Répression des manifestations en Colombie
Question de :
M. Dominique Potier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Dominique Potier alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les violences de l'État colombien contre la contestation sociale en cours. Depuis le 28 avril 2021, les grandes villes colombiennes sont le théâtre d'une mobilisation d'une large coalition de syndicats, d'étudiants, et d'indigènes contre les politiques menées par le Président Ivan Duque et son gouvernement. Cette mobilisation fait l'objet d'une répression particulièrement violente de la part de l'État colombien, à l'heure où des organisations de la société civile estiment que 31 manifestants ont déjà été tués, contre 19 selon les chiffres du gouvernement. Sans revenir ici sur la dynamique dans laquelle s'inscrit ce nouvel épisode de répression et la multiplication des assassinats de défenseurs des droits humains et d'opposants politiques en Colombie pointée du doigt par un rapport de l'ONU du 4 mars 2020, il souhaite l'interroger sur la position de la France et de l'Europe face à cette situation, à travers deux questions précises. Premièrement, peut-il garantir la traçabilité des fonds français dédiés à l'application des accords de paix en Colombie, notamment dans le cadre de l'aide publique au développement ? Deuxièmement, la France et l'Union européenne peuvent-elles faire valoir la clause sur les droits humains contenue dans l'accord de libre-échange conclu avec la Colombie, le Pérou et l'Équateur comme moyen de pression sur le gouvernement colombien pour mettre fin aux violations en cours ? Pour rappel, cet accord conclu en 2012 dispose que le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'Homme, ainsi que des principes de l'État de droit en constitue un élément essentiel. L'article 3 prévoit précisément qu'en cas de violation de ces principes toute partie puisse « adopter immédiatement des mesures appropriées, conformément au droit international ». Il l'interroge donc sur le rôle de la France dans la mise en œuvre des accords de paix et sa capacité à faire respecter les droits de l'Homme dans un pays avec lequel elle entretient de nombreuses relations politiques, historiques et commerciales.
Réponse publiée le 26 octobre 2021
La France est préoccupée par la situation sécuritaire en Colombie. La recrudescence des violences, et notamment les assassinats de défenseurs des droits de l'Homme, de leaders sociaux ou de communautés indigènes et afro-descendantes, sont principalement le fait de groupes armés illégaux, qui ont accru leurs activités dans certaines régions libérées par la guérilla des FARC à la suite de l'accord de paix avec le gouvernement colombien de 2016. Cet accord de paix, que la France a soutenu depuis ses débuts, est un progrès majeur pour atteindre une paix durable en Colombie. Cependant, sa mise en œuvre est encore loin d'être achevée. La sécurité des leaders sociaux et des anciens combattants, la participation politique de la population, la présence des services publics dans les zones reculées, la substitution volontaire des cultures illicites et l'accès plus équitable à la terre restent des enjeux à traiter. La France plaide, aussi bien devant le Conseil de sécurité des Nations unies que dans son dialogue avec les autorités colombiennes, pour une application intégrale de l'accord de paix. Notre soutien est également de nature financière, via la participation de l'Agence française de développement (AFD) et l'appui à des projets locaux dans les zones les plus affectées par le conflit. Le mouvement social que traverse actuellement la Colombie, qu'il convient de distinguer des problématiques sécuritaires liées à la situation post-conflit, est également une source de préoccupation. La France souscrit à la déclaration du Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, M. Josep Borrell, qui a appelé, dès le 6 mai, à la désescalade et à l'arrêt des violences. Nous nous sommes également exprimés par l'intermédiaire de notre ambassade en Colombie pour défendre le droit à manifester pacifiquement et souhaiter qu'une réponse politique soit apportée à ce malaise social par le dialogue entre les parties prenantes. La visite de travail de la Commission interaméricaine des droits de l'Homme, début juin, a représenté un pas vers l'apaisement. Par ailleurs, la France a toute confiance en la capacité des institutions judiciaires colombiennes pour enquêter et juger les responsables d'abus et de violences injustifiées.
Auteur : M. Dominique Potier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 8 juin 2021
Réponse publiée le 26 octobre 2021