Question écrite n° 36144 :
Suppressions de postes d'enseignants dans le second degré et leurs conséquences

15e Législature

Question de : Mme Emmanuelle Anthoine
Drôme (4e circonscription) - Les Républicains

Mme Emmanuelle Anthoine interroge M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur les suppressions de postes d'enseignants dans le second degré et leurs conséquences préjudiciables. En vue de la rentrée scolaire de septembre 2021, le Gouvernement a prévu dans la loi de finances pour 2021 de supprimer 1 800 emplois d'enseignants dans le second degré. Les suppressions de postes annoncées interviennent dans un contexte de croissance des effectifs scolarisés dans le secondaire. Ces suppressions seront compensées par 1 847 équivalents de poste en heures supplémentaires. La dotation horaire globale, qui est attribuée aux différents établissements dans le secondaire, se compose d'un taux d'heures supplémentaires anormalement élevé. Ces choix du ministère interrogent, tant ils apparaissent préjudiciables à la qualité des conditions d'enseignement. Des postes d'enseignants vont ainsi être supprimés dans certaines matières, ce qui contraindra leurs collègues à assurer un nombre excessivement élevé d'heures supplémentaires. L'emploi du temps des élèves sera perturbé par les ajustements nécessaires à cette nouvelle configuration. Il sera en outre plus difficile d'organiser des temps d'enseignements en effectifs allégés (en dépit des injonctions en ce sens dans le cadre de la crise épidémique) du fait de la nécessité, qui ne pourra être satisfaite, de pouvoir aligner plusieurs enseignements de façon simultanée. Les établissements seront également confrontés à une difficulté accrue pour assurer des remplacements de courte durée en cas de professeur absent, en dépit d'un contexte sanitaire là encore propice à de telles absences. L'imposition du recours à un volume d'heures supplémentaires plus important compromettra également les possibilités d'échanges pourtant essentiels entre les parents et les professeurs. Ces rencontres seront d'autant plus difficiles que les enseignants auront davantage de classes à leur charge et donc d'autant plus de parents d'élèves à rencontrer. Ces heures supplémentaires limiteront également la disponibilité des enseignants pour suivre des actions de formation continue. Cette augmentation du recours aux heures supplémentaires interroge à l'heure où des discussions autour d'un Grenelle de l'éducation au ministère ont lieu afin d'améliorer les conditions d'exercice du métier d'enseignant et son attractivité. Objectifs qui semblent contredits par les choix opérés en matière de recours aux heures supplémentaires. La Cour des comptes, dans un rapport d'octobre 2020, a pointé du doigt le recours accru aux heures supplémentaires dans la fonction publique, dont le coût est sous-évalué. Ce rapport préconisait notamment de « limiter rapidement le recours aux heures supplémentaires symptomatique de problèmes d'organisation, d'attractivité et porteur de risques à la fois humains, financiers, organisationnels et opérationnels, qu'accroît un pilotage défaillant ». Aussi, elle aimerait savoir si le Gouvernement entend revenir sur cette politique de ressources humaines dans l'éducation nationale, qui risque de se faire au détriment de la qualité des enseignements dans le secondaire.

