Santé mentale des étudiants
Question de :
M. Bernard Perrut
Rhône (9e circonscription) - Les Républicains
M. Bernard Perrut alerte Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur la santé mentale des étudiants. Les effets des confinements successifs ont mis en lumière un système de soutien psychologique étudiant à bout de souffle, avec des personnels qui, malgré leur bonne volonté, ne sont plus en état de remplir leur mission. Marquée par l'isolement et la précarité, la crise de la santé mentale étudiante est ancienne ; elle se joue dans un rapport frontal avec le désespoir - 75 % des épisodes psychiatriques apparaissent avant l'âge de 24 ans et le suicide est la 2ème cause de mortalité chez les jeunes (un chiffre qui pourrait augmenter de 30 % avec la covid-19 selon l'Australian Medical Association). Cette crise se joue d'abord sur le terrain, dans les services de santé universitaire qui n'ont pas les moyens de prendre en charge et d'aller vers l'ensemble des étudiants en détresse. La France accuse un retard considérable en matière de santé mentale étudiante. Aux États-Unis, on compte en moyenne un psychologue à temps plein pour environ 1 600 étudiants ; un Irlande, un psychologue pour 2 600 étudiants ; en Écosse, un pour 3 800 étudiants ; en Australie, un pour 4 000 étudiants ; en Autriche, un pour 7 300 étudiants. En France, on compte un psychologue pour 29 882 étudiants : cela représente près de 25 fois moins que les recommandations internationales, qui préconisent comme bonne pratique institutionnelle un psychologue pour 1 000 à 1 500 étudiants, huit fois moins que la moyenne des six autres pays recensés. Les services de santé universitaire, déjà surmenés avant l'épidémie, ne peuvent prendre en charge qu'une partie de la population étudiante qui en aurait besoin et la crise de la santé mentale étudiante, qui précède la covid-19, ne s'éteindra pas avec lui ! Face à ces effrayants constats, et alors que les étudiants paient déjà un lourd tribut avec la fermeture des universités qui remet gravement en cause le bon suivi de leurs études, il lui demande de connaître les mesures de soutien envisagées, en terme de soins comme de prévention.
Réponse publiée le 23 février 2021
La santé mentale des étudiants est une absolue priorité de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, qui a tenu à renforcer son suivi sur tous ses aspects : prévention, repérage, accompagnement et soin. La crise sanitaire a fortement impacté la santé mentale des étudiants, comme ont pu le mesurer les différentes enquêtes réalisées sur les effets des confinements. En 2020, deux enquêtes permettent d'approcher cette situation : celle de l'observatoire de la vie étudiante (OVE) et l'étude sur les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé, menée par la direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP), la conférence des présidents d'université (CPU) et l'association des directeurs des services de santé universitaires. Les services de santé universitaires témoignent par ailleurs d'une augmentation de la demande d'accompagnement en santé mentale et de délais allongés pour la satisfaction des rendez-vous. Rappelons qu'en 2019, avant la crise, ils ont assuré 550 000 consultations et examinent l'état psychologique de l'étudiant dans 95 % des examens de santé réalisés. Ils offrent des consultations de psychiatrie, de psychologie, d'écoute et ont construit des partenariats riches et variés avec des acteurs territoriaux sur le champ de l'accompagnement et du soin. Depuis le début de la crise du covid-19, la mobilisation n'a cessé de se renforcer. Les 48 services de santé qui ont répondu à l'enquête menée en 2020 proposent des consultations de médecine, ils disposent de 325 médecins, 262 personnels infirmiers, 134 psychologues et 59 assistantes sociales. A cela s'ajoutent des dentistes, sages-femmes, des chargés de prévention, chargés de projets ou étudiants pairs dédiés à la santé des étudiants. La conférence de prévention étudiante, instance de concertation créée par la loi n° 2018-166 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants en 2018 a réuni l'ensemble des acteurs de la vie étudiante et de la santé des étudiants pour une conférence exceptionnelle dédiée à la santé mentale novembre 2020. Elle a travaillé sur les axes de réflexion suivants : - Comment améliorer le repérage des étudiants en situation de souffrance ? - Comment rendre plus lisible et visible l'offre de soins et d'accompagnement en santé mentale ? Plus de 80 acteurs représentant les étudiants, les services de santé, les établissements, les mutuelles, les associations ont émis des préconisations sur ces thématiques. La nécessité de la prévention et du repérage sont soulignés et les actions déployées par les services de santé pour renforcer la résistance au stress et le repérage par des étudiants « pairs » formés spécifiquement qui orientent l'étudiant en souffrance vers le service de santé sont soulignées. Le déploiement des premiers secours en santé mentale se généralise au niveau national. De nombreux partenariats, notamment avec des établissements hospitaliers, des associations, des CMP, permettent également de mieux répondre aux besoins des étudiants. Le ministère en charge de l'enseignement supérieur finance des associations dont Nightline, que vous citez en référence et les mutuelles étudiantes qui mènent des études et des actions de prévention propres sur le champ de la santé mentale. Le financement de Nightline a été revu à la hausse pour 2020. Les actions menées par ces partenaires font l'objet d'un rapport annuel transmis au ministère par les acteurs. Afin de renforcer cet accompagnement, le Gouvernement a également souhaité doubler l'accompagnement par des psychologues et recruter 60 postes de travailleurs sociaux jusqu'à la fin de l'année 2021. La ministre a également tenu à soutenir la prévention par les pairs par le recrutement de 1 600 référents en cité U et de 20 000 étudiants tuteurs, qui sont autant de points de contact avec les étudiants, à même de les orienter vers les services compétents ou en cas de nécessité donner l'alerte. Le Président de la République a également annoncé, le 21 janvier dernier, la mise en place, dès le début du mois de février, d'un accompagnement psychologique pour les étudiants qui en expriment le besoin. Tout étudiant ressentant un mal-être pourra ainsi consulter un psychologue, dans le cadre d'un parcours de soins, sans avance de frais pour trois consultations. Si cela ne suffit pas, l'étudiant sera bien sûr accompagné par d'autres dispositifs. Tous les étudiants peuvent être bénéficiaires, grâce notamment à la coordination territoriale de cet accompagnement psychologique. Rappelons enfin que le constat ne peut se résumer au nombre de psychologues ou de psychiatres par étudiant. C'est pourquoi une réflexion qualitative globale est menée par le ministère en lien avec ses partenaires et la direction générale de la santé.
Auteur : M. Bernard Perrut
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement supérieur
Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Dates :
Question publiée le 1er décembre 2020
Réponse publiée le 23 février 2021