Loi EGALIM et mécanismes de prix
Question de :
M. Vincent Rolland
Savoie (2e circonscription) - Les Républicains
M. Vincent Rolland interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les négociations annuelles entre grande distribution, centrales d'achat et PME agroalimentaires. Au cours des derniers mois, les agriculteurs ont dû s'adapter, en réinventant leur système de commercialisation. C'est particulièrement vrai en Savoie où, en l'absence de véritable saison touristique qui permet l'écoulement d'une partie de la production locale auprès des vacanciers, des investissements ont dû être réalisés pour trouver de nouveaux débouchés. Les enseignes de la grande distribution ont, pour certaines, fait preuve de solidarité en mettant en avant les produits locaux. Néanmoins, les négociations en cours pour la commercialisation des produits savoyards auprès des grandes enseignes laissent craindre une forte pression sur les prix. Pression que les exploitations ne pourront pas supporter financièrement. La loi Egalim ne remplit pas ses objectifs et doit donc être rectifiée. C'est pourquoi les agriculteurs savoyards demandent aujourd'hui que soient incluses de nouvelles dispositions telles que la non-négociabilité des conditions générales de vente pour les prix, la continuité des contrats historiques, l'obligation pour les opérateurs d'accepter des hausses avec une indexation de référence, l'obligation d'étiquetage d'origine pour tous les produits agricoles en France à partir de 5 % d'incorporation ou encore la création d'une véritable autorité de régulation en charge d'organiser les relations commerciales sur saisine d'une partie. Par conséquent, il souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce sujet et les dispositions qui seront prises pour garantir la pérennité d'une agriculture locale de qualité.
Réponse publiée le 27 avril 2021
Les prix payés aux producteurs, ainsi que les relations entre la production agricole, les industriels et les distributeurs sont une préoccupation constante du Gouvernement. Avec les états généraux de l'alimentation (EGA), puis la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi EGALIM, le Gouvernement a pris des mesures volontaristes pour aller plus loin face à l'enjeu de la répartition de la valeur entre ceux qui produisent, ceux qui transforment et ceux qui distribuent les produits agricoles. Cette loi a donné des premiers résultats encourageants, notamment dans la filière laitière. Ainsi, l'ensemble des dispositions de la loi EGALIM a contribué à améliorer les relations commerciales et le niveau du prix du lait payé aux producteurs. En 2019, le prix du lait payé aux producteurs est ainsi resté au-dessus du prix de 2018 tout au long de l'année. En particulier, grâce aux dispositions de la loi EGALIM, la baisse saisonnière des prix du lait observée chaque année au printemps lors de la période du pic de production a été très limitée. De manière générale et malgré des différences entre filières, la déflation des prix d'achat en grandes et moyennes surfaces a été stoppée au cours des années 2019 et 2020 (- 0,1 % en 2020 contre - 0,4 à - 0,6 % avant l'entrée en vigueur de la loi) même si la crise sanitaire et économique qui a marqué l'année 2020 a fragilisé la filière alimentaire, notamment par une réduction très forte de certains débouchés (restauration hors domicile notamment). Les interprofessions ont mené un important travail pour élaborer et diffuser des indicateurs de référence, même si ces indicateurs sont encore inégalement mobilisés en fonction des filières. Une première évaluation des dispositions expérimentales concernant le seuil de revente à perte et l'encadrement des promotions n'a pas permis d'aboutir à ce stade à des conclusions définitives. De nouvelles évaluations seront produites en octobre 2021 et octobre 2022. Elle montre néanmoins que ces dispositions n'ont pas augmenté les prix aux consommateurs, malgré les craintes initiales des associations de consommateurs. À l'occasion du cycle annuel de négociations commerciales 2021, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie ont appelé à la responsabilité et à l'engagement des distributeurs. En outre, ils ont indiqué qu'à leur demande, les contrôles pour faire appliquer la loi EGALIM étaient renforcés. Ainsi, les services de contrôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont auditionné plusieurs centaines de fournisseurs et de distributeurs afin de suivre « en temps réel » le déroulement de ces négociations et l'intégration des éléments de la loi, notamment l'utilisation des indicateurs de coût. L'objectif est que l'état d'esprit des EGA soit respecté pour une plus juste répartition de la valeur. Par ailleurs, la saisine du médiateur des relations commerciales agricoles est ouverte aux partenaires commerciaux de la chaîne alimentaire qui n'auraient pas réussi à s'accorder avant le 1er mars sur des conditions commerciales permettant au fournisseur de financer les hausses de coûts des matières premières ou de tenir ses engagements à l'égard de l'amont agricole sans fragiliser son équilibre économique. Les parties ayant saisi sans délai le médiateur des relations commerciales agricoles après le blocage des négociations pourront poursuivre leurs discussions sous son égide et tenter de conclure un accord dans le délai d'un mois (éventuellement renouvelable une fois) sans encourir de sanction pour non-respect de la date butoir. Il existe des sanctions qui peuvent être prises contre les acteurs qui ne respectent pas la loi. Ainsi, afin que la contractualisation ait un sens, une sanction est possible en cas de dérogation aux dispositions L. 631-24 du code rural. Est passible d'une amende administrative le fait, entre autres, pour un producteur ou un acheteur de conclure un contrat ou un contrat-cadre ne comportant pas toutes les clauses mentionnées dans la loi, le fait pour un acheteur de ne pas proposer une offre écrite de contrat au producteur qui en fait la demande et le fait pour l'acheteur de ne pas transmettre par écrit, à l'auteur de la proposition de contrat ou accord-cadre, tout refus ou réserve sur un ou plusieurs éléments de cette proposition de manière motivée et dans un délai raisonnable. Le montant de cette amende administrative ne peut être supérieure à deux pour cent du chiffre d'affaires hors taxes ou, quand il s'agit d'une organisation de producteurs, deux pour cent du chiffre d'affaires agrégé de l'ensemble des producteurs dont elle commercialise les produits. Enfin, les ministres ont confié à M. Serge Papin, ancien président directeur général du groupement système U, une mission visant à faire vivre l'esprit des EGA et à proposer des recommandations afin d'améliorer la mise en œuvre de la loi EGALIM. Ces recommandations, ont été remises le 25 mars 2021. Elles visent entre autres à consolider la marche en avant du prix, renforcer la transparence des négociations commerciales et à développer la contractualisation pluriannuelle. Elles interviennent en complément de travaux parlementaires en cours. Toutes ces propositions sont actuellement étudiées avec les parties prenantes pour identifier les suites à donner. Ainsi, tous les leviers sont utilisés afin de répondre aux engagements des EGA qui ont été traduits dans la loi EGALIM.
Auteur : M. Vincent Rolland
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 9 mars 2021
Réponse publiée le 27 avril 2021