Réponse publiée le 20 juillet 2021

En 2021, le budget du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS) reste le premier budget de l'État, en augmentation d'1,6 Mds € pour la seule éducation nationale, et les emplois y sont globalement stabilisés. Malgré une baisse de 12 500 élèves entre le premier et le second degrés publics, les moyens d'enseignement seront en augmentation. La rentrée scolaire 2021 sera celle d'une priorité réaffirmée en faveur du premier degré ; de la maîtrise des savoirs fondamentaux et de la prise en charge dès le plus jeune âge des difficultés d'apprentissage. Dans l'enseignement scolaire public du second degré, le volume d'heures d'enseignement sera abondé en 2021. L'augmentation des crédits permet de proposer aux professeurs un volume d'heures supplémentaires, qui viendront plus que compenser la diminution des emplois. Au total, avec le plan de relance, les moyens d'enseignement augmenteront de l'équivalent de près de 1 000 équivalents temps plein (ETP). Les heures supplémentaires ainsi créées permettront d'apporter une réponse souple aux besoins réels des établissements, tout en améliorant sensiblement la rémunération individuelle des enseignants les assurant. Le MENJS veille à l'équité des dotations qu'il répartit entre académies. L'analyse des moyens mis à disposition tient compte notamment du poids de l'académie, de la démographie des élèves et des disparités sociales et territoriales. En outre, la trajectoire de rééquilibrage des dotations académiques sur l'ensemble du territoire conduit à des mesures de redéploiement des dotations afin de tendre vers plus d'équité sociale et territoriale. La mesure de création d'heures supplémentaires et de suppression d'emplois inscrite en loi n° 2020-1721 de finances initiale 2021 a été déclinée de manière différenciée entre les académies, et non selon une proportionnalité reproduisant strictement la mesure budgétaire. En tenant compte de la situation de chaque académie, cette méthode permet ainsi notamment que 4 académies bénéficient d'une attribution nette d'emplois d'enseignant au-delà de celle d'heures supplémentaires. Il appartient ensuite aux autorités académiques de répartir les moyens dont elles disposent entre les différents niveaux d'enseignement, en s'attachant à assurer la plus grande équité au profit de la réussite des élèves. Les mesures d'aménagement de la carte des formations et du réseau scolaire sont soumises à l'avis des instances consultatives locales. La Cour des comptes, dans son rapport d'octobre 2020 "les heures supplémentaires dans la fonction publique - exercices 2010-2018", souligne que les heures supplémentaires permettent de rendre compte d'une grande variété de situations, reflet de la multitude des choix d'organisation retenus par les administrations, et également d'adapter le service public aux évolutions de court terme. Les heures supplémentaires au ministère de l'éducation nationale, qui ne sont pas des heures supplémentaires au sens strict, s'ordonnent en plusieurs types. La Cour des compte analyse que les heures supplémentaires année (HSA) sont indispensables pour assurer la bonne adéquation entre les besoins en heures d'enseignants par discipline et le potentiel d'enseignement, qui dépend du nombre d'enseignants en poste. Elle note qu'elles représentent entre 8 % et 12 % des heures d'enseignements dans les lycées, et un peu moins dans les collèges. La Cour note : "ceci n'est pas imputable à un nombre d'enseignants insuffisant, mais que les heures supplémentaires constituent la variable d'ajustement permettant d'atteindre la situation d'équilibre entre les besoins en heures de cours et les obligations de travail des enseignants présents dans les établissements". Les heures supplémentaires permettent également de rémunérer le remplacement des enseignants absents, notamment de courte durée, gage de souplesse et de continuité des cours au sein de l'établissement scolaire. Ce dispositif a été mis en place afin de répondre au plus vite aux absences des professeurs. Les heures d'interrogation en classe préparatoire aux grandes écoles sont aussi des heures supplémentaires en termes budgétaires ; elles permettent de rémunérer cette particularité de l'enseignement dans ces classes. Une action structurelle a été engagée avec le dispositif introduit par le décret n° 2019-935 du 6 septembre 2019 portant création d'une allocation de formation aux personnels enseignants relevant de l'éducation nationale dans le cadre de formations suivies pendant les périodes de vacances des classes. Ce dispositif est en effet destiné à limiter les absences des professeurs, et donc, l'utilisation d'heures supplémentaires pour les remplacer. Pour l'année scolaire 2019-2020, selon l'étude de la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) du MENJS, le service moyen d'un enseignant du second degré comprend 1 h 30 d'HSA. La DEPP analyse que parmi les enseignants qui assurent des cours en 2018 et en 2019 (et éligibles aux HSA ces deux années), 39 % font davantage de HSA tandis que 31 % en font moins. Entre les rentrées scolaires 2020 et 2021, en moyenne, chaque enseignant consacrera environ 5 minutes supplémentaires en HSA.

Données clés

Auteur : Mme Emmanuelle Anthoine

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse et sports

Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse et sports

Dates :
Question publiée le 9 février 2021
Réponse publiée le 20 juillet 2021

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