit les étapes suivantes : Toulon, Fréjus, Marseille, Lyon (Chasselay), Paris, Tours et Bordeaux et Pessac. Sur le plan pédagogique, une exposition intitulée « Tirailleurs d'Afrique, des massacres de mai-juin 1940 à la libération de 1944-1945 : Histoire croisée et mémoire commune » a été inaugurée en juin 2020 sur le site de la nécropole nationale du Tata sénégalais de Chasselay. Elle est à la disposition des enseignants partout en France. En octobre dernier, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre a également organisé une journée d'études intitulée « D'une guerre à l'autre, les soldats des colonies et la France, 80ème anniversaire des massacres de mai-juin 1940 » au Cercle National des Armées à Paris. Ce colloque a regroupé de nombreux historiens et chercheurs internationaux autour de tables rondes présentant l'état de la recherche et les perspectives de réflexion sur l'Histoire et les mémoires des combattants d'Afrique. Par ailleurs, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) travaille à la réalisation d'un large corpus d'outils et d'actions pédagogiques à destination des enseignants et des jeunes sur le sujet des combattants africains engagés pour la France lors des différents conflits contemporains. Dans un premier temps l'Office souhaite associer les scolaires aux baptêmes de rue en leur proposant des activités pédagogiques comme la création d'un mobilier urbain temporaire présentant l'histoire du ou des combattants mis à l'honneur. L'ONACVG s'implique également dans à la création d'une mallette pédagogique présentant de nombreux contenus mobilisables par les enseignants. Enjeux, fiches pédagogiques, bibliographie, lexique, ressources, cette mallette serait distribuée aux enseignants lors des formations qui pourront être organisées en partenariat avec l'éducation nationale. Ce bilan témoigne de la volonté du ministère des armées de conduire une véritable politique mémorielle, commémorative, culturelle et pédagogique autour de l'histoire et de la mémoire combattante partagées avec le continent africain, Madagascar et les Comores.

Données clés

Auteur : M. Jacques Marilossian

Type de question : Question écrite

Rubrique : Anciens combattants et victimes de guerre

Ministère interrogé : Mémoire et anciens combattants

Ministère répondant : Mémoire et anciens combattants

Dates :
Question publiée le 10 novembre 2020
Réponse publiée le 12 janvier 2021

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